Double championne du monde junior en 2022, Rebecca Castaudi attaque l’année 2023 avec l’ambition de se hisser parmi l’élite mondiale du pentathlon moderne. À 21 ans, la pensionnaire de l’INSEP et représentante de l’Armée de Champions est en pleine ascension dans un sport en mutation.
2022, une année avec énormément de grands moments pour vous, ce deuxième sacre de championne du monde junior en tête. Conserver son titre, c’est encore mieux ?
C’était un immense challenge. Gagner une fois, c’est difficile, confirmer, c’est encore plus dur ! J’étais d’autant plus fière que ça n’avait jamais été fait auparavant dans mon sport. Quand je suis arrivée à Zielina Gora [en Pologne], pour ces Mondiaux, je n’étais pas au mieux et je visais un top 5. Petit à petit, après avoir passé les qualifications et les demi-finales, je me sentais bien plus forte, et j’ai eu envie de viser le titre. Je suis montée en puissance, j’ai repris confiance. C’est ce qui m’a mené à faire ce 20/20 au tir en finale sur le laser-run, la dernière épreuve, où j’ai remonté tout le monde. Beaucoup d’émotions !
Cette année, vous avez pris part à vos premières épreuves internationales en seniors. Comment s’est passé ce baptême du feu ?
Ma première étape de Coupe du Monde, c’était un peu une catastrophe ! Je suis arrivée avec beaucoup de stress, des doutes… Je n’ai pas été en mesure de montrer ce que je savais faire. Néanmoins, j’ai eu l’occasion d’observer le très haut niveau, et ça m’a donné envie de m’entraîner plus dur et de revenir plus forte. Les championnats du monde seniors, c’était encore pire… Je ne dépasse pas les qualifications, tout va trop vite, et je passe à côté. Pour être honnête, j’avais peur. En débriefant, je me suis rendu compte de l’écart que j’ai à combler, mais aussi que j’avais les moyens d’y arriver. Pour ma dernière année en catégorie junior, j’ai énormément profité, avec également ces médailles d’or en relais aux championnats d’Europe et du monde. De très bons souvenirs partagés.
« Avec ce sport, on ne s’ennuie jamais ! »
Comment êtes-vous venue au pentathlon moderne ?
Petite, j’ai fait beaucoup de sports différents. J’ai toujours été hyperactive ! Tout le temps à fond, j’avais du monde à me canaliser. Un jour, mon père m’a amené à une journée des sports, avec plein de disciplines à l’essai. Il s’est dit « tiens, si je la laisse là-bas toute la journée, le soir elle sera fatiguée ! » (rires). C’est comme ça que j’ai découvert la course et l’escrime, puis le pentathlon. Et finalement, c’est le sport qui m’a amené à devenir française. Avant 2015, je n’avais pas la nationalité, j’étais italo-ivoirienne. Quand les résultats sont venus, je me suis dit que je pouvais faire de belles choses, et la Fédération m’a aidé pour obtenir mes papiers. Désormais, ça fait 10 ans que je fais du pentathlon, et je suis fière de représenter la France à l’international.
Quelles sont vos disciplines de prédilection ?
Là où je suis le plus efficace, c’est le laser-run. J’adore la course et le tir. À l’inverse, la natation est là où je suis le moins à l’aise. À la course, je rattrape mon retard, alors je sais que j’ai toujours un moyen d’aller chercher un résultat à la fin. Avec toutes ces épreuves différentes, on ne s’ennuie jamais. Pour les athlètes, ça demande de s’adapter en permanence, d’être polyvalent et toujours en mouvement. Même à l’entraînement, on peut toujours travailler, quels que soient le temps ou nos blessures. Les disciplines sont très différentes à gérer, avec de la confrontation, de l’effort contre soi-même, sur l’eau, sur terre, sur un cheval…
Justement, l’équitation fera sa dernière apparition au sein du pentathlon moderne aux JO 2024. Qu’est-ce que vous en pensez ?
Je trouve ça triste. C’est une part importante du pentathlon qui disparaît. J’adore cette discipline, c’est une des premières qui m’a attiré. Notre sport, c’est la capacité à s’adapter. L’équitation représente vraiment cela, et beaucoup moins la course d’obstacle à pied qui la remplace. Beaucoup d’adeptes d’équitation venaient nous voir, impressionnés par ce qu’on arrive à faire avec un cheval. C’est vraiment dommage. Tout le pentathlon moderne est en train de changer, avec des essais sur le format, les jours de compétition… Comme d’habitude, on va s’adapter !
« Je rêvais de l’Equipe de France et des Jeux »
Avec Noyon, votre club dans l’Oise, l’histoire est particulière…
J’ai commencé le pentathlon à Saint-Denis, où j’habitais avec mes parents, mais le club a fermé au bout d’un an. Alors Noyon m’a contacté. Ils m’ont proposé une place à l’internat et un suivi particulier dont j’ai besoin, car je suis dyslexique. Le club a tout fait pour me mettre dans les meilleures conditions. J’y suis arrivée au collège, pour y rester pendant 7 ans, et j’y suis toujours licenciée. Depuis peu, j’ai intégré l’Armée de champions. Je suis très contente, c’est le meilleur sponsor qu’un sportif peut avoir. On peut totalement se concentrer sur le sport, en sachant qu’on a une solution derrière.
Vous êtes une des plus jeunes du groupe de l’Equipe de France. Qu’est-ce que cela vous apporte de progresser aux côtés de grands champions français, à l’image d’Elodie Clouvel ?
Avant mon entrée à l’INSEP, j’y étais déjà venue pour des stages. Je voyais Elodie et l’Equipe de France, je rêvais d’être avec eux, d’aller aux Jeux… Quand je suis entrée à l’INSEP, j’étais impressionnée : ils étaient dix fois meilleurs que moi, avec un immense palmarès… Aujourd’hui encore, il y a beaucoup de respect, mais je fais partie de ce groupe. Il y a une très bonne ambiance, et l’émulation est saine. J’apprends beaucoup à leurs côtés. L’objectif, c’est Los Angeles 2028 en premier lieu, à l’âge où on atteint la maturité dans mon sport. Mais pour Paris 2024, je ne m’interdis pas de rêver !
Par Etienne Le Van Ky