Gravement blessée à la cheville il y a près de deux mois, Margot Chevrier et sa volonté de fer tiennent encore à Paris 2024. Entretien avec l’athlète de la Team SPORTMAG.
Margot, au moment de cette interview, nous sommes deux mois après votre grave blessure à la cheville. Simplement, comment ça va ?
Ça va de mieux en mieux. Maintenant, je peux marcher sans béquille, dans la piscine ! On est loin des jours post-opération, où chaque mouvement me donnait envie de vomir. Chaque jour est fait de petites victoires. Aller chercher la confiture toute seule pour faire mes tartines, m’habiller moi-même… C’est important pour moi d’être mobilisée et investie, ne pas me laisser porter. C’est un moyen de reprendre le contrôle et garder la pêche. J’ai repris des entraînements le plus tôt possible, aménagés avec des spécialistes. Pas seulement de la mobilité de cheville, mais pour tout le corps. L’objectif, c’est que tout mon corps soit prêt, et qu’il n’y ait que mon talus à attendre (sourire). Là, cap sur le CERS de Capbreton, pour bien avancer dans la rééducation.
« Je reste dans un quotidien où chaque jour je dois me pousser à progresser, et continuer d’espérer »
La vitesse à laquelle vous vous êtes remobilisée pour repartir de l’avant est impressionnante…
Très vite, j’ai su qu’il y avait une chance, même infime, de me voir aux Jeux. Alors je veux y croire, et c’est à ça que je me raccroche. Cette blessure, c’est de la malchance, je ne peux pas en vouloir à quelqu’un. Alors, tout de suite, je change d’objectif. Je reste dans un quotidien où chaque jour je dois me pousser à progresser et continuer d’espérer. Il faut rester lucide sur le fait que ce n’est pas gagné du tout. Tant que la date n’est pas passée et qu’il reste une chance, je donne tout. Quand je vois les progrès en quelques semaines, ça donne beaucoup d’arguments à l’espoir.
Est-ce qu’à un moment, vous vous êtes dit que la perche et le haut niveau étaient finis pour vous ?
Quelques jours après mon rapatriement, j’ai vu un chirurgien en France. Je lui ai demandé ce qu’il pensait pour les Jeux, et il m’a regardé comme si je disais n’importe quoi. Il m’a répondu mot pour mot : « si tu ressautes un jour dans ta vie, ça sera déjà une belle victoire ». Et là, je prends un coup de massue. Même si j’étais préparée mentalement à abandonner les Jeux, là ça allait plus loin. Si j’enlève la perche, c’est mon quotidien et les dix prochaines années de ma vie qui disparaissent. Avec une possibilité de devenir handicapée à vie. Heureusement ça n’a pas duré très longtemps, l’espoir est vite revenu !
« Quelle que soit l’aventure qu’on tente, c’est impossible de le faire sans les autres »
À quel point l’entourage est-il important pour vous dans cette épreuve ?
Quelle que soit l’aventure qu’on tente, c’est impossible de le faire sans les autres. Mon coach et tout mon groupe d’entraînement à Bordeaux ont été génial, ils sont passés me voir à la maison. Discuter, se changer les idées… Gabriel (Tual, son compagnon et finaliste mondial du 800m) était toujours là au quotidien, alors qu’il devait gérer sa carrière à lui. Mes parents m’ont énormément soutenu. Sans tout cet entourage, on ne s’en sort pas. Ou du moins, pas bien. Plus largement, j’ai reçu énormément de message. De Renaud Lavillenie, Kévin Mayer, une vidéo de 3 minutes de Gianmarco Tamberi (champion olympique de saut en hauteur), de la ministre des Sports… Mais aussi de personnalités qui n’ont rien à voir avec le monde du sport, comme des chefs étoilés et le chanteur d’Indochine !