Cette semaine marque le coup d’envoi d’une période de trois mois au cours de laquelle vont s’enchaîner près d’une trentaine d’élections fédérales. SPORTMAG vous fera vivre ces changements ou bouleversements potentiels, au cœur d’une période « post Paris 2024 » décisive pour le sport français. Explications.
Dans quel contexte ?
Durant trois mois et jusqu’à la veille de Noël, près d’une trentaine de fédérations sportives sont appelées à voter, notamment pour renouveler présidence et conseil d’administration fédéral. Une vague d’élections en vue de la période 2024-2028 organisée, comme à l’accoutumée, au début de chaque Olympiade (à l’exception de la précédente en 2021, repoussée d’un an après les JOP de Tokyo en raison du Covid) et qui intervient après des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris qui ont marqué l’histoire du sport français au fer rouge.
Le début de cette nouvelle période décisive de quatre années (avec le fameux « Héritage 2024 » en toile de fond) va mener le sport français jusqu’aux Jeux de Los Angeles 2028, pourrait ainsi être marquée par un profond renouvellement au sein des instances dirigeantes et sportives alors que les enjeux, eux, seront d’importance et surtout, nombreux.
Quel mode de scrutin ?
C’est la principale nouveauté de ces élections fédérales. La loi Sport de mars 2022 est venue modifier le mode de scrutin avec pour principal changement – et quel changement – le vote des clubs. Exit le mode de scrutin des grands électeurs. Désormais, si les délégués des ligues régionales et des comités départementaux continuent de voter, ce sont les clubs qui disposeront de 50% des voix.
Les présidents de l’ensemble des clubs affiliés voteront à distance au nom de leur club par voie électronique, le vote étant à bulletin secret. Ainsi, les représentants des clubs auront dorénavant la possibilité de participer au suffrage direct garantissant une meilleure représentation. Autre nouveauté : la loi Sport impose la parité dans les instances dirigeantes dès cette année. Sans oublier la limite de trois mandats pour les présidents et présidentes élus.
Quels enjeux ?
Stop ou encore ? C’est le choix proposé aux votants de chaque fédération concernée. Certains sports ont brillé du côté de Paris et espèrent bien capitaliser sur cette dynamique. On pense spontanément à la natation, au tennis de table, au cyclisme, au judo ou à l’escrime, fédérations parmi tant d’autres qui connaissent un boom de licenciés depuis la rentrée. Certaines, au contraire, sont en zone de turbulences après des résultats décevants (tennis, lutte, hockey sur gazon, tir, aviron,…).
La hausse des licenciés est le nerf de la guerre des fédérations. Beaucoup ont souffert lors de la période Covid avant de retrouver des couleurs à l’approche de l’année 2024. La dynamique des Jeux et la promotion de l’activité physique et sportive comme Grande Cause Nationale 2024 doivent permettre au sport français d’attirer de nouveaux pratiquants dans les clubs.
Oui, mais pour les accueillir dans quelles conditions ? La question des infrastructures est également brûlante. Équipements vieillissants, voire vétustes (malgré le lifting d’une centaine d’infrastructures en France avant les JOP en guise d’héritage anticipé), peu adaptés à la pratique sportive : un sujet dont vont devoir s’emparer les fédérations sportives, en lien notamment avec les collectivités territoriales.
Pour accueillir les pratiquants dans les clubs, le sport français va aussi devoir repenser son système. C’est en pleine crise du bénévolat et parfois d’encadrants qualifiés, que se déroulent ces élections. Un système sous oxygène, pilier fragile sur lequel repose le sport français qui, s’il venait à s’effondrer, pourrait entraîner tout un écosystème dans sa chute. Et réduire à néant l’espoir né durant les JOP de Paris.
Plusieurs crises ouvertes
S’il y a bien une fédération au sein de laquelle le climat est bouillant et la crise de gouvernance béante, c’est du côté de la Fédération Française de Rugby. Le 19 octobre, le président en place, Florian Grill, va tenter de conserver son poste face à l’ex-international, Didier Codorniou. Jusque-là, la campagne s’est avérée extrêmement violente, sur fond d’affaires Jaminet – Jegou-Auradou, mais aussi du décès tragique de Medhi Narjissi lors d’un rassemblement de l’équipe de France U18. L’action en justice menée par la fédération pour impayés contre Le Coq Sportif, équipementier des équipes du XV de France, a achevé de mettre le feu aux poudres entre les deux candidats.
Peu en vogue en cette période électorale, le fair-play est pourtant de mise au tennis. Du moins dans les mots, puisque la Fédération Française de Tennis a mis en place un plan justement intitulé « Fair Play » (« Un plan d’action ambitieux visant à développer un environnement de travail serein, agréable et juste » souligne la FFT dans un communiqué de presse) alors que le contexte est compliqué, voire vicié pour Gilles Moretton, candidat à sa propre succession. Son premier mandat a en effet été marqué par une vague de départs, volontaires ou non, au cœur d’un climat social très tendu au sein de la fédération.
Les regards seront également braqués sur la Fédération Française de Boxe. Représentante de la France lors des derniers Jeux Olympiques, Estelle Mossely est désormais candidate à la présidence. La boxeuse n’a pas épargné sa fédération, jugeant que « les clubs souffrent » et que « la situation de la boxe en France n’est pas satisfaisante ». La place et le développement du MMA seront également un des enjeux forts de cette élection.
Sans parler des fédérations d’escrime, de gym, de football, de judo, d’athlétisme, de patinage artistique ou encore d’équitation, où les boules puantes, les dossiers, les coups bas en interne et autres défaillances systémiques se sont multipliés avant les JOP.
Avec quel budget ?
C’est LA question à 1 milliard d’euros (voire un peu moins) : avec quels moyens le sport français pourra-t-il continuer d’agir ? Le Premier ministre Michel Barnier l’a annoncé : des économies vont devoir être opérées à tous les étages de l’Etat. En vue des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris, le budget avait été revu à la hausse avec 1,02 milliard d’euros, dont 889 millions pour le seul volet sport, hors crédits consacrés aux JOP.
Selon le président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, Éric Coquerel (LFI), l’enveloppe budgétaire pour 2025 serait en baisse de 200 millions d’euros. Une sacrée coupe sombre qui devrait mettre en difficulté plusieurs fédérations, déjà aux abois sur le plan financier. C’est dans ce contexte de rigueur budgétaire que le sport français va devoir travailler, une fois que les nouveaux attelages fédéraux seront en place.