Né en 1999 au Burkina Faso, Alban Lafont est l’une des révélations de la Ligue 1 ces derniers mois. Lancé dans le grand bain en pleine opération maintien la saison dernière, l’actuel gardien du Toulouse FC poursuit son apprentissage au plus haut niveau. Portrait d’un jeune surdoué…
« Être son premier coach, c’est une fierté énorme. Je le dis à tout le monde. Alban est humainement formidable. Il est resté le même : quand on s’appelle, il est exactement comme avant. C’est quelqu’un de bien, tout simplement ». Ces mots-là, ce sont ceux de Mohamed Kilali, le premier entraîneur d’Alban Lafont à l’AS Lattes. À seulement 18 ans, celui qui est devenu l’un des plus grands espoirs français au poste de gardien de but totalise déjà près d’une soixantaine de matchs en Ligue 1. Un total impressionnant qui laisse augurer d’une belle et longue carrière. Pourtant, et c’est ce qui rend son parcours encore plus atypique, rien ne prédestinait ce grand bonhomme d’1m93 à un tel destin. « Au début, Alban jouait milieu de terrain. Il avait des qualités énormes, notamment physiquement. Un jour, on est allé faire un tournoi à Rhône-Vallées et nous n’avions pas de gardien. Alban m’a demandé de le remplacer et il a été excellent, il a notamment arrêté deux penaltys. En fin de saison, il a dit à son père qu’il voulait rester à ce poste. On l’y a mis, et il a pris la place du gardien titulaire », explique le formateur héraultais. Si ce cas n’est pas unique, il n’en demeure pas moins très rare dans le monde du football et de la formation. Aujourd’hui, une grande majorité des jeunes joueurs se fixe dès les premières catégories à un poste, pour ne plus jamais le quitter. Et, pourtant, malgré ce parcours bien particulier, Alban Lafont a immédiatement impressionné ses éducateurs. Rémy Loret, directeur du centre de formation du TFC, se souvient. « Très tôt, on a vu que c’était un garçon avec un fort potentiel athlétique et de grosses qualités techniques au poste de gardien de but. Et puis, il a franchi rapidement les paliers. Il a très vite eu cette capacité à faire des matchs de très haut niveau. Je me souviens notamment d’une rencontre face à Marseille en U17 où il avait été exceptionnel. »
Une maturité déjà impressionnante…
Si ce parcours sort bien évidemment de l’ordinaire, il serait injuste de ne pas parler du sérieux et du professionnalisme du Burkinabé de naissance. Bien que très talentueux, Alban Lafont s’est donné les moyens de briller, dans les catégories de jeunes à Lattes et Palavas, puis au Pôle Espoir de Castelmaurou. Une volonté de réussir qui lui a été transmise par ses proches, dont le soutien a été essentiel. « Alban est un très gros bosseur. Il a toujours été très sérieux et respectueux. Il tient ce trait de caractère de ses proches, qui l’ont très bien éduqué », rappelle son premier entraîneur, rejoint sur ce point par Rémy Loret. « Son entourage est très équilibré. S’il est aussi mature et autonome, c’est aussi grâce à cela. Quand on est un jeune joueur, il est important d’avoir des proches capables d’apaiser, de soutenir et d’amener de la confiance. » Des valeurs et un soutien qui ont très certainement pesé dans sa progression. Car, au-delà de qualités techniques évidentes, c’est grâce à un mental incroyable qu’Alban Lafont s’est fait remarquer. En devenant le plus jeune gardien titulaire de l’histoire de la Ligue 1 à 16 ans et 309 jours, l’international français des moins de 20 ans a dû faire preuve d’une sacrée force psychologique. « On connaissait déjà ses capacités techniques, mais c’est clair qu’il m’a surpris dans sa gestion mentale. On l’a beaucoup accompagné au départ ; c’était important de passer du temps avec lui. Petit à petit, il a pris de la confiance pour devenir le gardien qu’il est. Et puis, Pascal (Dupraz) est quelqu’un de très investi dans la relation avec ses joueurs. Avec Alban, qui est encore très jeune, c’est certainement encore plus fort », raconte Rémy Loret, dont les bénéfices pour le centre sont évidemment très importants. « Alban était à Lattes, ce qui renforce l’identité régionale de notre formation. C’est une vraie valorisation du travail des éducateurs, c’est évident. Il faut également rendre hommage à Dominique Arribagé de l’avoir lancé, et à Pascal Dupraz de l’avoir confirmé », conclut le directeur de la formation toulousaine. À seulement 18 ans, Alban Lafont est aujourd’hui observé par de nombreux clubs européens. S’il garde la tête sur les épaules et qu’il poursuit tranquillement sa progression, il y a fort à parier que le portier toulousain sera l’un des futurs grands gardiens français. À lui de jouer pour continuer à voir la vie en rose…
————————————-
L’œil d’Élie Baup :
Aujourd’hui consultant sur BeIN Sports, Elie Baup a débuté le football au poste de gardien de but. Pour SPORTMAG, l’ancien entraîneur de l’ASSE, de l’OM, ou encore du TFC, est revenu sur la fulgurante ascension d’Alban Lafont…
Elie, à seulement 18 ans, que vous inspire Alban Lafont ?
Quand il a commencé à jouer sous les ordres de Dominique Arribagé puis, quand Pascal Dupraz l’a maintenu, on ne savait pas trop où l’on allait. Match après match, il a montré toutes ses qualités et son autorité. Il a rapidement fait preuve d’une présence impressionnante pour son âge, même
s’il a encore beaucoup à apprendre techniquement. Mais la manière avec laquelle il a démarré et fait en sorte de rassurer ses partenaires est clairement incroyable. Son mental, son caractère, sa maturité et sa présence me semblent assez exceptionnels.
Avez-vous déjà vu un tel surdoué ?
Oui, j’ai la chance d’avoir formé Fabien Barthez. Je me suis occupé de lui de 14 à 19 ans ; il avait une technique différente, mais un caractère et une autorité assez proches. Et après il est devenu champion du Monde ! Le contexte est bien évidemment différent, et puis Alban est tellement grand qu’il va devoir progresser au niveau des appuis et de la technique.
Mais, naturellement, il dégage quelque chose d’assez similaire. Jusqu’où le voyez-vous aller ?
Il a le potentiel pour aller très loin. Il a la taille, la qualité au pied et le sang-froid pour devenir un très grand gardien. Il lui reste encore du travail, mais il a déjà beaucoup progressé, et il va continuer en jouant d’autres compétitions. Mais, en tout cas, il est clair qu’Alban peut avoir un avenir assez incroyable. Après, il va falloir qu’il garde les pieds sur terre. Mais, pour avoir un peu discuté avec lui, j’ai la sensation qu’il est très posé, très mature et très calme. Tout va s’enchaîner, mais je pense qu’il aura la maturité pour avoir un grand avenir.
Par Bérenger Tournier