L’ultra-trailer Alexandre Boucheix, alias Casquette Verte, a couru 100 km aux abords de la pelouse du Parc des Princes. Il revient sur ce moment privilégié.
Comment est venue l’idée de courir 100 km aux abords de la pelouse du Parc des Princes ?
Cette idée est venue avec quelqu’un qui est devenu un pote, qui s’appelle Antoine (Le Sech), qui travaille au Paris Saint-Germain, qui est dans les équipes vidéo et audio. Cette personne qui fait du trail s’est retrouvée à me filmer et à me suivre sur la Lyon-Sainté-Lyon, une course que j’ai fait en décembre dernier, que j’ai gagné et il a fait un documentaire là-dessus, qu’on a mis en ligne, qui a cartonné. Il est dans le projet de course que lance le Paris-Saint-Germain en juillet. Il m’a proposé que l’on fasse des trucs ensemble, ce que j’ai accepté. Et derrière, je lui ai dit : « Par contre, ça me fait chier de faire de la promotion pour la promotion. Donc à quitte à faire un truc, autant faire un truc drôle. »
Très souvent, les bonnes idées se créent en buvant des bières. Et là, c’est un peu ce qui s’est passé. On a commencé à réfléchir sur ce qu’on pouvait faire. Je lui ai confié : « Je peux tourner autour du terrain, je peux faire 10 000 mètres de dénivelé dans le Parc des Princes, je peux courir sur le toit. » On a exploré toutes les possibilités et on a monté ça en une semaine. On s’est décidé dimanche dernier et on s’est dit « Vas-y, on le fait ! » parce que j’avais de la dispo le week-end dernier et deux jours après, on s’est donné rendez-vous au Parc des Princes. On a fait la petite séquence vidéo avec le maillot floqué Casquette Verte dans les vestiaires. C’était super drôle puisque j’ai pu visiter le Parc et les vestiaires en mode solo. Après ça, on est allés voir si le tour du terrain était courable ? Oui. Est-ce les escaliers des virages Auteuil et Boulogne étaient courables ? Un petit peu moins. Quant au toit, la sécurité a considéré que c’était impossible. On a décrété rapidement sur un 100 km bord terrain. Il a fallu obtenir deux-trois autorisations administratives. Eux étaient ultra-chauds à l’idée de partir sur le 100 km et on a promis aux jardiniers du PSG de ne pas poser le moindre orteil sur la pelouse, qui est tout simplement magnifique. Après avoir eu les autorisations, c’était parti pour un 100 bornes autour du terrain. Ça n’a pas été une opé marketing ou com’, je tiens à le préciser, ça part d’un délire entre deux potes, l’un qui bosse au PSG et l’autre qui pratique de l’ultra-trail. On a mêlé ces deux trucs pour en faire un petit kiff. Surtout moi. Pour mon pote, ça lui permet de continuer à développer son projet, de faire parler de sa course, sans que moi ça fasse trop le côté publicitaire, marchandage et commercial. J’ai demandé 0 €, je n’ai pas été rémunéré. Ils m’ont offert le maillot Casquette Verte.
Vous êtes supporter du PSG. Qu’est-ce que vous avez ressenti lorsque vous fouliez la pelouse du Parc samedi dernier, là où jouent habituellement Mbappé, Messi, Neymar and co ?
J’ai toujours connu le Parc en tant que supporter, que ce soit en virage côté Auteuil et pour d’autres matchs placés ailleurs. J’ai toujours connu avec une ambiance de dingue. Pour moi, c’est un lieu où le bruit de la foule est aussi important que le lieu. Et donc ça m’a fait très bizarre quand je suis rentré sur le Parc des Princes la première fois le mardi soir quand on l’a visité, ou pendant toute la course le samedi. En fait, j’avais comme un bruit sourd, un bruit fantôme dans les oreilles des “Allez Paris !” de Boulogne et de Auteuil qui se répondent et des chants de supporters, les jeux de lumières, et cetera. Et c’est drôle parce que, en fait, c’est exactement comme quand tu montes sur un escalator qui ne marche pas avec une espèce de réflexe chelou. Ils sont là, ces souvenirs dans ma tête, alors qu’ils ne sont pas là en vrai. Donc c’était super drôle comme sensation. Après, moi, je suis habitué à faire des ultras. J’en cours un par mois. Les ultras auxquels je participe tournent autour des 170 bornes avec 10 000 mètres de dénivelé dans des terrains techniques en montagne, avec des météo qui sont parfois très capricieuses, voire un peu violentes.
« Une centaine de visiteurs a cru que j’étais un joueur du Parc »
Ce n’était pas trop compliqué de courir 100 km autour d’un terrain ?
Courir 100 bornes autour d’un terrain était plutôt un délire. Pour quelqu’un qui pratique l’ultra, c’est de l’habitude mais on peut dire que c’est peut-être une petite performance mentale. Mais sportivement parlant, ce n’est pas très compliqué quand on est habitué à faire des ultras de courir 100 bornes autour d’un terrain. Après, j’ai essayé de mettre un peu de rythme, mais c’est compliqué quand même de courir parce qu’il n’y a pas de piste d’athlé. Au Parc des Princes, c’était un peu à l’arrache que je courais, entre les panneaux publicitaires et le bord du terrain, c’était un peu chaud.
Avez-vous une anecdote à raconter lors de ce défi ?
Oui. Pendant que je réalisais le défi au Parc, qui est, me semble-t-il, le quatrième espace privé le plus visité de Paris, pendant toute la journée, il y a eu des milliers de personnes qui sont passées et qui ont vu un mec qui tournait autour du terrain avec un maillot du Paris Saint-Germain. Il y en a des centaines qui ont cru que j’étais un joueur. Je pense que de loin, de très loin, je dois ressembler à Messi parce qu’il a deux ou trois qui criaient et lorsqu’ils se sont rapprochés et m’ont vu, ils étaient un peu déçus.
« En courant, je repensais à des moments passés en virages avec des potes »
Vous avez parcouru 100km et 255 tours de stade. Comment vous êtes-vous senti à la fin ?
Etant donné que j’ai mis un peu de rythme, j’étais content quand ça s’est terminé. Courir pendant 7 h 50 avec les pauses avec un bon rythme, ça tape un peu. Ce n’était pas forcément agréable à courir parce que d’un côté, c’est une espèce de bitume dans les virages, ça va, mais sur le bord du terrain, il y a un côté où je courais sur le synthétique et tu t’enfonces dedans. Au niveau articulaire, c’est pas terrible, encore plus quand tu tournes dans un sens. J’ai couru 66 kilomètres dans le sens Borelli, Boulogne, Auteuil. J’avais mal à une hanche d’un côté et à un genou d’un autre, parce que les virages sont toujours les mêmes. La répétition du même mouvement devenait usante. J’étais content que ça s’arrête. Content de pouvoir me poser, m’allonger sur la pelouse et content de pouvoir boire une bière après dans un bar à côté. Le truc trop cool, c’est qu’Antoine m’a permis, avec une autre personne du stade, d’accéder au toit du Parc des Princes. On est monté sur le toit et on a immortalisé le moment avec une photo assez dingue. L’idée, c’est que ça a été un peu fait à l’arrache et c’est un kiff de môme de pouvoir fouler la pelouse du Parc quand t’es supporter du club depuis tout petit. Je me suis rappelé de la toute première fois où j’étais allé voir le match du PSG. J’étais allé voir un PSG-ESTAC avec mon papa. Il y avait 1-0 à la mi-temps pour Troyes et à la fin, il y avait 3-1 avec deux buts de Ronaldinho. Je me rappelais exactement là où j’étais assis. Donc à chaque tour, tu repenses à des moments passés en virages avec des potes à d’autres époques. Être au niveau du terrain et faire ça dans le Parc, c’est un délice. Même si moi j’adore les montagnes, c’est quand même un paysage particulier un stade de foot et le Parc des Princes, c’est particulièrement beau, donc un vrai délice.
Vous êtes habitué à courir sur des courses volumineuses et avec un certain dénivelé positif, j’imagine que tout ce plat a dû changer votre manière de vous préparer…
Je ne me suis pas du tout préparé à samedi dernier, mais je ne m’attendais pas à ce qu’il fasse aussi froid. Etant donné que je cours un ultra par mois et que je complète cela tous les jours avec deux à trois heures de running, courir est devenu mon quotidien. C’est devenu aussi normal que de dormir ou marcher ou respirer. C’est devenu une normalité pour moi. Donc tu me dis que cet aprèm ou demain, je dois courir un 100 kilomètres au stade Jean-Bouin, Roland-Garros ou n’importe où, il n’y a pas de soucis puisqu’il n’y a pas du tout de préparation particulière avec la course à pied, et c’est ce qui est cool. Deux week-ends plus tôt, j’ai gagné une course de 100 bornes avec 4000m de dénivelé dans le Jura, entre Bourg-en-Bresse et Oyonnax. Six jours après, je refaisais 100 bornes au Parc des Princes, un peu plus rapide, avec un peu moins de dénivelé, mais je n’ai pas besoin de préparation particulière pour ça car je connais mon corps et je l’ai bien huilé de manière à pouvoir me permettre de faire faire ça. Je pense que c’est aussi le cas pour des grands champions comme Mbappé ou Messi qui ne se préparent plus forcément comme avantn qui jouent X heures par jour au foot. On se prépare sans cesse pour être tout le temps prêt.
Serez-vous au départ de la We Run Paris dans les prochains mois ?
J’attends une confirmation mais il y a de grandes chances. Je pense que je vais y aller en courant depuis chez moi puisque je vis dans l’est de Paris. Je vais faire les dix kilomètres et je vais rentrer en courant. Je le vois plutôt comme un truc un peu fun à faire avec les gens, avec ton maillot de foot préféré qu’une compétition. Le dix kilomètres, pour moi, c’est plus du sprint, c’est de l’ultra ultra sprint. Je crois que de toute manière ils le font en mode connecté et je le ferai ainsi si je ne peux pas être sur place le jour J.