Dans le cadre du Festival des Arts Martiaux, qui aura lieu à l’Adidas Arena (Paris) le 22 mars, de nombreuses disciplines seront mises à l’honneur. Parmi elles, le grappling opérationnel adapté, remaniement du grappling sportif (techniques de contrôle, de projection et d’immobilisation d’un adversaire dans un combat debout ou au sol). Destinée aux forces de l’ordre, cette nouvelle discipline a été mise sur pied par Wendy Kohili, professionnel de ce milieu et ancien sportif de haut niveau. Il présente à SPORTMAG les spécificités de sa méthode en plein essor.
Qu’est-ce qui vous a donné l’idée de lancer le grappling opérationnel adapté ?
Je travaille dans le milieu des forces de l’ordre et je suis un ex-sportif de haut niveau. J’ai pratiqué le grappling sportif pendant de nombreuses années, j’ai été en équipe de France pendant presque 10 ans, et j’ai été médaillé aux Championnats de France et du monde. L’idée du grappling opérationnel adapté m’est venue il y a cinq ans, par l’utilisation que je faisais de mon expérience sportive sur le terrain, notamment au niveau des réflexes. Plusieurs collègues policiers ou gendarmes me demandaient des conseils, des petites astuces. J’ai donc voulu créer quelque chose d’accessible à toutes les unités, qui ne requiert pas un entraînement quotidien puisqu’elles ont déjà un entraînement intensif à fournir dans de nombreux domaines. Je devais en conséquence être tout de suite efficace, et leur inculquer rapidement des choses à restituer sur le terrain.
C’est ainsi que j’ai construit une méthode, que j’ai appelée grappling opérationnel adapté (ou seulement grappling opérationnel, pour simplifier). C’est du grappling sportif, détourné et adapté au milieu opérationnel pour convenir aux forces de l’ordre sur le terrain.
En quoi cela consiste précisément ?
Le grappling opérationnel adapté est en tous points tiré du grappling sportif. Je n’ai rien inventé, j’ai juste hiérarchisé et adapté certaines méthodes, d’où l’appellation. J’ai adapté tout ce que je connaissais dans le milieu sportif à l’utilité du terrain, aux petites subtilités. J’ai aussi retiré certaines choses, qui ne sont pas utiles et qu’on ne peut pas appliquer dans le milieu opérationnel. Par exemple, il est proscrit sur le terrain d’étrangler des personnes pour les interpeller. J’ai enlevé toutes les techniques de “soumission” que l’on retrouve dans le grappling sportif. En fin de compte, j’ai essentiellement gardé des grands principes fondamentaux : maîtriser la ligne d’épaule, maîtriser la ligne de hanche, injecter du poids de corps dans le mur…
En résumé, l’objectif du grappling opérationnel est de rentrer au contact d’un individu et le maîtriser sans usage de frappe, que ce soit contre un appui vertical ou au sol, dans le respect du cadre légal français. L’une de ses particularités est qu’il se pratique en binôme, pour convenir au mieux aux besoins du terrain.
Quels sont les atouts de votre méthode pour les différentes forces de l’ordre ?
Ce sont des techniques qui sont simples et facilement applicables. Il n’y a pas besoin de 20 ans d’expérience, comme ce que j’ai dans le grappling sportif, pour pouvoir les appliquer. Elles sont efficaces, sans fioritures, et conviennent à tous les services, de la police municipale jusqu’à des unités spécialisées comme la BRI ou d’autres brigades pour lesquelles j’interviens.
Tous ces services ont le même tronc commun, auquel je rajoute une touche technique plus ou moins avancée, selon l’aguerrissement des fonctionnaires de police que j’ai en face de moi. J’ai aussi mis en place des modules de communication simples, ainsi que de la stratégie en binôme pour compléter la méthode.
Votre méthode est notamment utilisée à la BRI. Quelle est sa place par rapport aux autres méthodes que cette brigade utilise ?
En BRI, les réflexes de grappling sont sollicités au quotidien lorsque les policiers font des interpellations. Ils s’entraînent énormément sur plusieurs disciplines différentes, telles que le tir, la tactique, la stratégie… Au sein de ces entraînements, le grappling occupe une petite place mais se révèle très important dans leur métier. Quand les policiers viennent au contact d’un individu, ils ne peuvent pas se rater. Il faut le préserver, préserver l’équipage, et être le plus efficace possible, ce qui est la priorité. Le tout en agissant dans le cadre légal qui est imposé. Donc le fait d’avoir des réflexes de travail en binôme et en équipe, sur toutes les interventions, leur sert quasiment au quotidien. C’est pour cela qu’ils ont fait appel à moi, tout comme d’autres services de police.
Le grappling opérationnel est donc accessible à toutes les unités ?
Il est accessible à toutes les unités de police, de gendarmerie, ainsi qu’à toutes les forces de l’ordre et de sécurité intérieure en général. J’ai personnellement plus d’affinité avec certains groupes spécialisés, mais la méthode reste accessible à tous.
On organise quatre fois par an des stages qui sont ouverts à tous les fonctionnaires de police. De plus, et c’est l’essentiel de notre activité, on se déplace directement dans les différents services. Partout en France, ainsi que dans les pays limitrophes : on a été sollicités au Luxembourg, en Suisse, en Belgique, à Monaco… On se déplace partout où il y a des besoins.
Vous serez présents au Festival des Arts Martiaux ce weekend. Quel sera votre programme ?
On fera une démonstration de grappling opérationnel sur le tapis du Festival. Elle se traduira par des interpellations contre un appui, comme une voiture par exemple, ou au sol. Ça sera une démonstration assez fluide et assez visuelle.
La BRI viendra également nous prêter main forte, avec une petite surprise que je ne peux pas révéler pour le moment. Elle nous aidera ou on les aidera, selon le point de vue, sur une interpellation. L’objectif sera d’interpeller des trafiquants d’armes présents au Festival.
Ce sera en tout cas une belle opportunité, je suis très heureux d’avoir été sollicité pour participer au Festival des Arts Martiaux. Je remercie également Karaté Bushido, qui a fait le nécessaire pour que la BRI vienne nous accompagner. On va essayer de participer à un beau spectacle !
Quelles sont les prochaines étapes pour le développement du grappling opérationnel ?
Bien que le grappling opérationnel prenne une proportion de plus en plus importante, mon but n’est pas de le développer, et ce n’est d’ailleurs pas mon activité principale. En revanche, je souhaite qu’il y ait le plus grand nombre possible de fonctionnaires de police, de gendarmerie et de forces de l’ordre qui aient accès à ma méthode. Les techniques enseignées actuellement dans les écoles sont un peu vieillissantes, et assez complexes. De plus, en face des forces de l’ordre, il y a aussi des gens qui s’entraînent. Il faut donc donner à chaque fonctionnaire de police un outil simple et efficace.
C’est pourquoi mon objectif premier est que le grappling opérationnel, ou même tout autre sport de préhension opérationnelle, soit accessible au plus grand nombre, et enseigné dans de bonnes conditions. Pour donner une bonne image de la police, et pour que tous les fonctionnaires de police travaillent proprement et en sécurité.