La biathlète des Saisies (en Savoie), 24 ans, retourne ce week-end à Kontiolahti, en Finlande où débute la saison de Coupe du monde… là où elle avait remporté sa première victoire à ce niveau en mars, pour la dernière course de la saison avant le confinement. Nous l’avons appelée en début de semaine, quelques heures avant son départ avec l’équipe de France.
Julia, comment se présente cette saison de Coupe du monde ?
Plutôt bien d’autant que la préparation a été bonne et que la forme est là aussi. Après, le contexte est particulier, on doit s’adapter aux événements et aux normes sanitaires. On a eu un petit aperçu du protocole avec les courses d’été mais c’était en France, c’était moins strict. Là, on n’a pas vraiment le droit à l’erreur. Il faudra penser à ne pas sauter dans les bras des copains pour exprimer éventuellement notre joie !
Quel regard portez-vous sur la nouvelle formule avec un regroupement de plusieurs étapes sur les mêmes sites ?
Je trouve plutôt bon le choix de l’IBU (l’union internationale de biathlon) qui a réfléchi à la meilleure solution pour que tout le monde soit le plus safe possible avec moins de voyages, moins de temps passé dans les aéroports. Je me dis que je suis contente de faire partie de la famille du biathlon. Bon, il n’y aura pas d’étape au Grand-Bornand, on est forcément déçus, c’est dommage car c’est une belle étape. On est tristes de ne pas courir devant notre public et on est surtout tristes pour notre public. Mais quand la décision a été prise, la France était sur la liste rouge Covid, la décision est donc logique.
Sur une partie des étapes, les courses se dérouleront à huis clos. Est-ce déstabilisant ?
Ce n’est pas facile mais on a déjà terminé à huis clos la saison dernière et cela ne fait pas une grosse différence pour la course : il y a un point de départ et un point d’arrivée. C’est sûr qu’il n’y pas le partage, ce petit frisson qui fait que l’on se sent portés. Là, on est seuls face à nous-mêmes. Mais on s’habitue et franchement on préfère courir à huis clos que ne pas courir du tout. On s’entraîne toute l’année pour ça, pour la compétition, pour ressentir le plaisir du biathlon donc on relativise beaucoup. C’est temporaire et c’est pour mieux retrouver notre public.
Vous retournez dès la première étape en Finlande là ou vous avez gagné votre première course individuelle en mars dernier. Kontiolahti, c’est un endroit que vous aimez bien…
Oui… (elle se reprend) enfin, ce n’est pas forcément mon étape favorite. Et ce n’est pas parce que ça s’est bien passé l’an dernier que je vais gagner de nouveau et que tout va se faire tout seul. Les filles (les concurrentes) ont gagné un peu partout. Il faut se relancer et faire posément ce qui a été travaillé, que ce soit à « Kontio », en Italie, ou ailleurs. Partout, il faudra se battre pour accrocher un podium.
Quel souvenir gardez-vous particulièrement de cette victoire ?
Je me souviens que cela a été une course très bien construite. Je pars de loin (11e au départ après l’épreuve de sprint) et je parviens à revenir à l’avant de la course. A ce moment-là, je gère balle par balle, concentrée sur chaque balle et le dernier tir, sur lequel je réalise un sans-faute (5 sur 5), m’a propulsée devant. J’ai pu aussi compter sur ma détermination, je savais ce que j’avais à faire pour aller chercher cette première place sur la ligne d’arrivée.
Cela vous a donné des idées et des envies pour cette nouvelle saison ? Quels sont vos objectifs ?
J’ai forcément envie de remonter sur le podium, mais c’est facile à dire. Surtout, je n’ai pas envie de me mettre de la pression en disant que je veux gagner. Je ne veux pas me fixer des objectifs de résultats car cela suscite forcément de l’attente, parfois trop, et je risque d’être déçue si ça ne se réalise pas comme je l’avais espéré. Mes objectifs, ce sont avant tout des objectifs de travail, sur la manière dont je construis mes courses, sur mon envie de bien faire en compétition. Je pars sur « Kontio » avec ces objectifs, et si je valide ces petites cases, ce sera tout bénéfique pour la suite de la saison et les résultats viendront tout seuls.
On a vu cet été, notamment lors du Summer Tour que le tir joue une importance considérable sur les performances…
C’est sûr ! (elle marque un temps de pause). Un biathlète, c’est un bon skieur et très bon tireur. Il doit skier vite et bien tirer. Si seul le ski va bien, on ne s’en sort pas. Il y a des jours où on ressent plus de fragilité sur les skis, d’autres où on a plus de mal avec la carabine. Le tout est de trouver un équilibre. C’est difficile de savoir comment on va se comporter en termes de tir. Il y a des jours où on a les jambes lourdes, c’est pareil derrière la carabine, on ne sait jamais à l’avance. Ça ne décrit pas, ça ne s’explique pas. C’est un réel recommencement, un combat de chaque seconde. Il ne faut rien laisser au hasard et être présente sur chaque balle.
Portez-vous aussi vos ambitions sur les championnats du monde (en mars à Pokljuka) où vous êtes passée à côté l’an dernier ?
Cela n’avait pas été facile mais il n’y avait pas tout à jeter. Ces Mondiaux m’avait permis de construire pour plus tard. Même si je n’avais pas gagné, j’avais pu en tirer des bénéfices. J’ai appris à gérer pour me relancer derrière. C’est cette expérience des Mondiaux qui m’a peut-être permise de mieux gérer l’événement et de gagner un mois plus tard à « Kontio ».
Les Mondiaux de 2024 et 2025 viennent d’être désignés mais la France ne postule toujours pas à l’organisation de cette épreuve…
Oui mais ce que je retiens, c’est que ce sont de très beaux stades qui ont été choisis. L’ambiance l’an dernier à Nove Mesto (qui organisera les Mondiaux en 2024) était phénoménale. Je serai aussi très contente d’aller en Suisse pour inaugurer le stade de Lenzerheide. C’est génial, on aura peut-être l’occasion de croiser Roger Federer (sourire). Il a mis un petit mot sur les réseaux sociaux comme quoi il y sera. Je suis pas mal le tennis et il fait partie des sportifs que j’apprécie. Il paraît simple et humble, il représente la classe, tout simplement.
Qu’avez-vous particulièrement travaillé pendant la préparation ?
Sans rentrer dans les détails techniques, j’ai surtout essayé au niveau de mon tir de trouver beaucoup plus de calme derrière la carabine, de prendre le temps de tirer. Sur le plan physique, j’ai suivi la même trame que d’habitude. Maintenant, il faut réussir à tenir toute la saison. J’ai vraiment à cœur d’être régulière toute la saison.