Sacré champion de France junior il y a moins d’un mois, Pierre Geisse a accepté de revenir pour SPORTMAG sur sa dernière saison en junior.
“Pierre Geisse, 18 ans”, est un des espoirs du BMX français. Surclassé en U23 cette saison, il est actuellement sixième au classement coupe du monde. Sans pression, il prend les défis les un après les autres avec le calme des plus grands, et l’envie toujours plus grande d’apprendre.
Tu as commencé le BMX avec ton frère jumeau. Comment as- tu découvert ce sport et qu’est-ce qui t’a plu ?
On a commencé grâce à la journée des associations. On est allé faire un test, on avait 4 ans. Et depuis, on n’a jamais arrêté. On était un peu casse-cous tous les deux. Le BMX c’est un sport qui procure une certaine adrénaline, qui est assez technique et peu commun.
Tu es le seul à avoir continué sur le chemin du haut niveau ?
Oui, lui, il est beaucoup plus dans le fun et le freeride du vélo. Il préfère garder cela comme loisir, même si aujourd’hui, il en fait peu. Comme un jeune normal, il passe plus de temps à l’école que sur son vélo. Mais on continue à en faire ensemble quand on se retrouve.
Comment voit-il ton parcours et ta réussite ?
Quand je suis monté à Saint-Quentin-en-Yvelines et que je lui ai dit que j’allais faire mon bac en deux ans, il pensait que j’étais un branquignol (rires). Il m’a dit “Tu as le temps de faire les deux”, après quand il est venu s’entraîner avec moi, il a compris qu’il n’y avait pas vraiment le temps pour faire les deux. Je pense qu’il est fier, un peu. Mais bon, il n’exprime pas trop ses émotions donc on ne parle pas trop de ça.
Tu as dit qu’il était un “jeune normal”. Quelles seraient les différences avec ta vie ?
Je ne vais pas forcément au lycée comme tout le monde. Après le lycée, je n’ai pas deux heures pour faire mes devoirs. Le week-end, je suis rarement chez moi pour voir mes copains. On va dire, du mois de mars au 1er aout, on est tous les week-ends sur la route, dans d’autres pays, je trouve que c’est un peu atypique.
Pour rentrer au pôle olympique de Saint-Quentin-en-Yvelines, j’étais obligé de faire mon bac en deux ans, pour permettre de faire plus d’entraînements à côté. Je viens de finir ma première année de terminale. J’ai passé toutes les matières avec des gros coefficients, donc j’ai déjà mon bac.
Tu es en équipe de France depuis un an. Comment as-tu vécu cette intégration ?
Oui, c’est ma première vraie saison en équipe de France, l’année dernière, j’avais juste fait les Championnats du monde. Un peu comme une intégration, on va dire. Ça s’est très bien passé cette année. Tout le monde est très gentil, personne ne mord.
Dans une interview pour SPORTMAG, Sylvain André disait qu’il avait un rôle de grand-père dans cette équipe de France. Est-ce que c’est le cas ?
On peut voir ça comme ça… Oui, c’est un grand-père, ou un papa, je trouve qu’il représente bien ce rôle. J’apprends énormément d’athlètes comme eux (Sylvain André ou Joris Daudet, ndlr). C’est la meilleure source d’expérience.
Tu les regardais quand tu étais petit ?
Bien sûr ! Quand j’étais petit, je devais avoir 6, 8 ans, j’avais une petite photo de Sylvain dédicacée dans mon agenda. J’ai toujours regardé Sylvain et Joris. Et plus tard, Jérémy (Rencurel, ndlr), Romain Mayet, toute l’équipe de France finalement. Ce sont un peu mes sources d’inspiration et d’expérience. On apprend beaucoup en parlant ou en s’entraînant avec eux.
J’imagine que tu as dû avoir l’occasion de voir, de tester de nombreuses pistes. Quelle est ta préférée ?
La piste que je préfère à l’entraînement, mais qui n’est pas praticable en compétition, c’est Bourges. Il y a une sorte de complexe avec deux pistes très techniques en une. C’est une piste où l’on peut apprendre beaucoup, je trouve. Après sur le circuit coupe du monde, Papendal (Pays-Bas, ndlr) c’est mythique, j’adore y aller.
Quelle serait, pour toi, la course parfaite ?
Pour l’instant, la course parfaite, ça serait la finale des Championnats du monde. Je n’ai pas encore eu l’occasion de réussir cela. La course parfaite, ce serait de gagner à la fin. De n’importe quelle manière, ce serait beau. La meilleure, ça serait un peu comme Léo a fait (la finale U23 remportée par Léo Garoyan aux championnats du monde, ndlr), c’est-à-dire partir deuxième, doubler, et montrer que sur la piste, c’est toi le plus rapide.
Qu’est-ce que le BMX t’apporte ? Pourquoi sacrifier cette vie “normale” pour le BMX, et les quelques moment de bonheur après des victoires ?
Je pense que ça me fait déjà grandir personnellement. Quand je vois tout ce qu’on voyage, tout ce qu’on apprend à faire. Depuis que j’ai 15 ans, je ne vis plus chez moi, j’ai dû apprendre à vivre tout seul, à me gérer tout seul. J’ai appris à prendre le train, à faire mes machines, à faire les courses (rires) ! C’est une super école de la vie je trouve, pas forcément le BMX, mais tout ce que ça m’apporte autour. J’apprends énormément, et j’aime apprendre. Et puis j’aime le BMX ! J’aime rouler, j’aime m’entraîner, progresser, voir qu’il y a des résultats. À cette époque de l’année, les moments de bonheur, ce sont les victoires. Mais l’hiver, j’essaie de me satisfaire d’un meilleur chrono, d’un passage de bosse plus technique.
Tu clôtures ta saison avec ces Championnats du monde, quel bilan fais-tu de cette première année en équipe de France ?
Personnellement, j’ai l’impression d’avoir pris trois ans d’expérience en un an. Sur le plan sportif, j’ai énormément progressé. Même si, sur les résultats des Championnats du monde, j’ai gagné seulement une place. Mais physiquement, j’ai évolué, j’ai pris énormément en accélération donc ça change un peu mes formats de courses. Mais là où j’ai le plus évolué, c’est sur le plan technique et mental. Mentalement, je me connais beaucoup plus et techniquement, je fais dix fois moins d’erreurs, j’arrive à faire des tours à 95% reproductibles.
L’année prochaine, tu passes en élite. Tu as beaucoup parlé de l’importance de réussir cette montée. Pourtant, cette année, tu étais surclassé en Coupe de France, on dirait que tu l’as déjà réussi cette montée.
Ma montée, on va dire que je l’ai faite en deux fois. Mais il y a encore un écart entre les deux niveaux, surtout concernant la différence physique et de puissance. Maintenant que j’ai vu ce que c’était, je sais ce qu’il faut faire pour être meilleur. J’aimerais que, quand on voit mon nom sur la feuille de race, on ne se dise pas “C’est bon, c’est un petit, ça va être facile”.
On est obligé d’en parler, Paris 2024, tu y penses ? Si tu n’es pas sur la piste, où vivras-tu ces Jeux ?
Je vais essayer de les supporter au mieux, et d’apprendre le plus possible de ce que mes camarades vont vivre. Sportivement parlant, je ne vais pas y être, mais je serai surement dans les gradins pour les encourager au mieux et prendre du plaisir.
Solenn Ravenel
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