Médaillé lors des Mondiaux en France en 2002 et 2013, Clavel Kayitare est l’un des piliers de l’équipe de France de para-athlétisme. A l’approche des championnats du monde de Paris, il se confie sur sa préparation, sa carrière… et sa retraite.
Clavel, comment allez-vous ? Où en êtes-vous dans cette saison 2023 particulièrement importante ?
Dès ce mercredi je pars en Suisse pour une compétition, je suis à la recherche des minima, que je n’ai toujours pas. Je me suis blessé il y a quinze jours, donc c’est un peu compliqué. Cette année, la préparation est un peu compliquée pour moi, notamment en termes d’infrastructures. Dans la région dans laquelle je suis, nous ne sommes plus vraiment suivis en tant que sportifs de haut niveau. Donc c’est un peu difficile.
Malgré ces difficultés, dans quel état d’esprit abordez-vous les semaines qui arrivent, et plus précisément ces Mondiaux à Paris ?
Pour un sportif de haut niveau, l’ambition est toujours d’être le mieux classé possible. Pour ma part, pourquoi pas un podium ? Si je participe à ces championnats du monde, je touche du bois, ce sera mon objectif. J’ai participé aux deux précédents Mondiaux en France. J’ai pris l’argent en 2002 et le bronze en 2013. Je suis toujours arrivé à me sublimer à domicile, c’est un vrai honneur de courir à la maison. En plus, je suis originaire de la région parisienne, donc c’est encore plus d’émotion et d’attente.
De l’émotion et de l’attente, y compris en vue de Paris 2024… les Mondiaux sont-ils une étape pour vous ?
Ces championnats du monde, c’est un grand test pour tout le monde, pas uniquement pour les sportifs. Pour vous aussi, les journalistes ! Vous apprenez à nous connaître, à parler de nous, et ça c’est important pour le grand public qui ne nous connaît pas assez. Ces Mondiaux, c’est aussi important qu’ils aient un écho particulier auprès des Parisiens. C’est la première fois qu’il y a des championnats du monde de para-athlétisme en région parisienne. Un an avant les Jeux, ce n’est pas rien, ça permet d’envoyer un message fort. C’est un challenge pour tout le monde.
« Quand le corps dit stop, on l’écoute »
Vous êtes un cadre de cette équipe de France, êtes-vous enthousiaste vis-à-vis de la nouvelle génération qui émerge ?
Quand je suis arrivé en équipe de France, j’étais encadré par des anciens qui étaient là pour moi quand j’en avais besoin. J’étais entouré, et j’essaye de faire la même chose aujourd’hui avec les jeunes. Je veux transmettre ce que l’on m’a appris. J’espère que leur carrière sera aussi longue que la mienne. Ces jeunes ont besoin d’encadrement. Aujourd’hui, le quotidien d’un sportif de haut niveau peut être perturbé par plein de choses. Donner des conseils, partager mon expérience, c’est ce que j’essaye de faire.
Vous qui êtes sur le circuit depuis très longtemps, comment analysez-vous le développement du para-athlétisme, et du parasport dans son ensemble ?
Ça va dans le bon sens. Ça fait plus de 20 ans que je suis en équipe de France. Avant, les médias ne s’intéressaient pas à nos meetings, ni à nos championnats. Aujourd’hui, c’est le cas. Cela permet d’avoir plus de visibilité, d’avoir des partenaires qui s’intéressent au parasport. Tout cela, c’est grâce à Paris 2024. Mais j’espère sincèrement que ça ne va pas s’arrêter après Paris. Je souhaite que cette dynamique se poursuive jusqu’à Los Angeles et même au-delà.
Vous parliez de Paris 2024, est-ce le moment qui marquera la fin de votre carrière à haut niveau ?
Je pense que oui, je mettrai un terme à ma carrière après Paris 2024. C’est clair et net. Mon corps commence à souffrir après plus de 25 ans de carrière. Comment on dit, je vais raccrocher les pointes.
Malgré cette souffrance à l’entraînement et en compétition, le plaisir est-il toujours là ?
Tout à fait, je prends du plaisir. Le plaisir de courir, le plaisir de pratiquer ce sport est toujours là. Après, en termes de performance, plus les années avancent, plus on commence à diminuer. L’année prochaine, j’aurai 38 ans. A un moment donné, le corps dit stop, et quand c’est le cas, on l’écoute. Je n’ai pas envie de me retrouver à 60 ans en train de marcher comme pas possible, à avoir mal partout. Il faut savoir arrêter quand le moment est venu.
En regardant dans le rétroviseur, quel est le sentiment qui vous vient lorsque vous analysez votre carrière ?
Aujourd’hui, je peux dire que j’ai fait une belle carrière. C’est une expérience que je pourrai raconter à mon fils. C’est avant tout de la fierté que je ressens. Je suis fier d’avoir représenté mon pays et du chemin que j’ai parcouru. Après tout ce que j’ai pu vivre, dans mon enfance, dans ma vie, j’ai su me relever et courir.