Corentin Le Guen et ses proches ont créé le club de rugby fauteuil Les Black Chairs, à Nuits-Saint-Georges, entre Dijon et Beaune, il y a près de 10 ans. Le joueur de l’équipe de France revient sur son parcours.
Qu’est-ce qui vous a amené à créer le club de rugby fauteuil des Black Chairs ?
J’ai toujours été sportif. J’ai commencé le rugby à 8 ans et j’ai intégré le pôle espoir à Dijon en 2009. En octobre de cette même année, à 15 ans, j’ai eu mon accident qui m’a laissé tétraplégique. Pendant ma rééducation, je me suis un peu mis à la natation, mais j’ai découvert le rugby fauteuil grâce à Didier Retière, un ami de la famille qui était entraîneur adjoint du XV de France à l’époque. Il m’a mis en contact avec Adrien qui m’a fait découvrir la discipline et j’ai tout de suite accroché. Il n’y avait pas de club dans le secteur de Nuits-Saint-Georges alors avec mes proches et le Club Sportif Nuiton où j’étais licencié, nous avons fondé les Black Chairs. C’était un peu une obligation de créer cette section si je voulais jouer. J’avais 16 ans et je n’étais pas encore assez autonome pour m’éloigner de Nuits-Saint-Georges.
Où en est le club, dix ans plus tard ?
Nous comptons actuellement six joueurs, sachant que quatre sont alignés sur le terrain. Les Black Chairs ont déjà eu dix rugbymen, mais certains ont pris leur retraite. Ce n’est pas facile d’avoir des joueurs éligibles, les valides peuvent s’entraîner, mais pour participer au Championnat de France il faut être classé selon le système de la Fédération internationale de rugby fauteuil. C’est difficile de trouver ces personnes avec un handicap assez lourd car elles sortent peu ou vont dans des grandes villes plus accessibles. C’est aussi un combat pour financer une saison, acquérir des fauteuils qui coûte entre 5 000 et 8 000 euros. Ce n’est pas facile, mais on y arrive.
À 27 ans, vous êtes le président des Black Chairs, mais également joueur et entraîneur. Comment gérez-vous tout cela ?
Je suis entraîneur avec mon père Dominique. Cette triple casquette demande pas mal de boulot, mais c’est très intéressant, j’ai une vision de tous les côtés. J’organise des manches de tournois, les entraînements, même s’il n’y en a plus beaucoup en ce moment à cause de la Covid-19. En tant que coach, j’amène mon expérience du haut niveau aux joueurs. Je me suis correctement organisé et j’ai quand même un peu de temps personnel. Ce n’est que du bonheur.
Comment faites-vous la promotion du rugby fauteuil en Bourgogne-France-Comté ?
Il existe quatorze clubs en France, plus l’équipe nationale, mais les Black Chairs sont seuls dans la région. Nous essayons d’intervenir auprès des écoles et des entreprises, qui peuvent aider à financer la saison, mais surtout pour se faire connaître. Nous faisons parler de nous dans les médias, mais le manque de visibilité du handisport en général porte préjudice. Nous avons aussi des contacts après des centres de rééducation pour proposer le rugby fauteuil comme activité sportive.
Dans le même temps, poursuivez-vous votre carrière en équipe de France ?
Oui et nous avons obtenu la qualification pour les Jeux paralympiques de Tokyo en mars 2020 juste avant le confinement. L’objectif est de faire mieux qu’à Rio où on avait fini 7e, soit avant-dernier. On rêve d’une médaille, n’importe quelle couleur, même si l’or est le mieux. Finir dans les quatre premiers, c’est faisable, mais pas forcément possible. La participation de l’équipe de France de rugby fauteuil peut amener une visibilité plus importante pour aider les Black Chairs et ce sport en général.
Que retenez-vous des Jeux paralympiques de Rio en 2016 ?
C’était mes premiers Jeux et c’était vraiment magnifique. C’est la plus belle compétition pour un sportif de haut niveau. Participer aux Jeux paralympiques était mon objectif dès que j’ai commencé le rugby fauteuil. Être à Rio était un accomplissement. J’aborderais Tokyo assez sereinement, non plus avec le regard du petit nouveau, mais avec celui du compétiteur qui veut tout gagner.