Jonathan Bonnet : « Tout donner pour ne pas avoir de regrets »

Récompensé lors des Trophées Sport & Management 2019 dans la catégorie « meilleure reconversion professionnelle », Jonathan Bonnet raconte son parcours sportif et ses brillantes études de médecine.

 
Jonathan, quel est votre parcours sportif ?
J’ai grandi avec des parents sportifs, mon père était sportif et m’a fait découvrir un peu tous les sports : planche à voile, escalade, lui il fait du tennis et du trampoline. J’ai toujours adoré le sport en grandissant. J’ai commencé la boxe à 8 ans, et en même temps je faisais un peu de course à pied et du rugby. J’ai même gagné mes premières médailles lors des cross du collège, j’ai fini champion académique lors du cross des collèges en 5e. C’était une belle petite expérience. La boxe, j’ai donc commencé à 8 ans et j’y ai pris goût. Quand je voyais les grands champions à la télévision, je rêvais de porter un jour les couleurs de l’équipe de France, le maillot, le drapeau autour du cou. Ça m’a toujours fait rêver. A partir de là, j’ai tout fait pour arriver à accomplir ce rêve, je m’entraînais beaucoup. Il y a eu pas mal de sacrifices, mais finalement, derrière, il y a toutes ces expériences, tous ces souvenirs inoubliables. C’était vraiment magique. C’est dans les moments les plus durs qu’on retient les meilleurs souvenirs.
 
Quels ont été vos mentors ?
Celui qui a été le plus titré des sports pieds-poings, Kamel Chouaref, qui était champion quand je naissais, dans les années 90. C’était une belle machine, et j’adorais les boxeurs techniques, ceux qui faisaient une jolie boxe. Et c’était mon rêve de réussir à faire une jolie boxe comme eux. Il y avait Kamel Chouaref, Modibo Diarra, qui est un peu plus âgé que moi, et qui a une très jolie boxe, variée, avec des esquives, des enchaînements variés, des changements de rythme. J’ai vraiment pris exemple sur eux, je pouvais regarder des vidéos en boucle pour voir leurs enchaînements et essayer de les recopier à l’entraînement. Ça m’a fait progresser. Je me disais : ils ont réussi en faisant ça, pourquoi pas moi ?

« Je voulais faire comme Son Goku »

 
Pourquoi avoir choisi la boxe française plutôt que l’anglaise ?
Je viens de la campagne, mon père est boulanger. Je vivais avec des champs autour et il y avait une petite ville à côté où on enseignait la boxe française. J’ai regardé beaucoup de mangas, Dragon Ball Z, et je voulais faire comme Son Goku. Je suis allé tester le club à côté et j’ai tout de suite adoré, c’est un sport hyper complet, technique, physique, tout le monde peut en faire, et il y avait une super ambiance au club. J’ai grandi dans ce club et c’est comme une deuxième famille pour moi, je reste en relation avec mon coach et mes amis, qui sont comme une famille. J’ai grandi là, ça m’a appris toutes les valeurs, et j’ai des souvenirs inoubliables avec ce club.
 
Comment avez-vous fait pour concilier première année de médecine et sport de haut niveau ?
Je suis devenu un homme des cavernes pendant un certain temps. Je voulais être médecin depuis le collège, depuis les cours de dissection des petites souris. Après, c’est sûr que la première année de médecine a été très compliquée. La majorité des gens pensait que c’était impossible, car en première année on est censé passer notre temps à réviser. Je voyais qu’à côté de moi, les autres n’avaient plus de loisirs, de sport, de sorties. Mais je voulais continuer le sport, j’ai intégré le CREPS de Toulouse cette année-là, le Pôle France avec les entraîneurs nationaux. Avec médecine à côté, je savais que ça allait être difficile, mais j’avais envie de prouver que c’était possible. Je me levais à 6h du matin, je révisais toue la journée, et les seuls moments où je sortais de ma chambre, c’était pour aller m’entraîner et pour manger en 10 minutes. Il n’y avait rien d’autre à côté, pas de film le soir, et je finissais mes révisions à minuit. Ça a été une routine, et j’ai eu la chance d’avoir un frère avec moi pour me soutenir. Ça m’a tiré vers le haut, et même si c’était difficile, j’ai tout donné pour ne pas avoir de regrets. J’ai vécu au final une année fantastique : je suis allé boxer à la Réunion, en Serbie, en Italie, j’ai été champion du monde Junior, j’ai intégré l’équipe de France chez les Juniors, et j’ai réussi médecine. Petite anecdote qui a fait le tour des facultés, j’ai réussi médecine en ayant raté l’épreuve de physique, qui comptait pour 10% de la note, parce que je m’étais trompé d’horaire et qu’ils avaient fermé les portes. C’est un moment qui reste gravé : je commence à me garer sur le parking et je vois plein de voitures, je me dis que ce n’est pas normal. Je commence donc à courir vers l’amphithéâtre, et ils ont fermé les portes alors que je voyais tout le monde encore debout, ils n’avaient pas encore distribué les copies. Ils n’ont pas voulu que je rentre, ça a été très, très dur. Je me suis dit que ce serait pour l’année prochaine, mais que j’allais continuer à tout donner. Finalement, c’est passé, et j’ai fini 46e sur les 880 étudiants en médecine, avec la physique en moins.
 

 

« Le sport m’a vraiment construit »

 
Le mental de sportif a dû aider dans cette épreuve…
Ça a été très dur, un week-end de dépression intense. Mais c’est vrai qu’avec le sport, on apprend à se relever et à retourner au combat même quand c’est dur. Le sport m’a vraiment construit, ça fait de moi ce que je suis aujourd’hui.
 
Vos proches étaient-ils inquiets pour vous ?
Oui, il y a eu beaucoup d’inquiétude. Ils m’encourageaient, mais ils pensaient au fond d’eux que ce n’était plus possible, même mes entraîneurs pensaient que ce serait impossible. Quand j’ai vu que j’étais classé, c’était une sacrée joie. Je m’en souviens, je me suis allongé sur mon lit, j’avais fait champion du monde Junior, des voyages, des combats, et en plus je finis la première année bien classé, je me suis dit : ça y est, tu l’as fait !
 
Aujourd’hui, vous en êtes où ?
Je suis interne en néphrologie, qui fait partie du Top 6 des spécialités médicales. Je m’épanouis pleinement. Je fais toujours du sport, même si l’internat est très dur, avec des journées chargées. En plus, je fais un DIU supplémentaire en ligne, des cours pour avoir un diplôme interuniversitaire. Mais j’ai besoin de sport, d’adrénaline. Je me suis ouvert au vélo, je fais du cyclisme, et à l’escalade, qui est ma petite passion actuellement. Donc le soir, je finis l’internat, je prends mon vélo et je vais à la salle d’escalade pour faire 2 heures de sport et me défouler. Mais la boxe reste pour moi le sport qui m’a construit.

« J’ai envie d’essayer Ninja Warrior »

 
Pour vous, une journée à ne rien faire, c’est impossible ?
C’est effectivement très compliqué. Demandez à ma copine, elle ressent quand je ne fais pas de sport, et que je suis différent. Je me sens heureux quand j’ai une journée où j’ai ma petite dose de sport, même si ce n’est pas très long, 30 minutes, j’ai besoin de m’aérer, de me défouler. Avec le sport, on oublie tout, on vit le moment présent et on s’amuse. Je pense qu’il faut se fixer des objectifs à moyen et long termes pour toujours avoir envie d’avancer. C’est pour ça que je me suis mis à l’escalade, j’ai peut-être envie d’essayer Ninja Warrior, je m’entraîne bien. Même si c’est pour rigoler, c’est un petit objectif à court terme qui me construit et me pousse à progresser, à avancer. Dans la vie, c’est primordial pour moi.
 

Propos recueillis par Simon Bardet
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