Jonathan Hivernat : « J’ai rempli ma mission de capitaine »

Laurent Bagnis

Capitaine de l’équipe de France de rugby-fauteuil, Jonathan Hivernat a guidé les Bleus vers un deuxième titre de champion d’Europe. L’athlète de la Team SPORTMAG revient sur cette aventure hors du commun.

Jonathan, félicitations pour ce deuxième consécutif de champion d’Europe. Comment vous sentez-vous, quelques heures après ce sacre ?

J’ai encore du mal à réaliser qu’on a réussi une telle performance… c’est un truc de fou ! Nous avions un statut à défendre. Beaucoup ont sans doute pensé que ça relevait de l’exploit, mais depuis toujours, je crois en cette équipe, en ses valeurs et sa capacité à pouvoir performer au plus haut niveau. Sur ce championnat d’Europe, c’est une vraie performance de la part de l’ensemble du groupe qui a pleinement s’exprimer. Tous les joueurs ont pris part à cette performance et chacun a su puiser au fond de lui-même pour aller jusqu’au bout. Ce que je ressens c’est beaucoup de fierté et de chance d’avoir pu participer une nouvelle fois à cette aventure humaine dans un stade mythique, celui du Millenium de Cardiff. D’avoir eu ce cadre-là et cette considération des Britanniques pour le rugby-fauteuil, c’était très fort. D’avoir pu vivre ça avec toute la famille du rugby-fauteuil c’était incroyable. J’ai même l’impression que ça a dépassé les frontières de notre sport, beaucoup de gens ont vu cette performance que l’on a réalisé.

« Je ne sais pas encore jusqu’où je pourrai encore donner et apporter »

Par rapport à l’année dernière, on a senti beaucoup plus de force et de maîtrise de la part de cette équipe de France. Est-ce aussi votre sentiment ?

Ce qui est certain, c’est que l’on a soif de vouloir progresser et de s’armer le plus possible pour évoluer au plus haut niveau. C’est tout le groupe qui a progressé sportivement, mais aussi humainement. Il y a toujours cette notion de travail qui est très importante. Rien n’est acquis, à aucun moment nous n’avons regardé le score. Chaque ballon était important, c’était cette façon de faire qui était essentielle pour servir au mieux le collectif. Cet élément-là a été décisif dans la performance que nous avons réalisé. Par rapport à l’année dernière, nous avons amélioré certains de nos défauts. L’objectif était de tendre vers une maîtrise encore plus grande sur le fond de jeu défensif et offensif, mais aussi sur l’état d’esprit conquérant qui caractérise bien cette équipe de France.

Sur un plan personnel, est-ce votre compétition la plus aboutie ?

Je ne sais pas encore jusqu’où je pourrai encore donner et apporter. Mais en tout cas, ce championnat d’Europe fait partie des compétitions de référence où j’ai donné le meilleur. Je me suis fixé une exigence encore personnelle encore plus forte pour être l’athlète le plus averti possible. Cela passe par la diététique afin d’être en mesure de pouvoir répéter les efforts, un indice de forme qui passe par la récupération, et une force psychologique qui permet d’entraîner toute l’équipe vers un même objectif. Aujourd’hui, je pense que j’ai rempli ma mission de capitaine. Il y a encore certains axes que je dois améliorer, mais sportivement et physiologiquement parlant, je suis très fier d’avoir amené cette équipe jusqu’au bout de ce tournoi.

« Je n’ai pas la garantie que notre budget va évoluer »

Désormais, place à la Coupe du Monde en octobre prochain…

Sur cette Coupe du Monde, on aura un statut à défendre et des attentes qui seront plus élevées. Pour la première fois, on a l’ambition affichée d’aller chercher une médaille, et pourquoi pas la plus belle, sur cette compétition-là. Le vrai objectif demeure de défendre le mieux possible les couleurs de la France et de les amener le plus haut possible sur cette Coupe du Monde. Il va y avoir un gros travail où il sera nécessaire d’analyser nos matches. Il y a certaines choses qu’il faut continuer à travailler. Ce qui va être prédominant à l’avenir, c’est d’être en capacité de s’améliorer et de gommer ce qui peut l’être.Il est nécessaire de progresser. Sur ce tournoi, les Anglais et les Danois étaient plus forts que lors de leurs précédentes compétitions, il fallait donc que l’on progresse nous aussi.

Ce deuxième titre européen peut-il faire bouger les choses pour une équipe de France qui manque encore cruellement de moyens ?

Je ne peux pas encore m’avancer pleinement sur cette question. Il y aura un bilan à faire prochainement. Mais ce qui est certain, c’est qu’il y a désormais une véritable considération de la part de notre fédération. Nous avons eu la chance de pouvoir intégrer le cercle de la performance, ce qui nous permet de nous préparer au mieux. En revanche, notre budget n’a pas évolué. Je n’ai pas de garantie que cela sera le cas après ce championnat d’Europe. On va être potentiellement obligés d’annuler certains stages que l’on avait prévu de faire, faute de moyens. C’est quelque chose qui m’embête beaucoup. On défend pleinement les couleurs de la France. Dans un an, cette équipe pourra prétendre à un titre paralympique et c’est donc fort dommage qu’elle ne bénéficie pas d’assez de moyens pour s’exprimer de la meilleure des façons. Pour être honnête, j’attends beaucoup de choses après ce résultat-là. J’espère que notre voix sera beaucoup plus entendue après ce second titre.

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