À partir du 27 octobre, Kito de Pavant fera partie des nombreux participants à la 14e édition de la Transat Jacques Vabre, qui s’élancera du Havre. Le skipper de 58 ans vise la gagne, lui qui marche désormais au plaisir sur des projets plus simples.
Avec quel sentiment abordez-vous votre dixième participation à la Transat Jacques Vabre ?
C’est vrai que je fais partie des meubles (rires). C’est un événement très spécial pour moi. Autant je ne sais pas ce que je ferai l’année prochaine, autant je sais que dans deux ans je participerai de nouveau à la Transat Jacques Vabre. J’apprécie le format, l’ambiance au Havre… il y a tout un ensemble de choses qui font que j’aime particulièrement prendre part à cet événement.
Qu’est-ce qui rend cette Transat Jacques Vabre particulière par rapport aux autres événements auxquels vous avez participé ?
C’est un événement un peu plus confidentiel par rapport à d’autres grandes courses comme le Vendée Globe ou la Route du Rhum par exemple. Et puis ça change, Le Havre est une destination un peu exotique pour moi qui suis méditerranéen (rires). L’ambiance lors de chaque édition est exceptionnelle. Le départ est chaleureux, nous sommes vraiment au contact du public. Après plus de vingt ans, je suis toujours séduit.
Vous êtes présents dans la catégorie Class40, c’est un nouveau défi…
Tout à fait ! J’ai participé à cette Transat en Multi50, très souvent en IMOCA, mais c’est ma première en Class40. C’est une classe dans laquelle je me retrouve complètement. Il y a de nombreux bateaux et des personnes qui ne se prennent pas trop au sérieux, nous sommes tous là avant tout pour le plaisir de naviguer. Les budgets sont moindres, mais le but reste tout de même d’offrir de belles batailles sur l’eau et de tracer une belle trajectoire sur l’Océan Atlantique. J’apprécie énormément la philosophie de cette classe. Nous avons un bateau qui nous appartient, baptisé Made in Midi. Je pense qu’il fait partie des bateaux qui vont compter sur cette Transat Jacques Vabre.
« Nous sommes là pour performer »
Est-ce une classe qui vous a demandé une adaptation importante, à la fois technique et physique ?
Toutes les séries et toutes les classes ont leurs spécificités, mais il est tout de même plus facile d’emprunter ce chemin, c’est-à-dire de passer d’un gros bateau à un plus petit. C’est moins physique, ce qui n’est pas négligeable quand on prend de l’âge comme moi, et cela me permet donc d’être plus performant concernant les autres paramètres de la régate, comme la stratégie par exemple. Les bateaux Class40 sont vraiment à échelle humaine et c’est quelque chose qui me plaît beaucoup.
Vous parliez de votre âge, cela vous pousse-t-il à vous ménager un peu plus sur des événements aussi exigeants ?
Je ne suis pas sûr de savoir me ménager (rires). J’ai même tendance à faire le contraire. Mais, il est vrai qu’avec l’âge, il est logique de souffrir de plus en plus physiquement. S’agissant de la Route du Rhum de l’an dernier par exemple, j’ai mis plusieurs mois à m’en remettre. En vieillissant, on récupère moins bien, mais heureusement il reste l’expérience. J’espère que ce paramètre précis fera la différence cette année sur la Transat Jacques Vabre.
Justement, abordez-vous cette Transat Jacques Vabre avec un objectif de résultat précis ?
On ne s’en cache pas, nous sommes là pour performer. Nous savons que nous avons un bon bateau qui peut nous permettre de viser la victoire. Même si une bonne dizaine d’équipages peut dire la même chose. Personnellement, la victoire est tout ce qu’il me manque sur cet événement. J’ai déjà fini deuxième à deux reprises. J’hérite souvent des places d’honneur, mais je ne gagne jamais. J’espère donc que cette année sera la bonne.
Cela a-t-il été facile d’attirer des partenaires autour de cette nouvelle aventure ?
Je pensais qu’avec des budgets plus faibles, comme on en trouve en Class40, il aurait été plus facile d’attirer des partenaires supplémentaires autour de cette aventure. Finalement, ce n’est pas du tout le cas. La Class40 ne fait pas partie de l’élite de la course au large, par exemple par rapport aux IMOCA qui vont participer au Vendée Globe dans un an. Cette élite se crée donc par rapport au bateau plus qu’au bonhomme et je trouve cela évidemment dommage. Mais c’est comme ça, nous pouvons tout de même compter sur plusieurs partenaires fidèles qui sont fiers de nous soutenir dans cette aventure.
Le Vendée Globe 2016, « un traumatisme que l’on garde longtemps »
Pour vous, participer à une épreuve comme le Vendée Globe l’an prochain est donc exclu ?
Clairement je n’y serai pas. Nous avions perdu le bateau sur la précédente édition (avarie dans l’océan indien lors de l’édition 2016, l’épave du bateau a finalement été retrouvée en juillet dernier, NDLR) et quelques années après, cela laisse encore des traces. On souffre toujours de cette grave avarie, c’est un traumatisme que l’on garde longtemps. Pour être sur la ligne de départ du Vendée Globe, c’est un véritable parcours du combattant. Le fait de ne pas avoir de bateau nous a mis en retard, nous empêchant ainsi de trouver des partenaires capables de réunir le budget suffisant. Après, il faut aussi avoir envie et peut-être que je n’avais pas suffisamment envie de mettre autant d’énergie concernant cette édition 2020.
Après cette avarie en 2016, l’idée de tout arrêter vous a-t-elle traversé l’esprit ?
Tout arrêter non, mais partir sur des projets plus simples c’est certain. Concernant le Vendée Globe, j’ai connu des échecs marquants en trois éditions, j’avais donc envie d’aborder des événements l’esprit un peu plus libéré. Je n’avais pas le courage de repartir sur un très grand événement et d’affronter un potentiel échec important. Je suis resté marqué par cela et cela m’a forcément un peu changé, poussé à me lancer dans des projets simples avec lesquels je prends énormément de plaisir.
Justement, après la Transat Jacques Vabre, quel sera votre prochain grand projet ?
Depuis plusieurs années, je travaille sur un projet d’expédition autour du monde. C’est un projet très ambitieux et complètement hors course. Le but est d’accompagner des missions scientifiques axées sur le thème du bonheur. C’est un mot qui ne veut absolument rien dire, en tout cas sur lequel nous n’avons pas réussi à mettre de vraie définition. Ce sera donc notre objectif : trouver ce qu’est le bonheur et comment ça marche, que ce soit au niveau humain, mais aussi de la faune et de la flore.
Plus d’informations sur www.madeinmidi.org.
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Transat Jacques Vabre : une édition 2019 record
C’est donc du Havre que s’élance, le 27 octobre, la 14e édition de la Transat Jacques Vabre. Jamais cet événement n’a rassemblé autant de participants : 67 équipages, et donc un total de 134 skippers, sont au départ, direction Salvador de Bahia au Brésil. Côté Class40, pas moins de 29 équipages se disputent la victoire. Kito de Pavant, associé à Achille Nebout à la barre de Made in Midi, fait partie des favoris. Le record de la Class40 date d’ailleurs de la précédente édition, avec une traversée en 17 jours 10 heures 44 minutes et 15 secondes pour Maxime Sorel et Antoine Carpentier. Objectif record pour Kito de Pavant ? Réponse au mois de novembre.
Plus d’informations sur www.transatjacquesvabre.org.