La savate forme : Une porte d’entrée pour la boxe française

À la frontière entre sport de combat et fitness, la savate forme s’installe depuis vingt ans dans le paysage de la boxe française, touchant un public diversifié. Une discipline qui s’inscrit dans l’orientation sport santé de la Fédération de savate boxe française.

 
Un tiers des clubs environ proposent aujourd’hui des cours collectifs de savate forme, qui développe endurance, vitesse, coordination, force et souplesse. Thierry Mardargent, le DTN de la Fédération, en précise la genèse : « Face au turnover des licenciés, deux anciens DTN, Bob Alix et Claude Valadier, ont développé cette approche à partir de 1998, avec plusieurs objectifs : attirer de nouvelles recrues, notamment féminines, fidéliser les pratiquants vieillissants en leur proposant une activité sans risques, et ne pas se laisser déborder par d’autres concepts similaires ». La savate forme, qui simule des assauts, a en effet des avatars dans les salles de fitness, sous le nom de « boxe power » ou « cardio combat ». Ce créneau fait également l’objet d’adaptation de la part de clubs de karaté ou de boxe anglaise.

La gestuelle traditionnelle de la savate

Philippe Suisse, secrétaire général de la Fédération et enseignant au club de Calais, décrit un cours : « Pendant un peu plus d’une heure, le moniteur déroule sur une musique rythmée une chorégraphie qui reprend la gestuelle traditionnelle de la savate. Les mouvements s’ajoutent les uns aux autres jusqu’à former une boucle de 8 mouvements que les élèves reprennent au fur et à mesure. Un cours comprend 4 boucles. On peut faire dix ans de cours avant d’épuiser toutes les possibilités ! En fonction du niveau des élèves, l’enseignant a la possibilité d’augmenter le nombre de temps : un fouetté sera ainsi réalisé en 1, 2 ou 4 temps. Pas besoin de matériel spécifique, ni gants ni chaussures de boxe. Une salle et une sono suffisent, même si l’utilisation d’accessoires (sacs de frappe, corde à sauter) apporte de la variété ». Cette discipline s’adapte aussi aux enfants, sur un format plus court. Philippe Suisse a déjà mené des initiations dans les collèges et les lycées, suscitant notamment l’intérêt des jeunes filles, ainsi qu’auprès du personnel de la municipalité.
Si la boxe souffre parfois de représentations négatives, le terme « savate forme » offre autre chose. À la fois ludique et technique, sans finalité compétitive, la savate forme apporte plaisir et bien-être, et va dans le sens des orientations de la Fédération sur le sport santé et la pratique loisir. Les pratiquants viennent se défouler, perdre du poids, dans une ambiance conviviale. Il s’agit de faire du sport sérieusement, mais en s’amusant. La savate forme permet la rencontre des boxeurs et non-boxeurs, de tous les âges. La majorité des pratiquants sont des néophytes qui ne veulent pas « prendre de coups ». Les pratiquants aguerris, quant à eux, viennent en cours pour travailler en « shadow » leurs gestes, leur rythme et leur rythme cardiaque. La rencontre nationale annuelle, l’« Open national », ne délivre pas de titres, mais permet à des équipes de clubs, masculines, féminines ou mixtes, de se rencontrer autour de chorégraphies, notées par un jury sur la synchronisation, l’originalité, l’occupation de l’espace…

Une pratique dans l’air du temps

« La savate forme constitue à la fois un levier de développement de la pratique et une porte d’entrée pour la dualité sans risque », explique Thierry Mardargent. Elle peut servir de passerelle et mener jusqu’à la compétition. Les effectifs en savate forme représentent environ 7 % du total des 56 246 licenciés, soit 4 015 personnes, sur la saison 2016-2017, mais ce chiffre est à pondérer, car certains clubs proposent l’activité sans la spécifier. Cette pratique dans l’air du temps attire beaucoup de femmes, qui ont longtemps représenté un tiers des licences, mais sont passées à 41 % depuis 4 ans. Elles représentent notamment 80 % des élèves des cours du club de Calais. « La savate aide les femmes à être plus sûres d’elles-mêmes et à prendre conscience de leur corps », assure le DTN. Venue par le bouche-à-oreille, Delphine, une jeune maman de 36 ans, suit des cours à Calais deux fois par semaine : « La savate forme est mon activité sportive principale. Un cours demande de l’endurance. Je donne tout, je me défoule sur la musique. Le professeur prend le temps d’expliquer les éléments techniques. Peut-être qu’un jour j’enfilerai des gants et que je me lancerai dans les assauts. Je parle partout autour de moi de la savate forme, j’ai fait venir des amis au cours. L’ambiance me plaît, tout le monde y trouve sa place, de 20 à 55 ans ».

La savate forme, une filière de formation

Ayant identifié une vraie demande pour cette pratique, la Fédération a créé une commission dédiée en son sein. Elle estime que la savate forme aurait sa place à l’UNSS et comme activité sportive en entreprise. Un CQP (Certificat de qualification professionnelle) savate forme est présent dans la filière de formation fédérale, à côté de 3 autres CQP et du Brevet professionnel. Le certificat, héritier du monitorat, permet d’enseigner la savate forme contre rémunération, à raison de 150 heures de formation. « La mise en situation de la savate forme est différente, mais la technique et la gestuelle sont identiques à la savate, donc elle ne se différencie pas vraiment », explique Thierry Mardargent. Il n’existe pas encore de Brevet professionnel savate forme, car il ne correspond pas pour le moment à un réel marché de l’emploi. La Fédération prépare, d’ici le mois de mars, une vidéo présentant en images la savate forme, ainsi que les autres disciplines associées de la boxe française. « C’est un nom compliqué pour le grand public. L’image est souvent plus marquante qu’un texte », commente le DTN. Elle sera diffusée sur les réseaux sociaux et auprès des clubs, qui auront donc cet outil à leur disposition, quand ils chercheront à recruter de nouveaux membres, lors de forums d’associations, par exemple.

La savate forme en chiffres :

4 015 licenciés savate forme pour la saison 2016-2017 sur 56 246 licenciés, soit environ 7%.
220 clubs sur 771 proposent l’activité, soit 29% environ.
170 animateurs titulaires du certificat de qualification professionnelle (CQP) savate forme.

Par Marianne Quiles

 

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