Le MMA sur la voie de la reconnaissance

Aug 31, 2019; Shenzhen, China; Damir Ismagulov (red gloves) and Thiago Moises (blue gloves) during UFC Fight Night at Shenzhen Universiade Sports Centre. Photo : David G. McIntyre / SUSA / Icon Sport

Ce n’est qu’en 2020 que le MMA sera officiellement reconnu comme une pratique sportive en France. Pourtant, les pratiquants sont déjà bien présents sur le territoire. Rencontres avec des passionnés dont Moïse Santamaria, acteur dans « Un si grand soleil ».

 
MMA. Trois lettres qui font parler du côté des sports de combat français. MMA, est l’acronyme de Mixed Martial Arts, soit arts martiaux mixtes en français. Le nom a été bien choisi, car la discipline emprunte leurs styles, leurs coups et leurs règles à de nombreux sports de combat. « Lorsque l’UFC (Ultimate Fighting Championship, la ligue américaine du MMA considérée comme la plus importante ligue mondiale, NDLR) a unifié les règles, le but était d’opposer différents styles de sports de combat. Chaque joueur défit son adversaire selon ces règles », raconte Antoine Simon, spécialiste et commentateur de la discipline sur la chaîne RMC Sport 4 (anciennement Sport Komba, NDLR). Pour faire simple, en phase debout, le MMA ressemble à la boxe thaï, tandis qu’au sol, il s’apparente au grappling. Un combattant remporte son match après un KO, une soumission ou un abandon de son adversaire, par décision de l’arbitre ou des juges au terme de la confrontation, souvent en trois rounds de 5 minutes.

« Le sport de combat le plus complet »

À l’écran, il est le capitaine de police Manu Léoni dans la série de France 2 « Un si grand soleil ». À la ville, Moïse Santamaria est un passionné de MMA qu’il pratique au club privé Dynamite Center à Jacou, près de Montpellier. « C’est le sport de combat qui me semble le plus complet, qui nous permet d’avoir le maximum d’outils à notre disposition », souligne-t-il. « Même en boxe thaï, que j’ai longtemps pratiquée, où il y a les coudes, les genoux, les poings et les pieds, on n’a pas la lutte, on n’a pas tout ce qui est soumission. J’avais déjà pratiqué avec des copains à Paris, mais c’est depuis que je suis venu dans les environs de Montpellier, il y a un peu plus d’un an, que je me suis vraiment plus entraîné au MMA, aux positions typiques de la lutte et du grappling. » Un acteur, mais aussi un avocat, un maçon, des étudiants…. Michel Garcia voit passer tous les profils dans sa salle Dynamite Center. « Je me suis intéressé de suite à l’UFC quand elle est arrivée en 1993. J’ai compris que c’était le sport de combat du futur », raconte celui qui avait déjà pratiqué le kung-fu, le taekwondo, la lutte, le kick-boxing, la boxe anglaise et le full contact avant sa majorité. Parti combattre aux États-Unis, au Canada ou encore au Japon et devenu champion d’Europe de free fight en 2006, Michel Garcia a pu s’imprégner de différentes ambiances pour monter seul son club privé et autonome en septembre 2010. Aujourd’hui, Dynamite Center compte 300 adhérents entre les cours de MMA et de boxe pieds-poings.

« Le sport le plus réglementé qui soit ! »

Malgré l’interdiction des compétitions, ce sport a trouvé sa place un peu partout en France. Le chiffre de 40 000 pratiquants a même été avancé. « Il n’y a qu’ici où on est un peu pudique, où on a eu du mal à le légaliser », regrette Moïse Santamaria. « Les gens ont eu les images de violence en tête », estime Antoine Simon, qui travaille dans le milieu du MMA depuis le début des années 2000. La vision des confrontations dans une cage et l’impression d’absence de règles ont contribué à cette réputation négative. « Il y a énormément de blessés au rugby et au foot et pourtant c’est totalement légal. La boxe anglaise est autorisée alors qu’il y a de sacrés coups dans la tronche et dans les organes », rappelle Moïse Santamaria. « Un combat de MMA, finalement, c’est très sécurisé. Dès qu’un adversaire est dans une position où il ne peut plus rien faire, l’arbitre arrête l’opposition. » « C’est violent, on ne va pas le nier, mais c’est le sport le plus réglementé qui soit ! », soutient Antoine Simon, qui cite plusieurs exemples : « Pas de morsure, pas de doigts dans les yeux… » Quant à la cage, « c’est la zone la plus sûre pour un sport où il y a beaucoup de projections. » Sans compétition, quel est l’intérêt de pratiquer ? « Moi, c’est pour l’entraînement ! », répond l’acteur d’« Un si grand soleil ». « J’ai fait des galas de kick-boxing dans ma vingtaine, mais à 40 ans, je ne cherche plus la compétition ; même si parfois dans mes rêves, je me demande pourquoi ne pas m’entraîner à fond pendant six mois pour aller me tamponner pour rigoler et vivre une expérience. Mais dans la réalité, ce n’est pas pour moi. J’aime aller à la salle, mettre les gants avec des copains et apprendre à me dépasser. Ça me donne une discipline de vie. »
 

 

« On est dans les starting-blocks »

La marginalisation de ce sport de combat touche à sa fin. En juin dernier, la ministre des Sports Roxana Maracineanu a lancé un appel aux fédérations nationales, afin que l’une d’elles héberge le MMA parmi ses disciplines. Six d’entre elles se sont positionnées et l’entité délégataire devrait être connue fin décembre. Le 1er janvier 2020, au plus tôt, le MMA sera officiellement reconnu en France comme une pratique sportive professionnelle et amateur par le ministère des Sports. « Pour les professionnels, ça va être plutôt pas mal », se réjouit Moïse Santamaria. « Les combattants vont pouvoir rester chez eux, au lieu de partir à l’étranger. Ça va peut-être développer la professionnalisation en France. On va pouvoir aller voir des combats à Bercy, dans les Palais des sports de toutes les villes. » « Nous, les anciens du MMA, sommes contents et dans les starting-blocks », ajoute Michel Garcia. « Je continuerai de préparer mes élèves pour les compétitions. C’est une belle avancée pour eux et pour nous en tant que coachs. On n’a plus besoin de prendre l’avion pour chaque compétition. » « À priori, il y aura des championnats de France qui feront mécaniquement augmenter le niveau et l’UFC pourrait organiser des événements en France », avance Antoine Simon, tout en pensant que cette légalisation attirera des sponsors auprès des combattants professionnels. Autre point positif à cette reconnaissance par le ministère des Sports, « le MMA bénéficiera d’une meilleure visibilité. Le savoir mieux structuré aidera à améliorer son image », souligne le journaliste. « Il ne va plus être regardé comme quelque chose d’ultra violent, d’illégal », abonde l’acteur. « On peut gagner des pratiquants chez les adolescents et les femmes. Les gens un peu réticents vont peut-être maintenant se dire que c’est faisable », projette le gérant. « Il est possible qu’on ait plus du monde au Dynamite Center, mais je ne pense pas qu’on sera inondé parce que ce n’est pas un sport facile. » À la salle héraultaise, les élèves attendent maintenant de pouvoir prendre leur licence. Reste à savoir auprès de quelle fédération.

L’arrivée d’une nouvelle génération

La France est à la traîne sur la scène mondiale. Avec le retard accumulé sur les autres pays où ce sport était autorisé depuis longtemps, la première génération de combattants n’a pas percé à l’international. Les fans se sont identifiés au Québécois francophone Georges St-Pierre. Après 2005, quelques Français ont commencé à se faire une place auprès de l’UFC : Cheick Kongo, qui évolue maintenant avec Bellator, la deuxième plus grande organisation mondiale de MMA, Cyrille Diabaté, qui a créé le club la Snake Team en Seine-Saint-Denis, ou encore Taylor Lapilus qui commente aussi les combats sur RMC Sport 4. Dans le sillage de Francis Ngannou, Camerounais arrivé en France en 2013, une nouvelle génération tricolore fait actuellement ses débuts avec l’UFC dont Ciryl Gane, Farès Ziam et Zarah Fairn, la première française à signer pour cette ligue. « Avec la légalisation du MMA en France, on peut s’attendre à voir l’UFC faire signer de plus en plus de Français », prédit Antoine Simon.

Le public au rendez-vous

Tous les fans de MMA ne sont pas forcément en salle ou dans la cage pour s’entraîner. Certains choisissent de suivre les compétions de l’UFC à la télévision. « Nous comptons 150 000 fans réguliers lors de la diffusion d’événements MMA », relate Antoine Simon. « Pour les plus gros événements avec de grandes stars comme Conor McGregor et Khabib Nurmagomedov, j’imagine que l’on pourrait atteindre les 400 000 spectateurs en France. »

L’interview de Moïse Santamaria en vidéo :


L’interview de Michel Garcia :

Par Leslie Mucret
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