Le sport se fait une place en milieu carcéral depuis plusieurs années. Il contribue à la prévention de la récidive et permet aux personnes détenues de s’intégrer dans un groupe et de respecter des règles, tout en favorisant l’adoption d’une hygiène de vie.
Au 1er décembre 2021, la France comptait 70 000 personnes écrouées et détenues. Un chiffre en hausse depuis plusieurs années, qui dépasse désormais la capacité carcérale des établissements pénitentiaires. Des personnes détenues qui représentent une population cumulant de nombreux facteurs de risques. Bien souvent, avant leur incarcération, elles sont confrontées à des situations de précarité et d’exclusion, entraînant un faible accès aux soins et à la prévention. L’alimentation et l’activité physique et sportive constituent ainsi des leviers importants pour préserver et améliorer la santé des personnes détenues. Depuis de nombreuses années, l’Administration Pénitentiaire et le ministère de la Justice ont fait du développement du sport, et notamment du sport santé, une priorité. Partout en France, avec le concours du monde sportif fédéral, des initiatives se sont ainsi développées. Depuis plusieurs années, l’administration pénitentiaire participe ainsi activement à « Sentez-Vous Sport », une opération nationale de promotion du sport pour tous, pilotée et coordonnée par le CNOSF (Comité national olympique et sportif français). Avec son Challenge National de l’Administration Pénitentiaire, la Fédération Française de Basket-Ball a également joué un rôle clé dans la promotion de l’activité physique et sportive auprès du public carcéral. Sans oublier un acteur comme la Fédération Française de Football qui, par l’intermédiaire des actions proposées par ses Ligues, a contribué à faire du football une activité essentielle dans les établissements pénitentiaires. Depuis de nombreuses années, la Fédération Française Sports pour Tous est également un acteur important sur cette thématique.
« Rendre la pratique physique et sportive accessible au plus grand nombre »
« Nous sommes une fédération multisports et notre objectif principal est de rendre accessible la pratique physique et sportive au plus grand nombre, explique Julien Bau, chargé de mission carcéral pour la Fédération Française Sports pour Tous et chargé de mission pour le Comité Régional Sports pour Tous Grand-Est. Le public carcéral s’est avéré être un public en marge avec des problématiques dans l’accès à l’activité physique. Nous avons donc utilisé l’activité physique comme un outil éducatif, de sensibilisation à la santé et de prévention. C’est donc logiquement que ce projet carcéral a vu le jour et s’est progressivement développé. » Dès 2004, la Fédération Française Sports pour Tous signait une convention avec l’Administration Pénitentiaire. « Nous avons ainsi développé des projets localement, dans les établissements pénitentiaires. Ce sont à la fois des projets très locaux qui dépendent des établissements et des publics concernés, mais aussi des projets nationaux dans l’accompagnement de l’Administration Pénitentiaire. Les liens avec l’Administration Pénitentiaire sont moins présents depuis quelques années. Depuis le début de l’année 2020, en raison de la pandémie de Covid-19, les projets en milieu carcéral ont été suspendus. Mais notre fédération est toujours impliquée, le public carcéral est toujours bien présent et a des besoins. Si demain, une opportunité se crée sur une maison d’arrêt ou un établissement pénitentiaire, nous serons là pour soutenir la mise en place d’actions. »
« Le besoin, l’envie et la motivation du public carcéral sont bien présents »
Au fil des années, la Fédération Française Sports pour Tous a su développer des actions et mettre en place des programmes qui fonctionnent. Dès son arrivée en milieu carcéral, un détenu a l’opportunité de bénéficier d’une évaluation de sa condition physique, puis d’avoir des orientations et préconisations vers un programme adapté. Il peut s’agir d’un programme axé sur la santé, dont l’objectif est de rendre accessible l’activité physique et sportive dans une logique de prévention santé, ou d’un programme axé sur le loisir, avec une activité physique et sportive qui est surtout là « pour répondre à un besoin d’occupation, souligne Julien Bau. Le besoin, l’envie et la motivation du public carcéral sont bien présents. Le sport en milieu carcéral revêt un véritable enjeu d’occupation pour les personnes concernées. La sensibilisation à l’hygiène de vie est un autre enjeu fort de l’activité physique et sportive ; c’est un retour que nous avons beaucoup de la part des détenus. Pour eux, c’est un apport forcément bénéfique. » Le programme P.I.E.D (Programme intégré d’équilibre dynamique) fait partie des accomplissements de la fédération, lui qui s’adresse à des personnes vieillissantes qui rencontrent des difficultés à se déplacer et des troubles de l’équilibre. « Le public que l’on retrouve en milieu carcéral est tout aussi hétérogène que celui que l’on retrouve dans la société, constate Julien Bau. Il est donc nécessaire de nous adapter à tous les types de publics et c’est justement ce qui fait notre force au sein de la Fédération Française Sports pour Tous : nous sommes capables d’adapter ce que nous proposons. Nous avons transposé nos programmes et nos objectifs mis en place à l’extérieur dans le milieu carcéral. »
« Casser le cycle néfaste de la sédentarité »
Le tout avec des résultats convaincants. « Sur la période d’avant Covid, nous touchions environ 250 à 300 détenus par an sur les actions et projets mis en place, révèle Julien Bau. Nous parlons là de détenus accompagnés tout au long de l’année via des programmes développés par la fédération. » Depuis deux ans, la crise sanitaire a frappé de plein fouet la population, y compris la population carcérale, qui a souffert plus que les autres de la hausse de la sédentarité. « Les programmes mis en place avant la période de crise sanitaire gardent leur intérêt, et même plus. Dans les mois qui arrivent, il sera sans doute nécessaire de donner plus d’intensité aux programmes et aux actions, car il est certain que le public carcéral a été fortement touché par la sédentarité inhérente à la crise que nous vivons depuis deux ans, analyse Julien Bau. Le vrai enjeu est d’aller chercher, de convaincre et de proposer des choses qui attirent et qui motivent les détenus. Il est nécessaire de casser ce rythme néfaste de la sédentarité en milieu carcéral et ensuite, de pouvoir faire entrer les détenus dans un cycle positif. C’est à cela que servent nos programmes et c’est un sujet sur lequel la Fédération Française Sports pour Tous va continuer à se mobiliser. » Pour le plus grand bonheur des détenus pour lesquels le sport représente une bouffée d’oxygène.