Depuis bientôt deux ans, la ville de Poissy permet à ses agents de pratiquer deux heures d’activités physiques hebdomadaires sur leur temps de travail. Le sport comme moyen de lutte contre l’absentéisme et pour favoriser le bien-être au travail, ça marche !
Le sport permet de se maintenir en bonne santé. Oui, mais les actifs ont souvent bien du mal à se dégager un créneau pour s’y mettre. À Poissy, commune d’environ 37 800 habitants, la solution a été trouvée : le sport est intégré dans le temps de travail des agents communaux, dans le cadre du dispositif « Poissy Bien-Être ». Deux heures par semaine, en comptant le trajet aller-retour et le temps de change, les employés municipaux ont la possibilité, sur la base du volontariat, de s’adonner à une activité physique dispensée par les éducateurs de la ville. Au programme, sept activités sportives douces, de la gymnastique d’entretien, de la marche nordique, de la natation, de l’aquagym, de l’aquajogging ou encore de la relaxation, réparties sur seize créneaux. Le dispositif « Poissy Bien-Être », forme de management par le sport, a vu le jour au cœur d’un vaste plan d’amélioration des conditions de travail, impulsé par Karl Olive, maire depuis avril 2014. « Dans ma famille, nous sommes huit, et tout le monde pratique un sport. Et puis, en tant qu’ancien directeur des sports de Canal+, je connais les vertus de l’activité physique », explique-t-il. Au début de son mandat, Karl Olive a lancé « La Cavalcade », qui permet aux administrés de courir le samedi matin « sans se prendre la tête ». « Au bout de deux ans et demi, on m’a proposé de faire la même chose pour les agents de la ville, mais sur leur temps de travail, raconte l’édile. Cette idée m’a plu car, à Canal+, Michel Denisot nous permettait de faire du sport sur nos horaires, et j’estime que quelqu’un qui vient au boulot en forme va être plus efficace. »
Aucun sport à risque
Combattre l’absentéisme pour raison de santé est l’un des objectifs du dispositif. « Les arrêts maladie correspondaient en moyenne à 28 jours par an et par agent, relève Boris Gros, directeur du service jeunesse et sport de Poissy. Ce phénomène coûtait chaque année 2 millions d’euros, dont 1,5 million directement imputé sur le budget communal. » La municipalité est partie de plusieurs autres constats alarmants, comme l’explique le directeur du service jeunesse et sport : « La ville de Poissy, comme toutes les collectivités, a dû composer avec les baisses de dotations de l’État. En peu de temps, il y a eu une réduction de l’effectif des agents de 1 080 à 870 pour fournir le même service, voire plus. » Le concept de « Poissy Bien-Être » a commencé à émerger au printemps 2016, pour une mise en place mi-janvier 2017. « La médecine du travail l’a validé, car nous ne proposons aucun sport de contact ou présentant des risques », précise Boris Gros. « Certains voudraient faire du footing, mais il y a plus de risques de traumatologie », rappelle Thomas Bouteiller, éducateur sportif en charge du dispositif et de l’élaboration du planning, en lien avec les chefs de services et la direction des ressources humaines. « Poissy Bien-être » a ensuite été approuvé par les organisations syndicales, puis présenté en conseil municipal.
Diminution des absences
Parmi les 870 agents pisciacais que compte la municipalité, 200 à 250 se positionnent sur chaque session, soit 23 % à 29 % de l’effectif. Depuis le début, 1 000 employés municipaux y ont déjà participé. Avec presque deux années de recul, force est de constater que « Poissy Bien-Être » a porté ses fruits. « L’absentéisme de courte durée a chuté de 5 % », annonce le directeur du service jeunesse et sport. « Nous avons fait une économie de 100 000 euros, soit trois équivalents temps plein, dont 40 % ont été réinjectés dans l’acquisition de matériel ergonomique, comme des fauteuils ou des repose-bras pour améliorer le cadre de travail. » « Après deux heures de sport, les agents sont moins fatigués », indique Thomas Bouteiller, parfois à la tête des séances quand la situation le demande. Un constat qui peut sembler paradoxal. « La fatigue mentale et la fatigue physique ne sont pas les mêmes, assure le coordinateur. Après une séance de sport, les agents sont plus concentrés. »
« Le sport casse les codes »
En plus des économies et de l’augmentation de la productivité, le dispositif présente d’autres avantages. « Il est un atout pour la cohésion, souligne Boris Gros. Des agents de catégories A, B et C se côtoient, créant un mélange des statuts et des grades. Sans « Poissy Bien-Être », un employé n’aurait jamais imaginé voir son directeur en jogging. Le sport casse les codes. » Thomas Bouteiller abonde : « La convivialité est le premier élément qui motive les gens à participer aux séances de sport, selon les retours qui nous reviennent. » Des créneaux spécifiques ont été aménagés pour permettre aux parents, qui doivent composer avec les horaires des écoles et des crèches, de bénéficier eux aussi de leur temps sportif. « Je suis heureux que 65 % des femmes participent à « Poissy Bien-être » », souligne Karl Olive. « Nous sommes encore dans une époque où elles s’occupent de tout à la maison et n’ont pas de temps pour elles. Le dispositif leur permet de s’accorder quelques heures. » Si la participation aux sessions de sport est sur la base du volontariat, une fois inscrits, les agents ont l’obligation d’être présents sur toutes les séances du cycle. « Une autre partie de mon travail de coordinateur est de faire un compte-rendu à la DRH pour confirmer que son personnel a bien pris part aux séances », explique Thomas Bouteiller.
Aucune dépense supplémentaire
Chaque trimestre, un nouveau cycle, comprenant dix séances, commence avec les activités récurrentes, mais aussi quelques expérimentations comme le tir à l’arc. Ce mois-ci, « Poissy Bien-être » entre dans sa 17e session, avec une nouveauté, le tennis de table. « Je suis obligé de prendre en compte les conditions climatiques en fonction de la saison et de l’accès aux infrastructures », explique Thomas Bouteiller. « Je vérifie les créneaux et m’assure que les éducateurs sont disponibles. » Les sessions se déroulent dans les équipements sportifs de la ville, « un bon moyen de les remplir quand ils ne sont pas utilisés durant la pause méridienne ou en fin de journée », relève Boris Gros. Les activités de plein air, comme la marche nordique, se déroulent sur les sites communaux. Ainsi, aucuns frais de location ne sont engagés et, en libérant éducateurs sportifs municipaux pour ces créneaux, ces séances de sport n’entraînent aucune dépense supplémentaire pour la commune.
Un dispositif qui fait des émules
Les bons résultats obtenus par « Poissy Bien-être » ne peuvent qu’encourager la ville à pérenniser le dispositif au-delà des trois ans d’expérimentation. Améliorer le bien-être et les performances des collaborateurs, forcément, ça donne envie à tout chef d’équipe. « Nous avons énormément de contacts avec d’autres collectivités de toutes tailles, qui veulent connaître les modalités de mise en œuvre du dispositif et les résultats constatés », indique le directeur du service jeunesse et sport. « 80 ont pris exemple sur nous », ajoute Karl Olive, avec le sourire. Ce concept innovant sera peut-être reproduit dans de nouvelles communes, avec toujours le même but : assurer le bien-être des employés…
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Une initiative récompensée
Pour sa deuxième candidature, « Poissy bien-être » a séduit le jury des Trophées Sport & Management, décernés au printemps dernier par TPS Conseil, dans la catégorie territoire. « Ce prix, créé en 2014, a pour vocation de mettre en avant les efforts des collectivités et leurs projets innovants ou originaux malgré leurs moyens tendus », explique Jean-Luc Sadik, président de TPS Conseil et créateur des Trophées Sport & Management. Le jury recherche la valeur ajoutée et les résultats tangibles chez des collectivités qui utilisent le sport comme levier de développement pour les administrés, comme le sport santé, ou pour son rayonnement grâce au haut niveau et la gestion des équipements. « C’est une reconnaissance du travail réalisé, et ça nous donne la conviction que nous sommes dans une bonne démarche », se réjouit Boris Gros. Les précédents lauréats sont : Paris en 2014, Allonnes en 2015, la Mission locale d’insertion départementale rurale de l’Aude en 2016 et Saint-André-lez-Lille en 2017. Les collectivités peuvent d’ores et déjà candidater pour la 6e édition.