Plusieurs clubs de tennis de table ont ouvert des séances dédiées aux personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. C’est le fruit d’un travail commun de la Fédération française de tennis de table et de l’Union nationale France Alzheimer et maladies apparentées, qui va se prolonger en 2021.
Depuis plusieurs années, la Fédération française de tennis de table (FFTT) développe son programme de Ping santé pour mettre en avant la pratique dans un cadre de bien- être. À l’automne 2019, cette action s’est traduite par un partenariat avec l’Union nationale France Alzheimer et maladies apparentées. « Cela faisait quelques années que nous voulions nous rapprocher de partenaires sportifs », explique Benoît Durand, directeur délégué de France Alzheimer. De son côté, la Fédération française de tennis de table voulait dépasser le cadre de son programme bien-être pour s’impliquer davantage dans l’aspect médical. Une première rencontre a pu se faire entre les deux entités en 2018 grâce au Levallois SCTT, précurseur dans le domaine grâce à son programme Ping4Alzheimer. Les échanges entre la Fédération française de tennis de table et France Alzheimer se sont concrétisés fin 2019 par la signature d’une convention nationale. « L’un des objectifs est de créer un maillage territorial, que de nombreux clubs créent un programme Ping contre Alzheimer en lien avec les antennes départementales de l’association », indique Justine Bouzat, référente du projet à la FFTT.
« Il y a une vie après le diagnostic »
Le TTGF Angoulême Charente s’est lancé dans l’aventure assez tôt. « Nous voulions continuer de développer notre club. Nous avions vu des reportages sur les bienfaits du tennis de table sur ces maladies et une de nos ergothérapeutes travaille avec une équipe Alzheimer », explique Stéphane Pigeonnier, éducateur sportif et référent du club pour ce programme. Un rendez-vous bien installé depuis la fin de l’année 2019 : « C’est une institution maintenant ! Tous les mardis, 10 à 15 personnes atteintes d’Alzheimer et de maladies apparentées participent à la séance d’une heure et demie. On commence par un café de bienvenue pour favoriser la discussion. Ensuite, nos éducateurs proposent des exercices d’équilibre, puis la troisième partie de la séance est axée sur la pratique du tennis de table à travers des rencontres et des jeux pour stimuler leurs fonctions cognitives, focaliser leur attention, se repérer dans l’espace. » Plusieurs études réalisées à l’étranger ont montré les bienfaits de ce sport pour les personnes touchées par Alzheimer. « On sait qu’une bonne hygiène de vie est un facteur réducteur », précise Benoit Durand. « Le tennis de table permet de se focaliser sur la balle en mouvement, de se concentrer, de retrouver des réflexes, et cela demande de la motricité au moment de renvoyer la balle et de la lancer. » « Selon des études, la perception visuelle, la motricité, la coordination, ces éléments demandés en tennis de table stimulent l’hippocampe, la partie du cerveau la plus touchée par la maladie », ajoute Justine Bouzat. « De plus, le déplacement physique est plutôt calme. » Stéphane Pigeonnier met en avant un autre avantage : « L’important c’est l’ambiance ! Les participants ont le sourire et reviennent toutes les semaines. Nous créons de la convivialité pour ces personnes qui ont tendance à se replier sur elles-mêmes. En pratiquant une activité physique, elles renforcent leur confiance en elles. On les voit se remettre à trottiner alors que ça ne leur était pas arrivé depuis des années. » « Il y a une vie après le diagnostic », insiste le directeur délégué de France Alzheimer. « Ces séances permettent aux malades de retrouver une activité. » Benoit Durand voit également en ces séances de Ping contre Alzheimer un moyen de soutenir les aidants qui peuvent également prendre la raquette. « À l’association, nous sommes aussi préoccupés par leur état de santé car ils manquent de répit. En jouant ensemble, ce couple retrouve une activité en commun », souligne-t-il. « Les échanges créés, le lien social, sont les éléments qui ressortent des premiers retours », renchérit Justine Bouzat. « Ce public est content de jouer au tennis de table et les aidants se changent les idées. Le premier élément, c’est le bonheur apporté par la pratique. »
Objectif : proposer le programme Ping Alzheimer dans chaque département
Le programme Ping Alzheimer devait être largement déployé lors de l’année 2020, mais la pandémie de Covid-19 a bouleversé le calendrier. « Nous avons réunis plusieurs clubs en visio en avril dernier pour lancer un appel à candidatures, en nous appuyant sur les exemples des clubs de Levallois SCTT et TTGF Angoulême Charente », souligne Justine Bouzat. « En 2020, nous avons commencé à essaimer pour créer des relations entre les clubs de tennis de table et nos associations dans les départements », complète Benoît Durand. Plusieurs clubs se sont projetés dans ce programme et ont pris des contacts avec France Alzheimer. En septembre, deux d’entre eux ont mis en place ce programme, le Mans Sarthe Tennis de Table et le FJEPS Neuville TT, en lien avec les antennes de France Alzheimer de la Sarthe et de la Vienne. « Nous avons un réseau de huit clubs très intéressés pour s’engager dans la démarche dès cette année », se réjouit Justine Bouzat. En 2021, la Fédération Française de tennis de table et France Alzheimer veulent continuer de décliner le programme sur tout le territoire. « L’idéal serait qu’un club propose le programme Ping Alzheimer dans chaque département », avance la référente FFTT. « La clé, c’est le lien entre les clubs et les antennes locales. » « On espère voir des conventions entre les clubs et les antennes locales en tenant compte des spécificités locales », poursuit Benoît Durand. « Nous allons nous remobiliser pour mettre en place tout ça. » Les deux entités vont travailler ensemble sur la communication. « Quand la crise sanitaire sera dernière nous, nous pourrons aller directement dans les clubs intéressés pour faire des démonstrations. C’est plus intéressant qu’envoyer des vidéos », avance le directeur délégué de l’Union nationale France Alzheimer. « Nous allons nous rapprocher de France Alzheimer Angoulême pour ouvrir une deuxième session hebdomadaire », annonce pour sa part Stéphane Pigeonnier.
Des formations avec Ping Santé
La FFTT a conçu un document interne sur le programme afin d’accompagner les clubs. Le programme de formations Ping Santé est un passage obligé pour les éducateurs avant l’ouverture d’une session réservée aux malades d’Alzheimer dans leur club. « Nous les incitons à se tourner vers le module B, créé récemment pour former au public qui pratique le sport sur ordonnance », explique Justine Bouzat. « Nous avons mis en place un cahier des charges pour bien encadrer cette pratique. » Stéphane Pigeonnier confirme : « Les séances sont animées par deux éducateurs salariés du club qui ont suivi, ou sont en train de suivre, la formation Ping santé de la FFTT, avec des ergothérapeutes spécialisés pour adapter le contenu des séances et des bénévoles qui aident. Nous sommes aussi en lien avec l’antenne Mutualité française Charente. » Les séances Ping contre Alzheimer ont repris dès décembre dernier au TTGF Angoulême Charente grâce à une dérogation. « Nous nous étions arrêtés mi-mars, nous avions repris en septembre, puis nous avons à nouveau été interrompus mi-octobre », raconte Stéphane Pigeonnier. « Nous avions peur que les participants arrêtent, mais tous sont revenus. Maintenant, ça serait agréable de retrouver les personnes pensionnaires en EHPAD. » Le TTGF Angoulême Charente prévoit une journée portes ouvertes à la fin de saison pour montrer l’activité aux proches des participants. Une manière pour le club de faire connaître cette belle initiative. France Alzheimer et la Fédération française de tennis de table s’appuient sur cet exemple et sur les retours de cette première année d’expérimentation pour poursuivre le développement du partenariat. « Nous sommes très contents de ce beau projet qui donne un peu de sourire, un peu d’espoir », résume Benoît Durand. « Il contribue à concrétiser notre vœu d’une société plus inclusive. Grâce à ce partenariat, nous montrons que même en étant malade d’Alzheimer, c’est possible de continuer à faire des activités. »