Si les compétitions de cyclisme sont toujours à l’arrêt à cause de la crise sanitaire, les fans de vélo peuvent arrêter de ronger leur frein avec la sortie des jeux Tour de France 2020 et Pro Cycling Manager 2020. Interview avec Alexis Flament, chef de produit sur ces deux nouveaux opus.
Alexis, quel bilan aviez-vous fait de l’édition 2019 de Tour de France et Pro Cycling Manager ?
L’année dernière, c’était la première année pour Big Ben, devenu NACON, où l’on s’occupait des jeux Tour de France et Pro Cycling Manager. 2019 était vraiment une année de transition pour les jeux et pour nous, pour que l’on puisse prendre nos marques avec ces jeux, prendre en charge cette communauté, le développement avec Cyanide, studio qui développe ces deux jeux. Ça a été une phase de transition très courte. Pour nous, 2019 était l’occasion de prendre en main ces licences, comprendre la communauté qui est proche de ces deux licences et de voir ce qu’ils attendaient des deux jeux. L’année, dernière, on a implanté quelques nouveautés et on a pu avoir les retours de la communauté, qui aime avoir une communication assez proche d’elle car ce sont de vrais fans de vélo et de vrais fans du jeu. On a très vite compris que pour les années suivantes, il fallait communiquer avec eux, les écouter, et faire la synthèse entre les envies des développeurs, des éditeurs, et des joueurs pour répondre à leurs besoins.
Les avis et les retours des fans sont donc réellement pris en compte…
Les jeux Tour de France et Pro Cycling Manager sont des jeux de niche, surtout pour Pro Cycling, qui est assez complexe si on ne connaît pas le cyclisme. Tour de France est un peu plus grand public, un peu plus arcade. La plupart des joueurs sont avant tout des fans de vélo, et on leur propose deux jeux différents, deux expériences différentes. On est attentif aux retours et aux demandes de notre communauté, et on essaye de les intégrer au mieux avec nos envies pour que ce soit cohérent.
« Une intelligence artificielle plus agressive »
Les cyclistes pros sont-ils des joueurs assidus ?
Sur Pro Cycling oui, pas mal de coureurs du peloton y jouent. En France, David Gaudu est un gros joueur de PCM, par exemple. A l’époque, Thibaut Pinot y jouait aussi pas mal, je ne sais pas si c’est encore le cas récemment. A l’international, on a pu faire tester la béta à des coureurs de la Team UAE, ce sont des retours intéressants. La semaine dernière, Laurens De Plus de la Team Jumbo a joué avec un influenceur belge à PCM, en live. Après, les coureurs sont aussi très pris par leurs entraînements, leur vie professionnelle et leur vie personnelle.
Quelles sont les nouveautés pour les versions 2020 des jeux ?
Sur Tour de France, c’est un gros travail de faire tous les ans les 21 étapes du Tour, même si c’est d’une logique implacable. En plus de ça, on essaye d’ajouter tous les ans une Classique ou une grande course du calendrier. Cette année, c’est Liège-Bastogne-Liège. Le studio s’est beaucoup penché sur l’aspect immersif du jeu, avec une nouvelle caméra en vue première personne, qui permet une immersion plus importante. Un chantier a aussi été fait sur le mode contre-la-montre, qui était jusque-là assez basique et pas vraiment proche de la gestion d’un chrono dans la réalité. Cette année, cela a été revu pour que ce soit réaliste, avec une gestion de la position et de l’effort plus importante, la possibilité de dépasser les coureurs devant soi et de se faire dépasser par ceux de derrière, et la logique de partir dans l’ordre décroissant du classement. Un gros chantier également, avec l’intelligence artificielle qui a été beaucoup travaillée. C’est un gros sujet pour les jeux de sport, c’est un gros travail et un gros challenge pour le studio. Cette année, ça a été bien retravaillé, on a beaucoup de retours très positifs avec cette IA plus agressive.
Et sur Pro Cycling Manager ?
Sur PCM, on a aussi ajouté les étapes du Tour de France et d’autres étapes. Un focus a été fait sur le mode Carrière, qui est l’un des modes phares de Pro Cycling Manager. On a implanté le moral des coureurs pour donner un aspect encore plus important à ce mode de jeu. Au-delà des objectifs et de la gestion du cyclisme, on va aussi gérer des humains qui vont avoir des envies plus ou moins réalisables, auxquelles le joueur devra répondre, favorablement ou non, et cela influera sur le moral des coureurs. L’intelligence artificielle a également été un gros chantier comme sur Tour de France, elle est beaucoup plus agressive. D’après les premiers retours, c’est quelque chose qu’on a bien réussi cette année. L’une des grosses nouveautés, c’est aussi le tableau de bord qui a été totalement revu. C’est là qu’on passe la majorité de son temps quand on joue à PCM, et de plus en plus d’informations s’accumulaient sur ce tableau de bord. Il devenait compliqué à gérer et à lire. Cette année, il est beaucoup plus lisible, beaucoup plus intuitif. Ça rend l’expérience de jeu beaucoup plus agréable et plus simple. Enfin, dans les nouveautés, on a mis un assistant pour aider les coureurs à planifier leur calendrier sur l’année, car c’est quelque chose qui prend du temps en début de partie.
« La météo et le système de chutes, des demandes logiques »
Le développement des jeux a-t-il été affecté par la crise sanitaire ?
Forcément, la crise a eu un impact, comme pour toutes les entreprises. Mais on a su s’adapter, on est passé au télétravail. Sur un jeu comme Tour de France, pour qu’on puisse sortir début juin, le jeu devait être fini au mois de mars. On avait bien avancé avant la crise sanitaire, même si on continuait à développer certaines choses ajoutées par la suite en patchs. Concernant la date de sortie, on a fait un état des lieux. On s’est rendu compte qu’on était armé pour sortir les deux jeux en temps et en heure. C’est un moyen de vivre le cyclisme et le Tour malgré le confinement et le report, voire l’annulation, des courses. On est content de proposer ces jeux pour faire patienter les fans de vélo.
Quelles seront les améliorations futures ? Les fans aimeraient notamment que la météo entre en jeu…
C’est une demande des joueurs et c’est logique. La météo est importante, les développeurs en sont conscients, ce sont eux-mêmes des fans de vélo. Ils savent que la météo à un véritable impact sur la course. On a déjà le vent qui est présent dans le jeu. La suite logique serait d’intégrer la pluie, etc. On y pense. A l’heure actuelle, il y avait des contraintes techniques qui ne permettaient pas forcément de pouvoir développer la météo. D’année en année, on essaye d’améliorer le jeu, mais je ne peux pas vous dire quand est-ce que l’on pourra intégrer la météo. Il faut placer le curseur au bon endroit entre les demandes des gens et ce qu’on est capable de faire dans un temps de développement très court, qui nécessite de faire des choix dans les ajouts. Mais la météo, on y pense, l’ajout du système de chutes aussi, c’est régulièrement demandé et on garde ça en tête. Si techniquement, en ayant du temps et des ressources, on peut le faire, on le fera car ce sont des choses cohérentes pour le jeu.
Comment faire pour convaincre au-delà des passionnés de vélo ?
On est conscient de ce que représentent les jeux, de ce qu’ils proposent. On s’appuie sur ces forces. Cette année, nous avons fait une communication intensive et transparente avec tous les joueurs, sur les nouveautés de ces éditions 2020. Le vélo est un sport mondialement connu, très suivi, mais pour un jeu vidéo, on s’imagine de longues courses, ennuyantes… On essaye de montrer que ce n’est pas le cas, que ce sont des jeux « challengeants », qui demandent une stratégie, une vraie gestion. En plus des fans de cyclisme, on va aller voir les fans de sport et les fans de jeux de management, par exemple, parce que Pro Cycling peut être intéressant pour eux. C’est une nouvelle expérience.