Dans le calendrier cycliste, une large part désormais est accordée aux courses atypiques empruntant des chemins de traverse. Pionnier du genre, le Tro Bro Leon dans le nord-Finistère s’apprête à organiser sa 36e édition, avec toujours à sa tête son charismatique fondateur Jean-Paul Mellouet.
C’est une course cycliste à nulle autre pareille. Et pour cause : elle emprunte des chemins uniques et atypiques baptisés « ribinous ». Historiquement, ces sentiers de traverse servaient à la population du nord-Finistère pour passer d’une route principale à une autre et à faire rentrer le bétail à l’étable. En 1984, Jean-Paul Mellouet a l’idée de créer une épreuve faisant la part belle à ces itinéraires bis. L’idée est double : offrir un spectacle inédit au public et trouver un moyen original de renflouer les caisses de l’école bretonne Diwan dans laquelle Jean-Paul est alors impliquée. « On m’a pris pour un fou à l’époque », se souvient-il. « Hormis Paris-Roubaix avec ses pavés, il n’existait alors aucune autre course quittant les routes classiques. » Son abnégation a payé : d’abord dévolu aux seuls amateurs, son Tro Bro Leon (littéralement Tour du Pays de Léon, la zone géographique recouvrant cette partie rurale du nord-ouest de la Bretagne, reconnue pour son activité légumière, NDLR) a été ouvert aux professionnels à partir de 1999 et est aujourd’hui durablement installé au calendrier cycliste international.
Une concurrence qui agace…
Le 22 avril prochain – lundi de Pâques – aura lieu la 36e édition de cette course désormais retransmise en direct sur France TV et suivie sur le bord des routes et ribinous par près de 8 000 personnes. S’il peut se montrer satisfait de son « bébé », Jean-Paul Mellouet est néanmoins amer de voir qu’il a depuis été copié par la concurrence. « On voit désormais certaines courses cyclistes comme la Bretagne Classic (ex-Grand-Prix de Plouay), Paris-Camembert ou, plus récemment, Paris-Tours ajouter des chemins sur leur tracé. Je trouve gênant qu’on nous imite ainsi, au risque de voir le Tro Bro Leon perdre son côté atypique. Que les étrangers le fassent, comme en Italie avec les Strade Bianche, pourquoi pas, mais en France ça me dérange plus. » L’organisateur historique de la course bretonne, dont Christophe Laporte est le tenant du titre, espère néanmoins continuer à attirer un beau plateau à chaque nouvelle édition. « Peter Sagan aurait le profil parfait, mais il ne faut pas rêver », reconnaît-il. « Plus modestement, j’aimerais voir le Brestois Valentin Madouas s’aligner, il aurait de belles chances. » La dernière victoire d’un Breton remonte à 2008 avec Frédéric Guesdon.
Une course bientôt inscrite au ProSeries
Actuellement, le Tro Bro Leon est inscrit au calendrier de l’UCI Europe Tour et est classé 1.1, au même titre que d’autres épreuves régionales bien connues comme la Route Adélie, le Tour du Finistère ou le Grand Prix de Plumelec. Une réforme pourrait néanmoins le faire passer dans une nouvelle catégorie de courses : les ProSeries, une deuxième division du calendrier cycliste international créée par l’UCI en 2020 pour gagner en lisibilité. Ce changement pourrait permettre à la course finistérienne de continuer à grandir, elle qui était encore réservée aux amateurs il y a seulement 20 ans…