Rencontrée au gymnase Ferber (Lyon 9e) fin décembre, à l’occasion du derby contre Oullins comptant pour la 5e journée des interclubs de N2, Léa Palermo, 26 ans, croit encore très fort à une qualification pour les JO de Tokyo en double avec Delphine Delrue. « On doit être ambitieuses », souligne la Grenobloise licenciée au Bacly (Badminton Club de Lyon) en prémisse d’un début 2020 décisif.
Léa, où en êtes-vous dans votre quête de qualification aux JO ?
On y est depuis le mois de mai 2019 et jusqu’en mai prochain. Le but, durant un an, c’est de performer et d’aller chercher des points au cours de 10 meilleurs tournois de notre paire constituée avec Delphine Delrue. Il faut donc toujours faire mieux pour espérer faire partie des 16 meilleures paires qualifiées pour les JO. Pour le moment, nous ne sommes pas qualifiées, il faut donc s’accrocher. On est à 5 000 points de la 16e paire, c’est quand même pas mal. Il nous reste de janvier à mai pour nous exprimer. Il faut garder la détermination et la motivation.
Cela va se jouer sur quoi principalement ?
Le mois de janvier va être capital. Il y a beaucoup de points à aller chercher, d’abord à l’Open de Malaisie puis à l’Open d’Indonésie, les deux premières semaines de janvier. Et éventuellement à l’Open de Thaïlande, la semaine qui suit. On va regarder en fonction des tableaux qui vont sortir si cela vaut le coup d’aller en Thaïlande. On fera un point fin janvier. Je pense que cela peut vraiment se jouer là-dessus.
« Il nous manque encore une victoire de référence »
Comment pourriez-vous définir votre paire ?
Avec Delphine, cela fait maintenant 4 ans que l’on joue ensemble. On se connaît très bien, je connais ses réactions, elle connaît les miennes. On sait ce qu’on attend l’une de l’autre, sur et en dehors du terrain. Cela fait gagner du temps. Delphine a 21 ans, moi j’en ai 26. On s’apporte mutuellement des choses, elle la fougue de sa jeunesse et moi mon expérience. On doit être ambitieuses car on a les capacités pour bien faire, on l’a montré plusieurs fois sur les deux dernières années que l’on pouvait rivaliser avec les meilleures paires mondiales.
Qu’est-ce qui pêche encore ?
Pour le moment, il nous manque encore une victoire de référence pour débloquer quelques chose. À de nombreuses reprises, c’était accroché, on est passées tout près et on a perdu. C’était décourageant sur le coup. Maintenant, il faut persévérer, arriver à faire basculer le petit truc. Le jour où cela arrivera, je suis persuadé que ça lancera quelque chose. On a déjà gagné des « International Challenge » (en Belgique en 2018 par exemple), cela rapporte 4 000 points, c’est loin d’être négligeable pour viser une qualification.
« On a énormément progressé avec Delphine »
Vous dites-vous que c’est votre dernière chance ?
Le bad, c’est ma passion. J’en pratique depuis que j’ai 8 ans et je ne me lasse pas du tout. Pour le moment, je ne me vois pas du tout arrêter après Tokyo. Maintenant, 2024, c’est un peu plus loin. J’aurai 31 ans. Des joueurs de 35 ou même 38 ans continuent à un très haut niveau. C’est tout à fait envisageable. Il faudra juste que le corps suive. En tout cas, la tête est toujours là.
Le fait que les JO se déroulent en France joue forcément sur la motivation ?
Bien sûr ! D’autant plus qu’on a énormément progressé avec Delphine. Et elle de son côté également en double mixte avec Thom Gicquel. On sait qu’on a les moyens de se qualifier pour les JO et d’y faire quelque chose, à savoir ramener des médailles pour le badminton. On n’en parle pas beaucoup, c’est difficile d’exister. Pour les sponsors, pour les médias, on a envie de faire parler du bad et cela passe par les performances. On y croit et on se dit : allez on va jusqu’à Paris et on va montrer qu’on est aussi capables, nous les Français, en badminton.
« Envie de faire honneur à la France »
Comment vivez-vous cette sous-médiatisation au quotidien ?
C’est difficile. Globalement, le statut de sportif de haut niveau n’est pas reconnu. C’est mon métier, je ne travaille pas à côté. Des gens ont du mal à comprendre cela. Le Bacly m’aide, c’est mon principal sponsor et sans ce club, je ne suis rien. Je ne pourrais pas vivre. Des sponsors privés m’aident aussi (Youbadit, magasin spécialisé à Grenoble). Ce sont des partenaires de cœur qui me suivent depuis des années. Je ne cesse de les remercier car sans eux, ce serait pas possible. Mes parents m’aident encore un peu. À 26 ans, ce n’est pas une situation facile. Je pourrais mieux me sentir psychologiquement. J’ai fait ce choix, c’est une passion et je ne regrette rien.
Qui finance votre tournée en Asie ?
La Fédération française de badminton est d’une grande aide sur les compétitions internationales puisqu’elle finance 80% du voyage (transport et hébergement), le reste étant à notre charge. On avance les frais et on est remboursés. On est très chanceux par rapport à d’autres pays. Les copains néerlandais ou anglais, par exemple, ne sont pas soutenus de la même manière par leur fédération.
On sent une certaine pression d’être redevables et de se qualifier pour les JO ?
Oui, bien sûr, on a envie de leur faire honneur (aux dirigeants) mais on a surtout envie de faire honneur à la France, de faire honneur aussi à nos sacrifices. Je suis partie à 14 ans de chez moi pour faire du badminton de haut niveau (en Pôle France espoirs à Voiron, puis en Pôle France jeunes à Strasbourg et enfin à l’INSEP, NDLR). On a envie d’aller loin pour les proches qui nous ont soutenus, pour tous ceux qui nous ont aidés. On a envie d’être redevables de plein de monde.