Médaillée aux championnats de France, d’Europe et du monde, Manon Brunet aimerait désormais accrocher une breloque olympique à son déjà riche palmarès. Un objectif ambitieux que la sabreuse de 23 ans s’est fixé, elle qui avait déjà touché du doigt ce rêve à Rio en 2016…
« Ce qui m’a attirée en premier lieu, et c’est assez drôle, c’était cette sorte de déguisement que l’on porte ! (rires) » Lorsqu’elle se souvient avec humour de ses premiers pas en escrime, alors âgée de huit ans, Manon Brunet ne peut s’empêcher de sourire. Son premier club, le Sabre au Clair situé à Rillieux-la-Pape à côté de Lyon, pique rapidement celle qui s’est également essayée à la danse et au taekwondo, mais qui a très vite choisi son camp sous l’aile de son premier mentor, Carlos Bravo. Fille de l’ancien joueur de football à l’Olympique lyonnais Philippe et de Sandrine, une ancienne championne de France de barque, la jeune Manon se prend au jeu de l’épée, bien qu’elle n’ait alors pas vraiment d’exemple à suivre dans la discipline. « J’ai un peu honte de le dire, mais je ne regardais pas vraiment d’escrime à la télé », confesse-t-elle, amusée. En sabre, l’athlète de 23 ans admire tout de même la Russe Sofia Velikaya (argent en individuel en 2012 et 2016), l’Américaine Mariel Zagunis (or en individuel en 2004 et 2008) ou encore l’Ukrainienne Olha Kharlan (bronze en individuel en 2012 et 2016), toutes médaillées lors des quatre premières – et seules – éditions des Jeux olympiques du sabre.
Ces pirates qui s’affrontent en duel
L’escrimeuse, aujourd’hui troisième tireuse mondiale obtient sa toute première grande médaille en individuel, aux Championnats d’Europe de Düsseldorf (Allemagne) le 17 juin dernier, seulement battue par la future quintuple championne continentale Olga Kharlan. Une performance qui lui permet désormais de figurer parmi le gratin des toutes meilleures sabreuses mondiales. « Je suis troisième derrière deux monstres, on ne va pas se mentir (Kharlan est première, Velikaya deuxième, NDLR) », lâche Manon Brunet. « Je suis super fière de ce que je réalise jusqu’à maintenant. » Car, pour la médaillée en championnats de France (or, argent), d’Europe (argent à trois reprises, bronze à deux reprises) et du monde (or, argent à deux reprises, bronze), en individuel ou par équipes, l’ascension est fulgurante. Il est presque déjà loin le temps où, à 15 ans et sans sa famille, la sportive quitte son Rhône natal pour rejoindre le pôle espoirs du Cercle d’Escrime Orléanais et franchir un cap dans son escrime. Avec le sabre, « une catégorie plus rapide que les autres, plus intense qui [me] fait penser à des pirates qui s’affrontent en duel », cette grande impatiente trouve une discipline qui lui permet d’exploiter son côté casse-cou. « J’aime bien prendre des coups. » Et très vite, ses entraîneurs lui détectent des capacités au-dessus de la moyenne, un potentiel certain pour aller très haut. L’adolescente progresse encore et intègre l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (INSEP), avant de tirer en catégorie seniors et d’entrer au pôle France, pour définitivement lancer sa carrière internationale.
« Compliqué de vivre exclusivement du sabre »
Actuellement en troisième année de licence en marketing à l’EDHEC, mais aussi sous contrat d’image avec l’armée française depuis la fin des Jeux olympiques de 2016, Manon Brunet a une vie bien remplie et s’assure déjà un avenir plus serein. « Ça m’apporte un vrai équilibre. En plus, aujourd’hui, c’est compliqué de vivre exclusivement du sabre, donc tout ce que je fais en parallèle m’est déjà nécessaire. » Les semaines d’entrainements sont intenses, faites de musculation, de travail d’appuis, d’exercices d’assauts, mais aussi d’une préparation mentale essentielle pour performer dans cette discipline exigeante. À l’INSEP, elle est suivie par plusieurs coaches, un préparateur pour le physique et un pour le mental, mais aussi un préparateur de vie. Rien n’est laissé au hasard. « On a même une professeure de danse contemporaine », note la Lyonnaise. « Elle nous permet d’apprendre à mieux gérer notre corps dans l’espace, à en prendre soin car c’est un sport assez traumatisant pour le corps. » Si le physique répond toujours présent malgré des compétitions éreintantes, celle-ci perfectionne de plus en plus son mental et sa concentration, cruciaux pour faire de petites mais si importantes différences au plus haut niveau. « Souvent, deux tireuses ont le même niveau d’escrime. C’est sur la différence de mental, d’envie, que tout peut se jouer. Il faut savoir rester « focus » dans les moments cruciaux. »
« J’ai beaucoup appris de cette défaite aux Jeux de 2016 »
Comme ça a été le cas lors des Jeux olympiques de Rio en 2016, où elle termina au pied du podium après avoir échoué en demi-finale à une touche seulement de la numéro un mondiale Sofia Velikaya (15-14). « Je ne m’imaginais pas pouvoir atteindre un tel niveau pour mes premiers Jeux », avoue Manon Brunet. « C’était un souvenir douloureux sur le moment, j’aurais pu avoir une médaille… Mais au fur et à mesure, c’est aussi devenu une force, j’ai beaucoup appris de cette défaite. » Son plus beau souvenir, en revanche, reste son titre de championne du monde par équipes acquis en 2018 à Wuxi (Chine) avec ses partenaires Caroline Quéroli, Cécilia Berder et Charlotte Lembach. « C’était fou, j’ai pleuré durant une heure après. J’avais complètement raté mon tournoi en individuel (35e, NDLR), donc là c’était un vrai soulagement, une émotion incroyable. » De nombreux grands moments dans une carrière déjà riche, malgré son jeune âge. « Je me souviens que, quand j’ai vu les Jeux de 2012 à la télévision, je regardais tout ça avec envie. Mais je ne me voyais pas du tout atteindre Rio. Tout est allé tellement vite en fait jusqu’à l’équipe de France… » Pour la soutenir, Manon Brunet a la chance de pouvoir compter sur Boladé Apithy, sabreur français double médaillé aux Championnats d’Europe 2011 et 2012, mais aussi son petit ami dans la vie. « Comme moi, il a des chances de participer aux Jeux olympiques de Tokyo 2020. C’est une vraie force d’être tournés ensemble vers ce même objectif. » Une force supplémentaire qui ne sera pas de trop pour enfin atteindre ce rêve, déjà touché du doigt quatre ans plus tôt. Pour cela, Manon Brunet doit déjà se qualifier pour les prochains JO et doit pour cela faire partie des trois sabreuses françaises sélectionnées à l’issue de cette saison. C’est plutôt bien parti.
Paris 2024 au Grand Palais, « ça va être grandiose »
Si l’échéance de Tokyo est la plus présente dans l’esprit de Manon Brunet, qui espère bien y remporter « une médaille, voire LA médaille » autant en individuel que par équipes, celle-ci a déjà coché les Jeux olympiques de Paris en 2024 sur son agenda. « Je me souviens que les premiers championnats du monde d’escrime que j’avais vus étant plus jeune se déroulaient au Grand Palais, à Paris. L’escrime pour les Jeux de 2024 se passera à nouveau au Grand Palais, donc ça devrait être grandiose. Avec tout le clan français, soutenu par un public de fou… J’ai tellement hâte d’y être ! »
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La bio express de Manon Brunet :
- 23 ans – Née le 7 février 1996 à Lyon (Rhône)
- Clubs : INSEP (depuis 2013), Cercle d’Escrime Orléanais (depuis 2011), Sabre au Clair (Rillieux-la-Pape, de 2004 à 2011)
- Palmarès en individuel : vice-championne d’Europe (2019)
- Palmarès par équipes : championne du monde (2018), vice-championne du monde (2014, 2019), médaille de bronze aux Championnats du monde (2017), vice-championne d’Europe (2014, 2016), médaillée de bronze aux Championnats d’Europe (2017, 2018)