Margot Boulet : Le sport pour se reconstruire

(FFA / Akseophoto)

Médaillée de bronze aux derniers Jeux paralympiques, Margot Boulet file vers Paris 2024 en aviron et en natation. Le défi est énorme pour l’athlète de la Team SPORTMAG mais à la hauteur de sa volonté et de son esprit de compétition. Accepter son handicap, après son accident de parachutisme, a été la plus grande épreuve de sa vie.

L e sport comme défouloir. Physique et émotionnel. L’histoire de Margot Boulet se mêle avec sa passion pour le sport. Elle illustre les valeurs d’abnégation et de dépassement de soi. « Plus jeune, j’ai toujours adoré la performance, l’effort, la compétition… Depuis mon accident, le sport est encore plus que ça pour moi », glisse la médaillée paralympique. Aujourd’hui pleinement épanouie en équipe de France de para-aviron, l’athlète de 32 ans a vu sa vie basculer alors qu’elle touchait son rêve du doigt. Ce rêve, c’était d’intégrer le GIGN (Groupe d’intervention de la Gendarmerie nationale). « Au départ, je suis une nageuse. J’ai pris part à mes premières compétitions dès 7 ans. J’ai atteint le niveau européen chez les juniors. Cependant, je n’ai pas percé. J’ai fait le choix de privilégier mes études et ma carrière », raconte la sportive. Une fois sa licence de biologie en poche, Margot Boulet passe le concours de sous-officier de la gendarmerie, avec en ligne de mire les unités d’élite. Après avoir réussi à intégrer la Garde républicaine à cheval, elle parvient également à entrer au GIGN. C’est lors de sa dernière année de formation que sa vie bascule en raison d’une grave blessure lors d’un stage de parachutisme. Cheville et dos en vrac, elle doit quitter le service.

Un nouveau départ

Son quotidien ne sera plus jamais le même. On lui pose une prothèse à la cheville. Ses vertèbres fracturées sont soudées. Après sa période d’hospitalisation, Margot Boulet se tourne vers le sport. Pour réparer son corps et sa tête. « C’était important de comprendre ce qui avait pu changer en moi. Je suis revenue à la natation, puis j’ai fait un peu d’aviron. Mes parents ont un club. J’en ai toujours entendu parler. C’était l’occasion de se lancer. » C’est à ce moment que sa vie bascule encore, cette fois dans un autre sens. Un entraîneur de la fédération est de passage à Nogent-sur-Seine (Aube) pour superviser un jeune du club. Finalement, c’est Margot qui l’impressionne. Le lendemain, elle entre en contact avec l’équipe de France de para-aviron. Elle l’intègre en quelques semaines. C’était en 2019, à peine six mois avant les Jeux Paralympiques de Tokyo. « C’était un sacré défi. Tout s’est fait en accéléré. J’étais sportive, oui, mais il fallait que j’apprenne à ramer ! », lance l’avironneuse dans un éclat de rire. Le report des Jeux, en raison de la crise sanitaire, sera une aubaine pour l’équipage tricolore. Après une médaille européenne fin 2020, le quatre avec barreur de Margot Boulet se renforce encore pour aller décrocher le bronze à Tokyo en septembre 2021.

« Ne plus courir après ce que j’étais avant »

Sur le podium, avec le reste de l’équipage, elle savoure sa médaille et surtout sa nouvelle vie. En seulement un an et demi, l’ancienne du GIGN est passée de novice en aviron à médaillée paralympique. « La plus belle récompense, c’est d’avoir réussi à me reconstruire physiquement et psychologiquement et en tant que personne. Après mon accident, je me sentais limitée. Je me souviens que dès que ma cicatrice m’a permis d’aller dans l’eau, j’ai sauté dans la piscine. J’espérais retrouver mon niveau. Désormais, j’ai découvert tout un espace où j’ai une marge de progression. Ça m’a fait beaucoup de bien. Je ne suis plus en train de courir après ce que j’étais avant et que je ne serais plus. Aujourd’hui, je suis bien plus mature par rapport à mon handicap. Je vois devant moi tout un chemin qui n’est pas limité par mon accident, au contraire. » A ses débuts sur le bateau, les choses n’avaient pas été aussi évidentes. Il avait fallu maîtriser sa position et préserver son dos, tout en gérant l’amplitude de sa cheville. Désormais, quand la championne d’Europe d’aviron indoor rame, elle ne se pose plus de question. « Cela fait désormais six ans que j’ai eu mon accident. Toutes ces précautions sont devenues la routine pour moi. Je sais ce que je peux faire et ce que je ne peux pas faire. Même si, parfois, je pense encore comme avant. Par exemple, je ne peux pas partir faire un footing ou mettre n’importe quelle paire de chaussures. Les talons, ce n’est pas mon style mais c’est fini ! », ajoute-t-elle dans un sourire.

« La vie peut basculer à chaque instant »

Avec le handisport, l’ancienne cavalière découvre un nouveau monde. « Ce que j’aime dans le sport, c’est l’idée de se dépasser. Bien sûr, j’adore la compétition, j’aime être devant les autres ! (Rires). Mais ce que je préfère, c’est devenir la meilleure version de moi-même. Avec le para-aviron, j’ai trouvé un espace où m’exprimer et grandir chaque jour, avec de nouveaux défis en permanence », assène-t-elle. Comme beaucoup de sportifs au handicap acquis, Margot n’avait jamais pensé au para-sport avant son accident. Très vite, elle a pris à cœur son rôle d’ambassadrice. « C’est important pour moi de montrer une image positive. J’estime avoir été chanceuse dans mon accident : mon handicap est invisible, je suis bien entourée… Quand on retrouve l’envie, qu’on a réussi à se reconstruire, on veut être un exemple, pour montrer aux autres qui sont dans des situations difficiles que ce n’est pas fini. Dans le handisport, on a tous été cassés par la vie mais on continue de se battre. » Un message qui trouve son écho auprès du grand public alors que le para-sport prend de l’ampleur. L’engouement est d’autant plus soutenu, à l’approche des Jeux olympiques et paralympiques en France.

2024 dans l’eau et sur l’eau

A Paris, dans un an et demi, Margot Boulet ne compte pas être seulement sur le bateau. L’avironneuse s’est également lancé le défi de se qualifier en natation, afin de boucler la boucle avec sa vie d’avant. Mi-mars, elle participera à sa première compétition internationale, en Italie. Son objectif : être aux championnats du monde à Manchester, où le processus de qualification paralympique s’enclenchera. « Faire des Jeux dans son propre pays, c’est une chance que vivent peu de sportifs », rappelle la médaillée de bronze. « C’est un grand défi pour moi. Je ne sais pas si je vais réussir à concilier les deux mais je vais tout tenter. Je ne me vois pas ne pas essayer ». C’est comme ça que la sportive a toujours mené sa barque. Faire les choses à fond, sans avoir le moindre regret. « La vie peut basculer à chaque instant. J’ai envie de vivre intensément, profiter de chaque moment, chaque journée. Je ne suis pas amère par rapport à ce qu’il m’est arrivé, cette trajectoire différente. Finalement, mon accident m’a ouvert des opportunités que je n’imaginais pas. »

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