Matthieu Bataille, ancien membre emblématique de l’équipe de France de judo, incarne la transition réussie d’athlète à arbitre, alliant passion et rigueur sur la scène olympique.
Matthieu, pouvez-vous nous expliquer ce passage d’athlète à celui d’arbitre ?
Je suis arbitre depuis 2017, ça fait 7 ans. Alors c’est vrai que je suis passé d’athlète à arbitre assez tardivement, on va dire, car j’ai fini ma carrière en 2014 et après la fédération internationale avait mis en place un cursus plus rapide pour passer l’examen d’arbitre internationale. Du coup, je me suis dit pourquoi pas mettre un pied dans l’arbitrage. Le haut niveau me manquait un peu. Tous les athlètes le savent quand on arrête sa carrière, il y a toujours un petit manque après.
Si on m’avait dit, quand j’étais athlète, que j’allais devenir arbitre, je n’y aurais vraiment pas pensé. Même si c’est un rôle différent, ça reste quelque chose d’intéressant. Je m’y suis retrouvé dans le haut niveau et je prends plaisir.
Comment devient-on arbitre international, quel est le processus ? Est-ce le même que celui d’un athlète ?
C’est un peu différent. Je n’ai pas les années en tête comme ça, mais il y a des âges et un temps à respecter pour le niveau européen, avant de passer au mondial par exemple. Mais moi, j’ai eu un cursus plus rapide avec mon statut de médaillé continental mondial que le président avait mis en place pour les anciens médaillés. Je suis donc passé directement en licence mondiale lors d’un examen en Espagne. Il y a des échelons à gravir, petit à petit, niveau national, européen, mondial puis Olympique qui est encore différent.
Être arbitre, ce n’est pas forcément la position la plus facile, des fois lors d’une finale par exemple tout repose sur vos décisions durant un combat. Y’a-t-il une pression ? Si oui, comment la gérez-vous ?
L’arbitre à un rôle assez important dans le judo même si je dis tout le temps, moins on voit l’arbitre mieux c’est ! Et des fois, on est obligé de voir l’arbitre, car il faut prendre des décisions et on espère que la décision soit la plus juste possible. Tous les combats sont importants, que ce soit l’éliminatoire ou une finale, c’est le même combat, mais il y a la pression. On le sent même aux JO, il y a une atmosphère un peu différente, car tout le monde attend les JO, la pression est plus grosse.
Je pars du même principe qu’en tant qu’athlète, c’est important d’être dans sa bulle et ne pas écouter ce qui se passe autour. Des fois, il y a le public, les coachs qui demandent des pénalités ou des scores. Il faut ne pas se laisser influencer. J’étais le premier quand j’étais coach à tenter de demander un score même si on savait qu’il n’y avait rien (rires). Ça fait partie du jeu !
« Je connais la dureté des entraînements pour les athlètes, donc j’essaie d’être le plus juste possible »
Comment avez-vous été sélectionné pour les JO et quelle a été votre réaction ?
On est noté sur différents grand prix, grand chelem, par la commission d’arbitrage. Eux, ils sont à la vidéo, ils regardent notre travail, si on n’est pas trop déjugé, et si on fait les bons choix. Tout est pris en compte que ce soit les pénalités et les scores. Après, ils font une sélection avec les meilleurs arbitres du monde. Je me suis donc bien classé et j’ai été sélectionné.
J’étais content d’apprendre que j’allais participer aux JO, car c’était aussi le but, quand je me suis lancée dans l’arbitrage. Je m’étais dit après les J.O de Tokyo que ce serait bien d’arbitrer les JO à la maison. On sera en France avec une ambiance de feu comme d’habitude.
Comment vous préparez-vous avant les JO ?
On se prépare beaucoup, car on sort sur toutes les compétitions où on peut marquer des points pour les jeux olympiques. Depuis janvier, on est le groupe de seize arbitres à sortir. C’est de l’entraînement, et une dernière ce week-end à Madrid et après ce seront les Jeux Olympiques.
Qu’est-ce que cela représente pour vous les JO en tant qu’arbitre ?
Moi, j’ai participé en tant qu’athlète en 2004. À Tokyo, en 2021 et maintenant à Paris en tant qu’arbitre. Pour un arbitre, c’est comme pour un athlète, quand on commence l’arbitrage, on vise aussi le plus haut. Au début les championnats de France, après on veut les championnats d’Europe, les championnats du Monde, puis après on veut les J.O. On veut participer aux mêmes compétitions. Pour les athlètes les places sont chères, les arbitres aussi. Seize arbitres mondiaux ça ne fait pas beaucoup. C’est un peu le Graal, le top du top quand tu arbitres les Jeux Olympiques.
Propos recueillis par Aurore Quintin