Paris 92 – Jean-Marie Sifre : « Se mettre en position de gagner des titres »

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Président du Paris 92 depuis 2009, Jean-Marie Sifre a su faire du club francilien un cador du championnat de France de handball féminin. Pour SPORTMAG, il revient sur la période compliquée due à la crise sanitaire, et sur les succès du Paris 92, qui a su s’imposer comme un club incontournable en Île-de-France.

 

Quel bilan sportif faites-vous de la première partie de saison du Paris 92 ?

Je suis satisfait des résultats de l’équipe, compte tenu des différents événements liés aux blessures de joueuses et au Covid-19. On a connu une contre-performance, liée à la grave blessure d’une joueuse, Adja Ouattara, qui s’est fait les croisés avec l’équipe de France. Lorsqu’on a repris les matchs, cette blessure a beaucoup affecté l’équipe. On a perdu un match contre Nice à domicile, ce qui n’était pas attendu, mais c’est comme ça. Cette blessure a bien déstabilisé le groupe, on a mis du temps à retrouver un bon rythme. Je suis quand même satisfait, car nous sommes toujours dans nos objectifs de début de saison.

 

Comment est-ce que le club s’organise avec la crise sanitaire ? Est-ce moins compliqué que les années précédentes ?

On est dans de l’adaptation permanente. Je trouve que l’humain a une capacité à s’adapter qui est assez incroyable, puisque d’une semaine à l’autre, les protocoles changent. Ce n’est pas forcément plus simple que ce qu’on a vécu avant, même si on a connu des moments très difficiles avec l’arrêt du championnat en 2020, et la période de huis clos la saison dernière. Aujourd’hui, on a un protocole Covid qui est lourd, et qui nous amène beaucoup d’instabilité. Par exemple, à la veille de notre match à Dijon, on savait que le club bourguignon avait fait une demande de report, mais on ne savait si le match allait être reporté ou pas. On est donc parti là-bas à 8h du matin le jour même du match sans savoir si on jouait dans la soirée.

L’objectif, c’est de jouer les matchs. Pour l’instant, c’est malheureux mais chaque équipe construit un effectif en début de saison avec des objectifs, et ces objectifs, on peut totalement ne pas les atteindre à cause d’événements qui n’ont rien à voir avec le cadre sportif. Le classement n’a pas de valeur sportive. Il existe, et c’est ce qu’on veut. Nous voulons qu’il y ait un classement, mais il n’a pas de grande valeur sportive. En dehors de Metz qui gagne tous ses matchs, toutes les autres équipes rencontrent des difficultés et n’évoluent pas au niveau auquel elles devraient jouer. C’est pour ça que le classement n’est pas révélateur sur le plan sportif. Concernant Paris 92, notre objectif est d’être européen l’année prochaine, on construit une équipe compétitive pour cela. Ca va finir par être notre seul objectif en fin de saison.

 

« Je suis beaucoup moins inquiet qu’il y a deux ans »

Au début de la pandémie vous vous disiez très inquiet pour l’avenir du hand féminin. Etes-vous rassuré aujourd’hui ?

Je parlais de la santé économique des clubs, et je ne peux pas dire que le plus dur de l’orage est passé. Il y a eu de beaux orages, mais les clubs de LFH sont sains pour la plupart sur le plan économique. Je ne veux pas faire de politique, mais on a quand même eu des aides du gouvernement qui ont fait qu’on a pu s’en sortir. Sans ces aides, très peu de clubs auraient survécu à cette crise.

Pour l’avenir, maintenant on n’a plus d’aides – on en aura peut-être quelques-unes après la mise en place des jauges réduites – et on travaille tous pour fidéliser nos partenaires, publics et privés. Pour l’instant, ils sont globalement très solidaires, donc je suis beaucoup moins inquiet qu’il y a deux ans, époque où toutes ces aides n’avaient pas encore été mises en place, et le chômage partiel non plus. Quand l’Etat paye les salaires de nos effectifs, c’est sûr que ça nous aide, même si on n’a pas de rentrées d’argent liées aux matchs.

 

La mise en place du Pass vaccinal complique-t-elle les choses pour vous ?

On n’a pas ce souci-là. Nous avons 100% de notre effectif, de notre staff et de notre environnement qui satisfont au pass vaccinal, donc nous n’avons pas cette préoccupation.

 

Est-ce facile de faire face à une très large concurrence à Paris et en proche banlieue ?

Vous avez raison, le territoire est extrêmement concurrentiel, avec de très grands clubs, mais pas seulement. Quand j’essaye de draguer de potentiels partenaires et qu’on me dit « tu comprends, je donne déjà 200 000 euros pour une loge au Stade de France ou au Parc des Princes ou à La Défense Arena », on ne parle même plus de sport, on parle de l’environnement du territoire. La concurrence est extrêmement rude. Les partenaires privés nous sont très fidèles – on a très peu de pertes de partenaires – car on a un Business Club très actif, où l’idée est que nos partenaires travaillent entre eux. Paris 92 est un réseau pour eux, et dans lequel nous sommes très actifs pour qu’ils puissent faire du business. En dehors de ça, la clé a été de devenir le club parisien et francilien de haut niveau. Paris 92, c’est le club de Paris, c’est le club du 92, le club d’Issy-les-Moulineaux, de l’agglomération et de la région Île-de-France. C’est ça qui a fait que nous sommes devenus incontournables sur le territoire en sport féminin professionnel, et en handball en particulier parce que nous sommes les seuls.

 

« Ne pas laisser une jeune femme sur le carreau à l’issue de sa carrière »

 

Quels sont les objectifs à moyen et long terme avec le club, ceux que vous donnez pour convaincre vos partenaires ?

Notre objectif annoncé et clairement réfléchi, c’est de se mettre en position de gagner des titres. Cela veut dire faire des choix pour monter une équipe compétitive, et trouver du budget. C’est clairement un objectif affiché auprès de nos partenaires. Maintenant, gagner des titres, ça veut dire Coupe d’Europe, Coupe de France et championnat. Quand on aligne les budgets des différents clubs, on voit que l’on est encore loin des deux premiers, Metz et Brest, mais aussi derrière Bourg-de-Péage, Nantes. Ce que je dis à mes partenaires, c’est que si on veut être champion de France, il faut qu’on trouve 500 000 euros, et que c’est avec eux qu’on va le faire. Maintenant, c’est mon boulot d’en trouver de plus en plus.

 

Après 13 ans à la tête du club, la passion est-elle toujours la même ?

La passion est même plus forte aujourd’hui qu’au début. Quand j’ai repris le club, il était dans une situation financière assez catastrophique, rétrogradé en D2 pour raisons financières avec l’ensemble du conseil d’administration qui avait donné sa démission. C’était une période de chef d’entreprise qui redresse une entreprise, plus qu’une passion pour le handball féminin. Aujourd’hui, c’est la passion du handball féminin, du sport féminin, de travailler pour des valeurs représentées par le club, pour la formation des jeunes joueuses, pour leur carrière et leur reconversion ensuite. On est bien au-delà de la passion du match, on est sur le sport féminin et les difficultés qu’on peut rencontrer dans ce secteur. C’est encore plus passionnant de s’occuper de tout cet environnement, de négocier avec les partenaires sociaux des accords sectoriels comme on a pu le faire l’an dernier. Travailler sur tous ces sujets-là, c’est vraiment passionnant.

 

Vous accordez une grandes importance à la formation, comme de nombreux clubs, mais aussi à la reconversion de vos joueuses à la fin de leur carrière, ce qui est plutôt rare…

Exactement. Que la joueuse ait été formée chez nous au pas, si elle a le souhait de terminer sa carrière chez nous, on travaille avec elle sur sa formation pour sa reconversion. Nous avons un réseau d’entreprises important, et des partenaires qui nous suivent complètement dans ce discours-là. On ne veut pas laisser une jeune femme sur le carreau à l’issue de sa carrière sportive. C’est passionnant d’accompagner les joueuses au-delà de leur sport.

Par Simon Bardet

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