Pauline Lecarpentier : « Une année de plus pour m’adapter »

Tout juste arrivée dans la catégorie -76 kg, la jeune lutteuse Pauline Lecarpentier avait bien débuté la saison. Confinée comme les autres sportifs, elle attend de pouvoir pratiquer pleinement son sport en gardant la qualification aux Jeux Olympiques de Tokyo en 2021 pour objectif.

 
Comment avez-vous continué à vous maintenir en forme pendant le confinement, puis maintenant en cette période de restrictions dans le cadre de la lutte contre le Covid-19 ?
Pratiquer la lutte, c’est compliqué, j’en ai fait un peu dans le jardin pendant le confinement. J’ai suivi ma préparation physique et fait de la musculation. François Passarinho, mon préparateur physique, m’a envoyé des programmes en attendant que je puisse le revoir. Le temps était long, car à part regarder des films et s’entraîner, il n’y a pas grand-chose à faire. Ça devenait un peu lourd.
Avez-vous des perspectives pour la reprise des entraînements ?
On attend d’en savoir plus avant de repartir à l’entraînement, sachant qu’il peut y avoir des dérogations pour les sportifs de haut niveau. De mon côté, il faut que je me renseigne auprès de la municipalité de Boulogne-sur-Mer pour savoir comment on peut s’organiser. Les rassemblements de moins de dix personnes dans une salle de lutte sont possibles, mais dans ce contexte, il est difficile de se remettre à pratiquer un sport de combat et donc de contacts.
La Fédération française de lutte vous tient-elle au courant des mesures prises dans votre sport ?
Il y a eu des réunions à la Fédération. Du coup, on sait qu’il n’y aura pas de compétitions avant 2021. Les tournois de qualification olympique pour les JO de Tokyo auront lieu lors de la même période initialement prévue en 2020, en mars et en avril. Ça va être long avant ces dates. Mais comme pour la reprise des entraînements, on ne peut qu’attendre les solutions qui seront mises en place.

« La pression est passée »

Les Jeux Olympiques de Tokyo ont été reportés d’un an. Est-ce une bonne ou une mauvaise nouvelle pour vous ?
Avec les autres lutteurs et le staff de l’équipe de France, nous enchaînions les stages et les préparations pour arriver en forme aux tournois de qualification olympique. D’ailleurs, nous étions en stage à Kiev, en Ukraine, à quelques jours du premier TQO à Sofia (Bulgarie), quand on a dû être rapatrié en France parce que les choses sont devenues compliquées à cause du coronavirus. D’un côté, c’est frustrant de s’arrêter en pleine préparation, d’un autre, ça va me laisser une année de plus pour m’adapter à ma nouvelle catégorie, en -76 kg.
Pourquoi êtes-vous passée de la catégorie -62 kg à la catégorie -76 kg ?
Mon poids de corps est bien au-dessus de 62 kg. Je devais faire des régimes pour perdre du poids, rester dans ma catégorie, et c’était compliqué sachant qu’on est souvent en compétition. À la fin de l’année 2019, j’ai dû déclarer forfait pour les Mondiaux à cause de problèmes de poids. J’étais déçue et je savais que je n’arrivais plus à évoluer dans ses conditions. J’ai donc décidé de changer de catégorie. Comme il y a déjà Koumba Larroque en -68 kg, je suis passée en -76 kg.
 

 
Avant le confinement, vous étiez sur une bonne lancée avec votre titre de championne de France glané à Chalon-sur-Saône (Bourgogne-Franche-Comté), en mars. Que retenez-vous de ce sacre ?
Cela faisait trois ans que je n’avais pas été championne de France (en junior 3, ndlr). C’était un soulagement. Le championnat national est la compétition que je déteste faire, où je me mets trop de pression. J’ai enfin obtenu ce titre et ça m’a fait du bien, la pression est passée. De plus, cette victoire à Chalon-sur-Saône m’a donné le droit de représenter la France lors des tournois de qualification olympique. D’un côté, j’étais contente parce que cela faisait à peine deux mois que j’avais changé de catégorie, c’était donc ma première compétition internationale en -76 kg et mon résultat n’était pas mal. De l’autre, j’étais un peu frustrée parce que la médaille de bronze n’était pas loin. Cependant, je suis tombée sur deux fortes têtes de ma catégorie, la Turque Yasmine Adar en demi-finale qui est déjà sélectionnée pour les Jeux Olympiques, et l’Allemande Aline Rotter-Focken, en repêchage.
Quel est votre regard sur la génération actuelle de lutteuses ?
Le niveau a augmenté depuis les derniers Jeux Olympiques. Avant, les nations fortes comme la Russie et le Japon raflaient tout. Maintenant, on voit lors des championnats du monde de nouveaux pays gagner des médailles, comme l’Inde et la Turquie. Les podiums se prédisent moins facilement. Pour la France, c’est un peu compliqué de se faire une place. Elle ne fait pas partie des nations fortes de la lutte.

« Je n’ai jamais quitté l’ELCO »

Se qualifier pour Tokyo 2021 serait donc une grande reconnaissance pour vous ?
Tout sportif rêve des Jeux Olympiques. Ce serait la concrétisation de tout le travail et des sacrifices que j’ai faits dans ma carrière sportive. Je suis prête à tout pour y arriver. Mais déjà, obtenir ma place, ensuite viser une médaille, c’est autre chose. Je suis encore jeune.
De quelle manière êtes-vous aidée au quotidien pour accomplir ce rêve ?
Je suis entourée dans mon club, l’Entente lutte Côte d’Opale (ELCO), par mon entraîneur David Legrand, mon préparateur physique François Passarinho et ma présidente Élise Legrand. La ville de Boulogne-sur-Mer me soutient aussi et c’est d’ailleurs grâce à elle que je pourrais reprendre les entraînements. Je suis arrivée il y a dix ans à l’Entente lutte Côte d’Opale et je n’ai jamais quitté le club. Contrairement à d’autres lutteurs de haut niveau, je n’ai pas rejoint l’INSEP, je fais mes entraînements à Boulogne. Mentalement, je suis mieux chez moi, dans mon club, avec mon entraîneur. J’ai besoin d’être proche de ma famille et de mes amis, donc ça aurait été trop dur pour moi de partir à Paris. Cependant, je participe aux regroupements à l’INSEP et je suis des stages de haut niveau organisés par la Fédération française de lutte.

Propos recueillis par Leslie Mucret
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