Grand espoir de la lutte tricolore, Rakhim Magamadov a signé un doublé exceptionnel. Après son titre de champion d’Europe U20, le Montalbanais est allé chercher le titre mondial fin août à Sofia (Bulgarie). A seulement 18 ans, le lutteur peut se permettre de rêver très grand. Son regard est déjà tourné vers les Jeux olympiques de 2024…
Tout d’abord, félicitations pour ce titre de champion du monde ! Est-ce que cette médaille d’or a un goût de revanche, après la défaite en finale l’année dernière ?
Merci beaucoup ! Oui, complètement, j’arrivais avec encore plus d’envie et de motivation. Je la voulais tellement cette médaille, je savais qu’elle était à moi et à personne d’autre. Cette année, c’était la mienne : champion d’Europe et champion du monde, je voulais tout gagner ! C’était l’objectif en démarrant cette saison, et je suis très satisfait d’avoir réussi. Un tel doublé, chez les U20, ça fait plaisir sur le CV.
Comment avez-vous transformé le ressentiment de la défaite en source de motivation ?
L’année dernière, cette médaille d’argent au championnat du monde m’avait laissé beaucoup de regrets et de frustration. Je ne voulais plus jamais revivre ça. Je me suis donné les moyens de réussir, et ça a payé. Je déteste perdre, je ne pense qu’à gagner. Je ne sais même pas vraiment comment exprimer ce sentiment en moi. Je veux tout le temps donner le meilleur de moi-même et aller chercher des titres. Cette défaite était donc vraiment dure à avaler. Mais on ne gagne pas toujours, alors il faut savoir se nourrir de ses échecs pour forger ses futures victoires. A l’entraînement, j’y pensais en permanence. J’étais totalement focus sur cet objectif d’être champion du monde.
« Je me sentais au-dessus de tout le monde »
Jusqu’à la finale, personne ne vous a vraiment inquiété (voir encadré). Vous sentiez que vous étiez dans un grand jour ?
Rien ne pouvait m’arriver. Je me sentais parfaitement bien, et je n’ai pas imaginé une seule seconde que je n’irais pas chercher ce titre. Je me sentais vraiment au-dessus de tout le monde, et ça s’est vu pendant les combats. J’étais en totale confiance. En finale, c’est différent, il y a plus de pression. Pour être honnête, j’étais mangé par le stress en première mi-temps ! A la pause, mon entraîneur m’a calmé et m’a donné les bonnes consignes. Ensuite, j’avais vaincu mon stress et j’ai réussi à installer ma lutte. J’avais observé les matchs de mon adversaire, je savais comment le mettre en difficulté. Petit à petit, je suis revenu au score. Et une fois que la machine était lancée, je ne lui ai laissé aucune chance. Tout s’est joué dans la tête.
Pour revenir sur votre parcours : vous avez commencé la lutte très jeune. Avec un père et un grand-père lutteurs, c’était impossible d’y couper…
Impossible ! Mon père m’a dit : c’est la lutte ou rien. Je n’ai pas eu le choix, mais j’en suis très content aujourd’hui. Depuis mes débuts dans la lutte, je crois que mon premier objectif est d’abord de rendre fier mon père. Au moins, cette année, je crois que j’ai réussi. Sans lui, je ne serais jamais allé jusque-là. Ma famille, mes proches, sont une énorme source de motivation pour moi. Il reste encore du chemin, et je sais que si j’ai la force de continuer à avancer, c’est grâce à eux.
« Les Jeux, c’est le rêve de tout sportif »
A seulement 18 ans, vous sentez une différence d’expérience avec des adversaires plus âgés ?
Dans les catégories jeunes, je le sens parfois, oui. J’ai déjà participé à quelques compétitions avec les U23, avec des adversaires qui peuvent avoir trois ou quatre ans de plus de moi. C’est déjà une sacrée différence, et je ressens une marge physique. Mais ce n’est pas un problème pour moi. Si mes adversaires sont plus physiques, alors je suis plus technique. Et s’ils sont plus techniques, alors je suis plus physique. J’arrive à adapter ma lutte, pour essayer de prendre le dessus en appuyant sur mes points forts. J’ai un style de combat très mobile, toujours en mouvement. C’est pour ça que je préfère la lutte libre à la gréco-romaine ! Je mise sur la percussion et je suis toujours à l’attaque, alors j’arrive à poser des problèmes à n’importe qui. C’est au niveau seniors que je sens une réelle différence. Il me reste encore des progrès à faire. Si je suis sélectionné pour les Mondiaux seniors, en ce mois de septembre, j’aurai l’occasion de prendre de l’expérience, et me confronter au meilleur niveau.
A l’horizon, il y a évidemment les Jeux olympiques à Paris qui se profilent…
Forcément, j’y pense déjà, car ils vont arriver très vite. Les Jeux, c’est le rêve de tout sportif. Avoir une médaille olympique, c’est tout simplement le graal, un accomplissement extraordinaire. Et en plus, c’est à la maison ! Je sais que là où j’en suis, il me reste encore du chemin à parcourir. Réussir à y participer, par le tournoi de qualification olympique, sera une grande épreuve. Avec mon niveau actuel, il serait déjà difficile d’envisager une médaille. Il me reste deux ans pour progresser et atteindre le top niveau international. Mais le temps presse, et je sais qu’il faut que je continue le travail et les efforts.