Après l’épreuve du périple vers des lieux plus surs, vient le cheminement vers l’inclusion sociale et professionnelle des nouveaux arrivants. A l’aube d’une nouvelle présidence de la commission Européenne, les politiques favorisant l’inclusion se sont multipliées, avec parmi elles, des leviers autrefois sous-estimés comme le sport…
Des tendances migratoires mondiales à la hausse
« Ce que nous voyons dans ces chiffres est la confirmation d’une tendance à la hausse à plus long terme du nombre de personnes ayant besoin d’être protégées de la guerre, des conflits et des persécutions. » Au moment de la publication du rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR) sur les tendances globales concernant les déplacements forcés de population, son président résume ce que les données confirment d’année en année. On constate que les flux migratoires sont en augmentation, que le nombre de réfugiés dans le monde a presque doublé depuis 2012, et est en constante augmentation avec en 2018 encore un nombre historiquement élevé de populations déplacées de force qui atteint les 70.8 millions d’individus. Ces populations déplacées se retrouvent, dans un premier temps et en majorité, dans des pays voisins, qu’ils soient développés ou non, et que des moyens d’accueil, d’intégration soient mis en place ou non, faute de bénéficier de choix. Toutefois, l’Observatoire International des Migrations (OIM) relève que malgré le fait que les pays qui accueillent le plus de ressortissants étrangers n’y figurent pas, l’Europe dans son ensemble, reste la région qui numériquement accueille le plus de migrants internationaux avec Ces déplacements sont les fruits de conflits, de situations économiques ou politiques instables mais également, et de manière croissante, le fruit d’évènements climatiques extrêmes qui forcent des populations à fuir leur lieu de vie. Ces évènements extrêmes, risquent de se multiplier en corrélation avec le réchauffement climatique global comme le soulignait en 2019 dans ses rapports le GIEC, ou l’Organisation Météorologique Mondiale qui classe 2019 comme la deuxième année la plus chaude jamais enregistrée et la décennie la plus chaude de l’histoire. Ainsi, les populations exposées à ces risques et/ou déplacées de force devraient augmenter de pair, vers des lieux moins exposés aux aléas climatiques et libres de conflits. Parmi ces lieux plus surs figure notamment l’Europe où le réel défi sera d’inclure dans nos sociétés et nos réseaux de solidarités ces nouveaux arrivants.
Une mobilisation des institutions à la hauteur du défi
Conscientes des enjeux, les institutions politiques Européennes et internationales ont saisi la nécessité d’accueillir dignement et d’intégrer les populations migrantes et mettent en œuvre à ce sujet des politiques volontaristes pour favoriser l’inclusion sociale des migrants internationaux. En effet, ces derniers peuvent représenter une vraie plus-value pour l’Europe, au départ économique, dans la mesure où leurs compétences peuvent s’accorder à celles recherchées sur le marché du travail, mais également, humaine, intellectuelle, culturelle et bien sûr, sportive. La Présidente de la commission Européenne, Ursula Von Der Leyen, a chargé différents Commissaires Européens d’œuvrer dans ce sens dans leurs domaines de compétence respectifs. La Commissaire aux affaires internes, Ylva Johansson, a d’ores et déjà mis l’inclusion sociale des migrants comme une priorité pour sa commission comme elle le disait lors de l’évènement . Cette conférence a réuni de nombreux décideurs municipaux et régionaux de toute l’Europe afin qu’ils puissent échanger sur des bonnes pratiques et les nombreux moyens de favoriser l’intégration locale des réfugiés à travers différents focus autour de l’accès aux soins, aux services, à des logements décents ou encore, leur inclusion sociale grâce au sport.
De même, le Commissaire chargé de la promotion du mode de vie Européen, Margaritis Schinas, est assigné à la refonte du système de répartition des réfugiés en Europe. En effet, la procédure actuelle dite « de Dublin » qui attribue au premier pays qui l’a accueilli la responsabilité de l’examen de la demande d’asile, soulève de nombreuses critiques émises à la fois par les pays qui, géographiquement, voient plus de personnes transiter par leur territoire (Italie, Grèce) et ne peuvent leur garantir un accueil décent ; mais aussi par des associations comme La Cimade qui reprochent l’invisibilisation du choix des personnes concernées et leur complète déshumanisation. M.Schinas a donc pour mission de concevoir un nouveau système qui serait idoine, pour les états et les individus concernés, ainsi que de coordonner le travail fait en faveur de l’inclusion sociale, en utilisant pleinement les puissants leviers que sont la culture et le sport. La Commissaire Européenne à l’innovation et la jeunesse Mariya Gabriel se voit elle, en charge d’accomplir cette tâche par le biais du sport, grâce à un programme Erasmus+ au budget renforcé.
L’intégration des réfugiés par le sport représente une mission transversale aux enjeux humains capitaux, que les institutions sportives ont elles aussi su prendre à bras le corps. Travaillant main dans la main depuis 1994, le CIO et le HCR ont créé en 2017 « l’Olympic Refugee Foundation » afin de proposer des activités sportives aux migrants et réfugiés et financer des projets qui leur sont destinés. Dans la continuité de cette collaboration, en 2020, le CIO a remis au HCR la coupe de l’Olympisme pour son action en faveur de l’intégration des réfugiés par le sport , estimant que ce travail contribuait grandement à la diffusion des valeurs de l’Olympisme dans le monde. A cette occasion, le président du CIO Thomas Bach déclarait : « Le HCR partage notre conviction que le sport constitue une force au service du bien dans le monde. Pour les enfants et les jeunes déracinés par la guerre ou la persécution, le sport est bien davantage qu’une activité de loisir. C’est une opportunité d’être inclus et protégé – une chance de guérir, de se développer et de grandir. » Par ailleurs, l’implication des acteurs institutionnels dans le monde du sport s’est déjà matérialisée en 2016 lorsque pour la première fois, une équipe de réfugiés a concouru aux Jeux de Rio sous la bannière Olympique. Saluée, cette initiative inspirante perdurera lors des prochaines Olympiades qui auront lieu cet été au Japon.
L’intégration par le sport, une valeur clé de Sport et Citoyenneté
Dans le contexte de cette tendance à la hausse des mouvements migratoires, et de réactions institutionnelles à ce phénomène, Sport et Citoyenneté s’est placé comme un acteur dynamique de la scène européenne, conscient des enjeux et leader d’initiatives pour favoriser l’inclusion sociale des migrants et réfugiés en Europe par le sport. Nous mettons régulièrement ces questions en lumière, récemment au travers de notre revue « sport et inclusion » mais aussi par le biais de nos projets Européens. Le projet FIRE (Football Including REfugees), financé par le programme Erasmus+ promeut et soutient des initiatives inspirantes venant de toute l’Europe, favorisant l’inclusion sociale des migrants et réfugiés au sein de communautés locales par la pratique du football. Ces activités sportives qui ont pour but de créer du lien social, bénéficient aussi bien aux communautés locales qui s’enrichissent de la diversité, des talents et des opportunités apportées, ainsi que d’un élan de cohésion ; qu’aux bénéficiaires directs de ces initiatives qui acquièrent par le biais du football diverses compétences. Parmi elles, une sociabilité accrue, des compétences linguistiques renforcées ainsi qu’une adaptation en milieu multiculturel et de la confiance en soi, ce qui participe à leur émancipation.
Le succès rencontré par FIRE n’est pas sans lien avec le contexte actuel où il est nécessaire de voir se multiplier les initiatives favorisant l’intégration et l’accès pour tous aux bienfaits d’une activité sportive. Il pousse Sport et Citoyenneté à continuer sur le chemin emprunté et mener dans le futur, de nouvelles initiatives qui feront honneur aux valeurs du sport, à sa capacité à invisibiliser les différences et à souder les populations entre elles. FIRE est une de Sport et Citoyenneté dans la construction de sociétés plus cohésive et solidaires envers les nouveaux arrivants.
Sport et inclusion sociale ont donc formé donc une association victorieuse sur les dernières années, amenant de nombreuses parties prenantes à croire en elle et investir, tant financièrement que politiquement. Les tendances conjoncturelles sur la migration n’indiquant pas une baisse à venir des arrivées, Sport et Citoyenneté continuera d’œuvrer afin d’attribuer une plus grande reconnaissance aux bénéfices du sport en tant que vecteur d’inclusion sociale tout en continuant à agir, concrètement au travers d’initiatives comme FIRE.