Auteur du livre “L’art de maîtriser votre mental”, Sylvain Baert, docteur en psychologie et préparateur mental, aborde la nécessité chez un sportif de savoir contrôler son instabilité via des outils.
Parmi tous les outils que vous évoquez dans votre livre (techniques de respiration, cohérence cardiaque, techniques de relaxation, méditation de pleine conscience, imagerie mentale, sophrologie), lequel est le plus efficace ou le plus populaire chez les sportifs ?
Sylvain Baert : Tout dépend de la thématique que l’on cherche à travailler. On utilise un outil en fonction de l’objectif recherché. La méditation en pleine conscience revient quand même souvent. Depuis les années 2010, il y a une floraison d’articles scientifiques permettant de démocratiser cette méthode. Un autre outil efficace et populaire : la cohérence cardiaque. Cette technique est très simple à mettre en place, accessible. Il y a aussi la relaxation, notamment pour la gestion du stress.
Est-ce que ces outils sont aussi performants pour les hommes que pour les femmes ?
SB : Sur le terrain, je ne vois pas de différence, ni de technique qui se dégagerait d’une autre. Il s’agit plutôt du cas par cas en fonction de la personnalité de la personne, de là où elle se trouve sportivement. Quel que soit le genre, on va plutôt utiliser des tests quand c’est possible pour donner une tendance et peut-être dégager un outil qui serait plus approprié.
Selon vous, si un sportif veut devenir un grand champion dans son sport, à l’image de Martin Fourcade, est-ce qu’il doit obligatoirement avoir un préparateur mental à ses côtés ?
SB : On ne prend pas suffisamment en compte que le mental fluctue beaucoup. Ce n’est pas parce qu’à un moment donné on est arrivé très haut que l’on ne peut pas redescendre. Plus le sportif est fort mentalement, moins son mental fluctue. Il réussira à faire face aux situations. Le préparateur mental lui permet de lui fournir des outils pour gérer au mieux ses fluctuations, notamment quand c’est à la baisse. C’est un facteur d’accompagnement temporel.
J’ai accompagné durant quelques séances un sportif à l’époque qui était 40e mondial au classement ATP. On m’avait appelé, car il avait des problèmes de concentration. Je lui fais un test psychologique et sa note était de 10/20. À chaque fois, on pense que le très haut niveau n’a pas besoin de préparateur mental parce qu’ils ont validé un certain parcours. C’est vrai en partie, ils peuvent avoir une force mentale. Mais l’idée est de l’entraîner, de l’optimiser pour mieux la gérer. Imaginons qu’un sportif a 80-90% aux évaluations mentales. Les pourcentages restants pourraient faire la différence au très haut niveau.
« Plus le sportif est fort mentalement, moins son mental fluctue »
Vous venez en aide à de nombreux sportifs. Pouvez-vous nous donner l’exemple d’un cas précis ?
SB : C’était un joueur, évoluant en Ligue 2, qui allait mal. Il ne jouait plus, il était sur le banc de touche. Je l’ai vu pendant quelques séances. En même temps, il a changé de club. Je ne l’ai plus revu ensuite. Quelques années après, j’ai eu de nouveaux joueurs. On me les a envoyés parce que le premier s’est senti aidé. Il n’aurait pas fait la démarche tout seul. C’est le staff médical qui l’a envoyé.
Je ne peux rien faire de magique, mais parfois, il suffit de quelques repères, de quelques techniques pour les rebooster. Ils n’ont pas conscience de tout cela, car ils n’y ont jamais eu accès. Si on n’est pas bien accompagné, pas bien aiguillé, c’est là où la préparation mentale peut vraiment aider.
Vous ne citez pas leurs noms…
SB : C’est confidentiel. C’est important de pouvoir les citer et, en même temps, il y a certains préparateurs qui tombent dans l’extrême parce qu’ils se mettent dans le palmarès des joueurs qu’ils ont accompagnés, comme s’ils avaient obtenu la victoire grâce à la préparation mentale.
Je pense qu’il y a une question de discipline aussi. Dans le football, cela reste très fermé. Je pense que c’est un aveu de faiblesse. Tout le monde ne connaît pas la préparation mentale. Cela peut encore être perçu comme : “je vais mal, je vois un psy”. Personne n’oserait dire qu’il en fait la démarche. Cela serait mal vu. L’objet de mon livre, c’est aussi de sensibiliser les sportifs là-dessus.