Thomas Chirault : « Je me suis servi de cette expérience pour revenir plus fort »

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Et dire que l’an dernier, il était rétrogradé en équipe B après une blessure à l’épaule ! Le pensionnaire du Stade Clermontois Archerie (26 ans), surnommé « Chichi » par ses entraîneurs et compagnon de l’archère Lisa Barbelin dans la vie, aborde ses deuxièmes Jeux olympiques avec de belles ambitions de médaille. Espérant ainsi aller encore plus loin que la prédiction de son grand-père Gino à ses débuts dans le tir à l’arc. Confidences.

Vous sentez-vous de plus en plus dans l’ambiance Paris 2024 ?

Oui, complètement, on sent que ça arrive, que l’engouement augmente au fur et à mesure qu’on se rapproche du début des Jeux. C’est top de pouvoir profiter de cette opportunité pour faire rayonner notre sport et les athlètes qui y participent.

Comment allez-vous occuper vos journées d’ici au 25 juillet, premier jour de qualification avant les éliminatoires à partir du 28 ?

Par beaucoup d’entraînements encore, quasiment que du spécifique tir à l’arc. On n’est plus dans une approche d’amélioration technique mais plus dans une approche de se préparer à performer dans toutes les conditions en sortant de notre zone de confort : c’est ce qui est prévu jusqu’aux Jeux avec aussi un petit moment de confrontation avec l’équipe d’Inde dans une dizaine de jours pour permettre de jauger notre niveau et travailler l’intensité nécessaire. Aux JO, les matches se passent très vite, il n’y a pas beaucoup de flèches donc il faut être tout de suite très impactant. Ensuite, on fait notre entrée au village des athlètes le 19 juillet avec des entraînements qui débutent sur le site de l’Esplanade des Invalides le même jour pour commencer à s’acclimater au lieu.

C’est l’aboutissement d’une longue préparation ?

Les derniers mois sont passés très vite. On a commencé la première compétition début mars et là on est déjà début juillet : j’ai l’impression d’avoir cligné des yeux et tout est passé d’un coup. Avant, il y avait eu au contraire une période très longue de septembre à janvier-février parce qu’il y a eu beaucoup de travail, beaucoup de flèches tirées, jusqu’à 600 par jour. C’était une période très intense à l’entraînement. Et là, on est dans la dernière ligne droite pour les Jeux : on a eu de très bons résultats sur les dernières compétitions, le titre de champion d’Europe par équipes, la 2e place sur la dernière manche de Coupe du monde, ma 4e place en individuel sur la 1ère manche de Coupe du monde à Shanghai, le record d’Europe par équipes. Il y a vraiment beaucoup de marqueurs qui nous indiquent qu’on est prêts, que la préparation a été bonne et qu’on va pouvoir briller aux Jeux dans quelques semaines. En tout cas, moi, je me sens prêt comme jamais.

Avec quels objectifs ?

Clairement, mon objectif depuis le départ, ce n’était pas cette sélection pour les Jeux mais c’est une médaille d’or à Paris. Par équipes, on a toutes nos chances : on est prêts à tous les niveaux, en termes de relation et sportivement parlant. On a montré qu’on peut produire de grosses performances. Il faudra tout aligner le jour J mais avec le public à nos côtés, presque 8 000 personnes à nous soutenir dans ce lieu majestueux qu’est l’Esplanade des Invalides – je pense qu’aucun archer n’a déjà tiré devant autant de spectateurs – ça va faire la petite différence nécessaire dans les moments décisifs. Et je ne mets pas de côté l’épreuve individuelle : c’est un peu plus compliqué d’accéder à la finale car on est 64 sur la ligne de départ. Mais à Shanghai, on n’était pas loin de 200 et j’ai réussi à me hisser à la 4e place. Après, les Jeux, c’est une compétition hors norme avec des scénarios parfois imprévisibles.

Vous avez vécu les JO 2020 disputés à Tokyo en 2021, vous avez presque 3 ans de plus, ça compte forcément sportivement et mentalement parlant.

Oui, j’ai eu pas mal d’expériences depuis. Les JO à Tokyo, disputés sans public dans une ambiance très particulière, m’ont permis de me rendre compte réellement de ce qu’étaient les JO et l’exigence qu’ils demandent pour espérer remporter une médaille. Cela m’a permis de mettre des mots, des sensations sur cet événement. J’ai aussi traversé une année dernière compliquée : à la suite d’une blessure en fin de saison 2022 au niveau des tendons à l’épaule droite qui a été engendrée par les gros changements techniques mis en place avec l’arrivée de Monsieur Oh (NDLR : le Sud-Coréen Oh Seon-Tek est devenu en février 2022 entraîneur en chef de l’équipe de France), je n’étais plus sélectionné dans l’équipe A. J’ai vécu un moment au plus bas qui m’a permis de revenir aujourd’hui au plus haut, riche de toutes ces expériences. Je me suis servi de cette expérience comme quelque chose de positif, j’ai pris du recul, je me suis concentré sur ma formation professionnelle, la préparation de mon diplôme d’ingénieur en matériaux à Polytech-Sorbonne, j’ai pris plus de temps pour avancer là-dessus, j’ai aussi participé à un circuit de Coupe du monde indoor en ramenant une médaille à chaque étape. Cela a été une année vraiment différente, en termes d’organisation et d’objectifs mais tout aussi profitable car je m’en suis servi positivement pour revenir plus fort. Cela a été difficile, je ne vous le cache pas : une non-sélection après de nombreuses années en équipe A, ça a fait un peu bizarre, du jour au lendemain, de n’être plus personne du point de vue de la fédération parce qu’on n’est plus dans l’équipe, ça a été très difficile à entendre et avoir ce côté un peu caché une fois qu’on n’est plus trop dans le coup. Ça permet de se rendre compte de plein de choses et d’aborder la suite de sa carrière sous un autre angle. Ça m’a permis de rebondir derrière pour aller chercher des performances que je n’avais réalisées jusque-là. Je m’en suis servi comme tremplin pour sauter encore plus haut et revenir le plus vite possible dans cette équipe. C’était l’année de la dernière chance pour participer de nouveau aux JO.

Participer aux Jeux représente quoi dans ce contexte ?

C’est la concrétisation de ma carrière, et remporter une médaille serait vraiment l’apothéose de l’ensemble de mon cheminement dans le tir à l’arc depuis que j’ai débuté : c’est un rêve pour moi depuis que je suis tout petit et avoir réussi à mettre en place et à vivre toutes ces choses comme je les voulais, ce serait vraiment incroyable.

À quand remontent vos premiers souvenirs des JO ?

En fait, quand j’ai commencé le tir à l’arc à 11 ans en Picardie, mon grand-père Gino, qui n’est plus parmi nous aujourd’hui, me parlait des JO : dès mes premières compétitions, il m’a dit qu’il était sûr que j’irais aux Jeux olympiques et qu’il me regarderait à la télé. Cela a été vraiment une révélation pour moi ces quelques mots. Aujourd’hui, je suis très fier d’avoir déjà participé et d’avoir réalisé ce premier rêve à Tokyo mais je reste un peu sur ma faim (il a été éliminé d’entrée) et j’ai envie de ramener une médaille pour continuer d’écrire cette belle histoire. Je me souviens aussi avoir regardé les Jeux de Londres en 2012 lors d’un repas de famille chez ma grand-mère et on avait suivi les épreuves de tir à l’arc avec notamment Romain Girouille qui est aujourd’hui l’entraîneur national pour les hommes. Mon grand-père n’est plus là malheureusement, mon papa non plus, décédé en décembre 2019, mais ma grand-mère Janine est encore là et avec ma mère, ma sœur, mon frère, ma tante et mes cousines, ils seront tous sur place pour me soutenir.

Propos recueillis par Sylvain Lartaud

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