Trail – Marion Delespierre-Mauppin : « C’était vraiment fou d’être là ! »

La Lilloise de 32 ans Marion Delespierre-Mauppin, installée à Lyon, s’est sérieusement mise au trail il y a seulement 3 ans. Elle s’est tellement prise au jeu qu’elle a terminé 2e de la dernière Diagonale des Fous, le fameux Grand Raid de la Réunion. Une sacrée performance qui lui a valu d’obtenir le Coup de cœur du jury aux Lions du sport.

Comment avez-vous vécu la remise de cette distinction ?
Je suis très heureuse d’avoir reçu ce prix et très contente pour mon sport qu’il soit mis à l’honneur. J’étais très honorée de me retrouver sur la scène à côté de tels noms de sportifs comme Caroline Garcia, Mélina Robert-Michon, les basketteuses et basketteurs de l’Asvel ou le footballeur Anthony Lopes. Je n’ai ni la même notoriété ni le même palmarès qu’eux. A Lyon, les sports collectifs sont mis en avant et font partie de l’histoire de la ville. Tous ces sportifs sont professionnels, ce prix est encourageant pour moi qui travaille en dehors de mon sport.

Avoir obtenu le Coup de cœur du jury aux Lions du sport, est-ce une manière de mettre un peu plus la lumière sur le trail ?
Cette discipline, je m’en rends compte par mon métier, est connue et très pratiquée. Je suis médecin dans deux cabinets à Lyon et une bonne partie de ma patientèle pratique la course à pied. Le trail, ça change un peu des sports traditionnels, foot, tennis ou basket. Cela apporte un peu de nouveauté, c’est de plus en plus visible. D’autant qu’à Lyon, nous avons un beau terrain de jeu avec les Monts d’Or et les Monts du Lyonnais juste à côté et un bel événement avec le Lyon Urban Trail (la prochaine édition a lieu le 29 mars). Et même en étant en ville, c’est possible de briller sur des courses montagneuses.

Comment vous êtes-vous mise au trail puis à l’ultra-trail ?
Lilloise d’origine, j’étais nageuse au club de Lille Métropole Natation. Je suis venue à Lyon en 2013 avec mon compagnon Nicolas pour finir notre internat de médecine. Mais les créneaux de piscine ne correspondaient pas à nos horaires de garde et c’est là que nous avons commencé la course à pied. On courait juste entre nous avec un ami, puis j’ai participé à ma première course et petit à petit je me suis prise au jeu. Trois ans plus tard, on a rejoint l’association Tête d’Or Runners qui est à la base un groupe de copains qui courent au parc de la Tête d’Or. Elle est reconnue par la Fédération française d’athlétisme depuis seulement deux ans. C’est le côté social qui m’intéressait avant tout : cela permettait de rencontrer d’autres personnes que dans le milieu médical.

Comment êtes-vous passée du loisir à la compétition ?
J’ai commencé à prendre quelques dossards sur des courses dans la région. Je tournais plutôt bien, j’obtenais des bons résultats et, plus je rallongeais les distances, mieux je me sentais. Depuis 2017, je suis montée en gamme en termes de grosses courses : la CCC (Courmayeur – Champex – Chamonix) (qui est la petite sœur de l’UTMB, l’Ultra Trail du Mont-Blanc), la SaintéLyon où je termine 2e Française, puis j’ai remporté le Trail des Cabornis (42 km) et la Maxi Race (83 km autour d’Annecy), le Tour de la Grande Casse en Vanoise (42 km)…

Jusqu’à la Diagonale des Fous en octobre…
Oui, c’était ma première participation, c’était aussi mon premier 170 km. Jusque-là, je n’avais couru que 130 km maximum. Donc mon objectif principal, c’était de finir la course et de la courir en moins de 35 heures. Là, j’ai terminé deuxième en 32 heures (32h 05’19 exactement). Je ne m’attendais pas à ça. J’avais vraiment envie d’aller au bout mais en privilégiant le côté santé pour ne pas arriver complètement fracassée. Et puis une fois lancée, j’ai fait la course. Je me suis sentie bien dès le départ, je suis partie devant en imprimant mon rythme. Cela a tenu 110 km avant que je ressente un coup de moins bien. J’avais clairement moins d’expérience que l’Américaine Sabrina Stanley qui m’a dépassée et que j’ai dû laisser partir. Je me suis accrochée pour tenir, repousser la douleur à chaque instant et passer la ligne en deuxième position.

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Vous vous êtes dit quoi à ce moment-là ?
J’étais sur mon petit nuage et j’ai vraiment savouré. Une fois sur le podium, je me suis dit que c’était vraiment fou d’être là. Je me sentais un peu gênée, je me demandais si j’étais bien à ma place sur cette course aussi mythique. J’avais du mal à réaliser, c’était un sentiment vraiment particulier. En plus, la Diagonale des Fous, c’est une manifestation sportive hors norme. Ce n’est pas une course business, c’est une course authentique avec une histoire. L’Île de la Réunion vit pour cet événement. Le parcours traverse l’île du sud au nord en passant par les trois cirques classés au Patrimoine mondial de l’Unesco, c’est unique ! C’est plus qu’une course, c’est un véritable voyage. En plus, pour l’anecdote, on y avait passé 8 mois en 2016-2017. Toutes les semaines, on allait courir à Mafate pour préparer la Diagonale des Fous. Je m’étais inscrite sur l’épreuve du 56 km. Et puis, à cause d’une fracture de fatigue, j’ai dû renoncer à prendre le départ au dernier moment, la mort dans l’âme. J’étais terriblement frustrée. Je suis donc très heureuse aujourd’hui d’avoir pu rattraper ce manque.

Cette performance vous donne sans doute envie de gagner cette course ?
Ce ne sera pas pour cette année car j’ai décidé de ne pas la recourir en octobre prochain. En fait, je n’aime pas faire les mêmes courses chaque année. Je savoure encore ce truc, j’ai envie de laisser infuser ce moment et, pourquoi pas, d’y retourner un jour pour faire mieux, effectivement. Cette année, je prépare l’UTMB. Ce sera mon premier vrai UTMB de 170 km. Comme chaque année, le plateau sera énorme, c’est vraiment une course très prisée : c’est le sommet mondial du trail.

Quelles seront vos ambitions ?
Faire un top 10, ce serait incroyable. Je préfère me fixer un objectif de temps : moins de 30 heures. Je vais avoir le même genre de préparation même si c’est plus tôt que la Diagonale, c’est fin août et non pas en octobre. L’autre grosse différence, c’est qu’à l’UTMB, on a le droit d’utiliser des bâtons. Quand on a les cuisses mortes, cela permet d’appuyer en montée et cela aide à soulager les quadriceps dans les 50 derniers kilomètres (sourires).

Propos recueillis par Sylvain Lartaud
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