Vincent Collet : “C’était le bon moment pour ce clap de fin”

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Présent en conférence de presse aux côtés de Jean-Pierre Siutat et Alain Contensoux, l’emblématique coach de l’équipe de France a officialisé son départ du poste de sélectionneur. Si une aventure en NBA ou en EuroLeague pourrait le tenter, ce n’est pas à l’ordre du jour, l’ex-sélectionneur ayant accepté un poste de conseiller spécial auprès de la Direction Technique Nationale.

Si on peut remonter à la fin des Jeux olympiques et au processus qui a amené à cette décision, est-ce que vous vouliez continuer ?

Le soir de la finale, une jeune journaliste m’a demandé immédiatement, “et alors, la suite ?”. J’étais surpris, donc je l’ai un peu rembarrée, j’étais incapable de répondre que ce soit. 

Il y a effectivement un processus, il a fallu un temps de réflexion, je n’étais pas forcément préparé le soir de la finale à cette évolution. Mais ce temps de réflexion m’a permis, comme j’ai toujours fait dans ce type de situation, de poser les plus et les moins. On a échangé avec Alain et Jean-Pierre, ce qui a abouti à cette décision. C’était le bon moment pour ce clap de fin.

À quel point est-ce difficile de devoir mettre tout ça derrière vous ?

Ce n’est bien sûr pas simple. Si ça l’était, ça voudrait dire que je n’ai pas aimé autant que je l’ai aimée cette équipe de France. C’était une histoire d’amour très forte, et pour l’instant, c’est un sentiment difficile pour moi, il faut que je digère ça.

Pouvez-vous nous parler de vos moments les plus difficiles à la tête de l’équipe de France ?

Si je dois retenir trois moments difficiles, je commencerai clairement par les JO de Rio, qu’on a ratés pour différentes raisons. On les termine mal, avec un quart de finale très faible contre l’Espagne, sans se battre véritablement en 2e mi-temps puisque le match était perdu.

Deuxième moment, peut-être plus fort, l’an passé, où on avait plus ou moins les mêmes objectifs qu’on pouvait avoir cette année pour les JO, et où on s’arrête finalement dès les phases préliminaires. J’ai vraiment le regret de ne pas avoir battu la Lettonie. Même si je pense qu’on ne serait pas allés très loin, car on n’avait pas l’état d’esprit pour le faire, on aurait dû au moins se qualifier en quarts de finale. Sur ce match, on avait 10 points d’avance à cinq minutes de la fin, quand Nando (de Colo) a été expulsé on avait encore 10 points d’avance. Sur les dernières possessions on était encore devant, et ça se termine en catastrophe.

Le troisième moment, c’est l’euro 2017. C’est très particulier parce qu’on est en reconstruction, qui est faite autour d’Evan Fournier, de Nando de Colo, de Thomas Heurtel, qui sont trois joueurs offensifs. En préparation, on est très bons parce qu ‘on attaque très bien, on pratique un basket qui plaît à tout le monde, à la fois collectif et plutôt enlevé. Puis quand arrive la compétition et qu’on se fait rentrer dedans, on se désunit rapidement. La cohésion de l’équipe est pourtant très bonne et malgré tout, en huitièmes de finale, on prend 10 points d’avance contre l’Allemagne en première mi-temps. Et en deuxième, on se fait découper par Schröder, qui à lui tout seul nous marche dessus et emmène l’Allemagne en quarts. Mais ces moments difficiles ont toujours été des tremplins pour la suite.

Vous êtes le seul coach français à avoir dirigé trois équipes d ‘EuroLeague ( Le Mans, Villeurbanne et Strasbourg). Avez-vous encore cette envie d’être coach d’une équipe d’EuroLeague ?

Aujourd’hui, tous les clubs sont pourvus en coachs. Le recrutement se fait en mai, voire en juin. Personnellement, je n’étais pas sur le marché, je voulais me concentrer sur les Jeux. Si tu prends une équipe avant les Jeux, tu es pollué par ça pendant la compétition, et je ne voulais pas de cette situation, l’objectif était trop important. Maintenant, ce n’est plus possible d’avoir une proposition, tous les staffs sont au complet. Il faut attendre de voir comment se passe leur début de saison, des places se libéreront peut-être en novembre ou en décembre. Ce ne sont pas des choses qui se souhaitent, mais c’est comme ça que ça se passe.

Qu’est-ce qu’il manque aux coachs français pour avoir des propositions de clubs d’EuroLeague ? On sent que c’est un cercle très fermé et qu’il est difficile d’y entrer…

C’est difficile à dire. Je pense que c’est un ensemble, ce n’est pas uniquement une chose. C’est effectivement très fermé, ça tourne beaucoup en rond, il faut pouvoir y pénétrer. Bien sûr, il y a les résultats. Nos clubs, hormis ces dernières années, en avaient peu. Ça commence à changer, la finale d’EuroCup l’an passé opposait deux clubs français. A chaque fois qu ‘on a des résultats, ça met en lumière un autre basket. Et forcément, derrière, en tant que coach on touche aussi les dividendes, donc c ‘est quelque chose qui peut vite changer.

C’est aussi par rapport à notre façon de jouer, notre identité de jeu n ‘est pas toujours claire. Dans les pays étrangers, on résume souvent nos réussites au basket à nos qualités athlétiques, ce qui est en partie vrai, mais pas totalement. Il est évident qu’aujourd’hui, le fait d’être athlétique ne suffit plus pour devenir vice-champion olympique par exemple. 

Je regrette de ne pas avoir accepté la proposition de l’Olympiakos en 2014. Même si ça s’était mal passé, un autre club m’aurait probablement fait une proposition tout de même. Une fois que l’on est dans le circuit, on y reste.

Est-ce que reprendre une sélection étrangère pourrait vous intéresser ?

Je pense que non. J ‘ai parlé de mon attachement à l ‘équipe de France. J ‘ai été le coach de l ‘équipe de France, et je ne veux pas être celui d ‘une autre équipe nationale qui pourrait jouer contre l ‘équipe de France. Peut -être que je me trompe, mais à ce jour, c ‘est le sentiment que j ‘ai. Dans ma vie, j ‘aurais été longtemps l ‘entraîneur de l ‘équipe de France, et seulement de l ‘équipe de France. 

Avec votre nouvelle casquette de conseiller, est-ce que vous comptez promouvoir une identité de jeu défensive auprès du nouveau staff, et serez-vous sur le banc pendant les matchs de l’équipe de France ?

Non, je ne serai pas sur le banc, mes missions n’ont rien à voir avec l’équipe de France masculine. Pour moi le banc, c’était avant et ce ne sera pas après. Je serai prêt à parler avec le futur staff s’il le désire, et seulement s’il le désire. 

Mes missions sont auprès d’autres coachs en devenir. Mais même pour cela, d ‘ailleurs, ce sera toujours quelque chose de consenti. C’est de l’ordre du compagnonnage, c’est donc très individuel et singulier, ça doit donc être souhaité parce que sinon, ça ne fonctionne pas. 

Quels seraient vos premiers conseils aux futurs coachs et staffs ?

Le but derrière tout ça, c’est de pouvoir faire quelque chose qui ressemble à l ‘académie des coachs dans laquelle j ‘ai été intégré en 2011, parce qu’on considère qu’ à un certain niveau, pour les compétitions mondiales, il n ‘y a pas beaucoup de gens qui ont la possibilité d ‘en discuter. Ce sont des expériences qui sont uniques et il n ‘y a que le partage qui permet de retransmettre leurs leçons. On ne peut pas faire une école de formation pour former des coachs qui vont aller après au plus haut niveau. 

On a des filières de formation, elles existent déjà, on va les renforcer, mais ce n ‘est pas suffisant pour emmener des gens au plus haut niveau. Il n’y a que le partage qui peut permettre ça, c’est-à dire que des gens déjà passés par là puissent leur transmettre ce qu ‘ils ont vécu. 

Pour la suite de votre carrière, un poste d’assistant en NBA avait été mentionné. Qu’est-ce qui vous motiverait à laisser de côté ce qui débute aujourd’hui au profit de ce challenge ?

La première résonance, c’est que j’estime être encore un coach. Même si ça fait un mois que les Jeux sont terminés, dans ma tête, je suis toujours coach. La NBA, ce n’était pas quelque chose qu’il était possible de faire dans l’immédiat, pour les raisons que j’ai évoquées. C’est quelque chose que je serais curieux de découvrir, mais pas à n’importe quel prix. Il peut très bien y avoir une proposition qui ne soit pas intéressante d’un point de vue sportif et que je ne la prenne pas. […] Si j’y vais, c’est à fond. Je connais aussi mon âge, je sais que ça peut être une limite, mais je sais aussi qu’on peut être assistant coach assez tard là-bas.

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