Depuis le 24 octobre dernier, Yann Guichard et toute l’équipe de Spindrift sont en stand-by pour se lancer dans le Trophée Jules Verne (record du tour du monde à la voile, en équipage, sans escale).
Comment se déroule cette période de stand-by ?
Toute l’équipe va bien. On n’a pas encore eu l’opportunité de partir. Il nous reste trois semaines de stand-by donc on est toujours motivé. C’est assez complexe car on doit rester concentré sur cet objectif sans avoir de projets autour. On a une actualisation des fichiers deux fois par jour. Au-delà de huit jours on ne connaît que des tendances. Donc on sait aussi que parfois, pendant une semaine, la situation sera totalement bloquée et on peut relâcher un peu la tension. Mais lorsqu’on sait qu’il y a une potentielle situation de départ, on approfondit tous les préparatifs.
Lorsque vous décidez que la fenêtre météorologique est bonne, il vous faut combien de temps pour partir ?
Moins de 24 heures. Toutes nos affaires sont sur le bateau. Le Maxi-trimaran Sails of Change est à Brest pour être au plus proche du départ. Donc il ne reste qu’aux personnes à venir au port. On ajoute le frais pour les premiers jours et on peut partir.
Aujourd’hui, quel niveau de fiabilité avez-vous dans les modèles météorologiques ?
La météo est suffisamment fiable pour que quand on part, on sait exactement les temps que l’on aura à l’équateur. Ensuite ça dépend du “pot au noir“ (zone de convergence intertropicale peu propice à la course au large située au niveau de l’équateur). On regarde la connexion entre l’Atlantique Sud et Nord.
L’Atlantique-Sud est un élément clé ?
Le temps à battre est exceptionnel. On sait exactement les tronçons sur lesquels on doit gagner du temps. Francis Joyon et son équipe ont fait l’Atlantique en 13 jours. On doit le faire en 11 car on perdra du temps à d’autres moments. De plus, ses 10 premiers jours étaient lents. Mais les trois suivants il a été très rapide. Il est donc rentré dans de très bonnes conditions dans l’océan indien. On doit mettre toutes les chances de notre côté, sinon la probabilité de battre le record est quasi-nulle.
Auriez-vous pu partir précédemment ?
Ce n’est pas qu’on est trop difficile. Les fenêtres sur lesquelles on a hésité de partir, on les a suivies et elles n’auraient rien donné. Ce n’est pas faire un tour du monde pour en faire un. C’est notre quatrième tentative. Si on part et qu’à mi-chemin on se rend compte que les conditions ne sont pas bonnes. Déjà il faut pouvoir revenir, et puis c’est 15 jours qu’on a pu passer en stand-by avec d’autres possibilités.
« Un appui formidable et le douzième homme »
Avez-vous la même limite des glaces que celles en vigueur dans les compétitions ?
Lors des courses, il y a des limites précises à ne pas dépasser. Pour nous il n’y a pas ses règles. Après il y a les icebergs et la météo, ce n’est pas parce qu’on va raccourcir la route qu’on ira plus vite. Mais c’est clair qu’il n’y a pas ses limites. On travaille avec des images satellites. Avec leur analyse on peut identifier les gros icebergs et les prendre en compte dans notre routage. De plus on a une problématique cette année avec beaucoup d’icebergs dans le Pacifique Sud. Ce sont donc des passages sur lesquelles on ne pourra pas gagner du temps face à l’équipe de Francis Joyon.
Votre routeur Jean-Yves Bernot est très expérimenté, est-ce un grand atout ?
Oui, avoir à terre quelqu’un comme Jean-Yves nous aide clairement. Il a aussi été naviguant donc il connaît les deux volets. C’est un appui formidable et le douzième homme. Tout comme dans la prise de décision où on a des discussions journalières avec Jean-Yves et Benjamin Schwartz qui est mon navigateur à bord. Tous les trois on a des meetings quotidiens.